Contrainte Mourad n?aime pas sa femme. Il est homosexuel et s?il l?a épousée, c?est pour faire taire les mauvaises langues? En vérité, il aime Farès. Mourad n?a jamais été attiré par les femmes. Au lycée, il a fréquenté une fille dont il se croyait épris, mais, très vite, il a compris que la gent féminine ne l?intéressait pas. Si en son for intérieur, il assumait bien son homosexualité, il n?en demeure pas moins qu?il ne s?exposait pas au vu et au su de tout le monde, dans une société bourrée de tabous? Seuls deux ou trois amis intimes connaissaient son secret inavoué. Les années passent vite et les parents s?impatientent : Mourad a 30 ans et il doit songer sérieusement à fonder un foyer. Aïcha, sa mère, vieille et usée, ne vit plus que pour ça. C?est une sorte de fixation. A ses yeux, rien n?empêche son fils de se marier. Il est beau, en pleine santé et à la tête d?un commerce fort fructueux. Pourquoi alors s?entête-t-il à demeurer célibataire ? Devant l?acharnement de sa famille, Mourad accepte de sauter le pas, à condition que ce soit sa mère qui choisisse la future élue. En vérité, cela lui éviterait bien des désagréments, lui qui ne sait même pas comment accoster une femme et dont l?idée le répugne ! Aïcha, en revanche, se fait un plaisir d?aller à la quête de celle qui fera le bonheur de son fils unique et lui donnera de beaux enfants. Il y a si longtemps qu?elle rêvait de ce moment ! Enfin, son fils va se caser et elle aura la joie de faire sauter sur ses frêles genoux une ribambelle de gosses qu?elle n?a pas pu mettre au monde. Elle voulait tellement donner des frères et des s?urs au petit Mourad, hélas, la loi divine en a décidé autrement ? Pendant de longues années, elle a souffert de sa stérilité subite juste après la naissance de Mourad. Lorsque le médecin a dit : «Vous ne pourrez plus avoir d?enfant», le choc l?a clouée sur place. A 69 ans, elle écrase une petite larme de joie qui glisse sur sa joue ridée? Son fils va se marier et elle fera tout pour lui dénicher cette perle rare qui lui donnera la chance, à elle, Aïcha, de pouponner, de narrer des contes, de chanter des berceuses et de tenir entre ses bras ces enfants qu?elle n?a jamais pu avoir? Etre «grand-mère»? Ce mot lui arrache un grand sourire qu?elle a perdu il y a bien longtemps? On comprend pourquoi son mari a toujours tout fait pour la rendre heureuse. On comprend aussi pourquoi Mourad, malgré son homosexualité, a préféré se sacrifier plutôt que de la voir s?éteindre dans la tristesse? Oui, il n?aime pas les femmes. Le fait même de les approcher le dégoûte, mais il va se marier et faire des enfants pour que sa mère continue de sourire. Aïcha n?a jamais été aussi heureuse. Il n?a pas le droit de la décevoir, elle qui s?est attelée à lui donner amour, tendresse et une éducation des plus exemplaires? Non, il n?a pas le droit. Il va se marier, même s?il est très amoureux de Farès? Ce dernier ne le sait pas encore. Quelle sera sa réaction ? Farès, violent, était capable du pire? (à suivre...)