Pratique n Le phénomène du mariage par la seule fatiha, sans autre forme de légalisation de l'union auprès des administrations civiles officielles, a pris de l'ampleur, ces dernières années avec des conséquences pas toujours heureuses. Pour sceller leur union, certains couples se contentent d'une lecture de la fatiha par un taleb en présence de quelques témoins. Si par le passé, cette pratique – conforme aux préceptes de l'islam – était assumée et acceptée par tout le monde, elle comporte aujourd'hui bien des risques. «La société connaît de grandes mutations aussi bien sur les plans économique et social que sur celui des mentalités, devenues, par les temps qui courent, malsaines dans beaucoup de situations, rendant ainsi nécessaire la transcription du mariage auprès des institutions officielles», résume une avocate établie à Oran. En guise de mise en garde contre les risques encourus, une présidente d'une association féminine affirme : «Cette pratique en vogue ne préserve par les droits de la femme. Elle est assimilable à un vulgaire concubinage.» Et d'expliquer : «Un homme qui s'unit à une femme par la fatiha peut se séparer d'elle, dans le meilleur des cas grâce à la même fatiha, avec la tranquille conviction de ne rien risquer. Pis, il peut facilement s'en aller et laisser son épouse livrée à son sort car le taleb qui a scellé cette union n'a ni les moyens ni les attributions légales pour veiller à sa pérennité. En outre, cela rend la tâche de la femme à faire reconnaître ce mariage très ardue.» Des statistiques recueillies auprès du tribunal d'Oran révèlent, d'ailleurs, que le nombre d'affaires liées à la légalisation de mariages par la fatiha a atteint, au cours du premier semestre de l'année en cours, le nombre de 451. Si bien que des femmes peinent à faire reconnaître leur union par la faute de l'entêtement du mari où à cause du parjure de témoins, d'autres, n'ayant pas encore atteint l'âge légal du mariage, préfèrent la seule fatiha, notamment celles, intéressées, dont le soupirant jouit d'une situation sociale confortable ou réside à l'étranger. Outre ces cas, on relève aussi que certaines veuves percevant des pensions après le décès de leur époux recourent à cette pratique par crainte de perdre le bénéfice de cette indemnité. Dans bien des cas, celles qui acceptent ce type d'union découvrent plus tard qu'elles étaient liées à un polygame invétéré, qui use de ce stratagème pour ne pas avoir à solliciter le consentement de la première ou de la seconde épouse comme l'exige le Code de la famille. Un sondage réalisé en 2005 par l'association Femmes revendiquant leurs droits, qui active à Oran, a révélé que parmi les 100 femmes sondées, 20% ont été victimes de cette pratique.