Dommages n Il est difficile en l'état actuel des choses, de dresser un bilan exact des actes de piratage en direction de la Sonelgaz et surtout des pertes qu'ils ont fait subir à l'entreprise. Cela se chiffre, sans doute, à des milliards de dinars. Pirater «l'EGA» comme on dit dans certains milieux, consiste tout simplement à se brancher d'une manière illicite au réseau général du courant électrique. N'importe quel électricien, pourvu qu'il ait quelques notions, peut réaliser l'opération. Mais au risque et péril de l'usager et de ses enfants, car les cas d'électrocution sont légion. Il ne se passe pas une semaine, en effet, sans que la presse nationale fasse mention du décès d'un adolescent ou même d'un enfant à cause d'un câble qui traînait quelque part entre un pylône et un douar. Si le piratage assez répandu des conduites d'eau aggrave le dysfonctionnement de l'alimentation déjà sérieusement perturbée par une sécheresse chronique, le piratage du réseau de Sonelgaz pose des problèmes autrement plus complexes. Avec ce genre de pratique, le transformateur destiné au départ à alimenter une soixantaine de familles, est surchargé au-delà de ses limites, plus qu'il ne peut supporter. Quelles que soient sa robustesse et ses capacités, l'appareil, face à de telles pressions ,lâche, refuse d'aller plus loin et tombe en panne et c'est la coupure partielle ou générale. Pas de courant électrique, aussi bien pour les abonnés qui paient leurs redevances que pour les pirates. En plus des écrans noirs, c'est le congélateur qui se dégèle. Tout le monde tâtonne dans la rue comme à la maison. Même l'eau refuse de monter aux étages. Normal, il n'y a pas de jus. Et quand ces pannes se répètent tout au long de l'année, elles finissent par fatiguer et par faire monter la moutarde au nez des plus timorés. C'est ce qui n'a pas tardé à arriver au petit hameau de Hassi Bounif, à l'ouest d'Oran. Harassés par des coupures cycliques de courant qui les privaient du seul loisir au village, la télé, les habitants sont carrément sortis dans la rue il y a quelques mois pour manifester leur ras-le-bol. C'est vrai que cette colère était déjà exacerbée par un taux de chômage chez les jeunes, supérieur à la moyenne nationale. Pour la seule wilaya d'Oran, les gestionnaires de l'entreprise auraient identifié 20 sites de piratage soit presque un piratage par commune. Et les pertes sèches qu'elle a cumulées, s'élèvent à 60 milliards de centimes. Et nous ne parlons pas des vols de câbles électriques très prisés par les revendeurs et les receleurs pour leur cuivre. Entre les piratages sauvages qui font un tort énorme aux abonnés (en plus du manque à gagner de l'entreprise) et les vols de câbles qui la saignent et qui retardent la rénovation de son réseau, le préjudice causé à la Sonelgaz à l'échelle nationale est difficile à quantifier. Certes, des charrettes entières de contrevenants vont passer devant les tribunaux pour répondre de leur crime, mais arrêteront-ils pour autant le gâchis et la croisade menée contre les installations de l'Etat ? Certainement pas, sauf si les citoyens réagissent et se prennent enfin en charge. Ce qui s'est passé le 9 juillet dans la petite bourgade de Souahlia, dans la wilaya de Tlemcen, permet tous les espoirs. A l'aube, à l'heure de la prière du fajr, des fidèles, des agriculteurs pour la plupart, seront intrigués par la présence d'un groupe d'individus qu'accompagnait une femme. En fait, ce groupe cisaillait tout simplement des câbles pour les monnayer. Et c'est à coups de pierre qu'ils feront fuir les malfrats qui abandonneront leur butin sur place ainsi que leur voiture. Seule la jeune femme a été capturée.