«Véritable dérive», c'est ainsi que le président de l'Association des laboratoires d'analyse médicale a qualifié, ce matin, la décision du ministère de la Santé d'autoriser l'octroi d'agréments pour l'ouverture de laboratoires, à des médecins et pharmaciens spécialistes en biologie dite «monospécialisée». Celle-ci autorise dorénavant les médecins et pharmaciens spécialistes en biologie dite «monospécialisée» à ouvrir des laboratoires d'analyse médicale en leur octroyant des agréments selon El-Hachemi Ould Rouis. Le ministère de tutelle, estime-t-il, a donné ainsi son aval pour le libre exercice à «des gens qui ne sont pas des spécialistes». «Et ça, c'est très grave», estime-t-il. Mais là où la décision ministérielle «dérange» le plus c'est que l'on ait «ouvert les portes à des gens qui n'ont rien à voir avec la biologie médicale». Il souligne en outre que le terme de laboratoire d'analyse médicale est dépassé et que l'on parle désormais «de laboratoire d'analyse de biologie médicale». Et à ce titre, la biologie médicale s'adresse «à la biologie des humeurs et tout ce qui va avec». L'intervenant se dit également surpris que le ministère de la Santé ait autorisé à titre d'exemple des anatomopathologistes (ndlr, les médecins qui étudient les tissus pour rechercher les cellules cancéreuses) à effectuer des groupages sanguins. Or, selon lui, ces médecins font certes de l'analyse médicale, mais en aucune manière de la biologie. M. Ould Rouis fait également état d'autres cas similaires qui ne sauraient exercer la biologie médicale. En d'autres termes, n'est pas biologiste clinicien qui veut. «Et pendant qu'on y est, demandons à un gynécologue de faire de l'ophtalmologie», ironise-t-il. En outre, le ministère a également autorisé, à ouvrir un laboratoire d'analyse, des biologistes monospécialistes qui «ont , certes, une compétence dans une branche de la biologie mais pas dans les autres». Pour Ould Rouis, l'heure est aux laboratoires de biologie polyvalente. Pour lui, un seul et unique critère compte dans cette profession : la compétence. Dans le cas contraire, la personne concernée est considérée comme «incompétente». L'invité de la radio met en garde contre les conséquences inconsidérées qu'une erreur de groupage peut avoir sur la santé publique. «Comment voulez-vous que quelqu'un fasse un groupage sanguin alors qu'il ne l'a jamais pratiqué dans sa vie, «s'emporte-t-il. «Imaginez les conséquences d'une erreur de groupage ?», s'exclame-t-il. Il fait observer que même les plus chevronnés et aguerris biologistes cliniciens, les seuls, d'après lui, habilités à exercer cette périlleuse tâche relative au groupage sanguin, se méfient de ce genre d'exercice. Et pour cause, «nous nous tenons le ventre tous les jours pour éviter les erreurs de groupage», témoigne-t-il avant de prévenir que des «erreurs» de ce genre il y en aura toujours. Enfin, Ould Rouis déplore que le ministère de tutelle les ait «superbement ignorés» malgré les nombreuses correspondances qui lui ont été adressées sur la question.