Résumé de la 21e partie n Miss Minton et Tuppence discutent notamment sur l'Allemagne où plus rien ne va. Au moment où elles parlent de la guerre qui prendra fin dans 2 mois, Mr Cayley entre... Quelle ânerie ! s'exclama Mr Cayley. Cette guerre est partie pour durer six ans au bas mot. — Oh ! Mr Cayley, protesta Tuppence, vous ne croyez pas vraiment ce que vous dites ! Mr Cayley balayait cependant d'un œil soupçonneux les environs immédiats. — J'ai bien l'impression qu'il y a un courant d'air, grommela-t-il. Je ferais peut-être mieux de rencogner mon fauteuil dans l'angle. On se lança dans l'opération de déménagement. Mrs Cayley, créature au visage anxieux qui semblait n'avoir d'autre but dans la vie que de satisfaire à la moindre des exigences de son époux, jongla avec coussins et couvertures sans cesser d'interroger : — Comment es-tu, Alfred ? Tu es sûr que tu es bien comme ça ? Tu ne devrais pas mettre tes lunettes de soleil ? Il y a une telle luminosité, ce matin... — Non, non. Cesse de jouer la mouche du coche, Elizabeth, s'énerva Mr Cayley. Tu as mon écharpe ? Non, non, mon écharpe de soie. Bon, tant pis. Ça fera l'affaire... pour une fois. Je ne voudrais pourtant pas avoir trop chaud à la gorge, et de la laine.., avec ce soleil... Tu ferais peut-être quand même mieux d'aller me chercher l'autre... Puis Mr Cayley en revint à la situation générale, répéta qu'il estimait que la guerre durerait six ans, et écouta avec un plaisir visible les protestations de Mrs Blenkensop et de miss Minton. — Mes chères dames, pontifia-t-il, vous vous laissez aller à prendre vos désirs pour des réalités. Moi, je connais l'Allemagne. Je puis même dire que je la connais extrêmement bien. Avant que je ne prenne ma retraite, mes affaires m'y conduisaient constamment. Berlin, Hambourg, Munich, je les connais comme ma poche. Et je vous garantis que l'Allemagne peut tenir indéfiniment. Avec l'appui de la Russie... Et, non sans une intense délectation morose, Mr Cayley se lança dans un long exposé, n'interrompant sa mélopée que le temps de s'emparer du foulard de soie apporté par son épouse et de s'en envelopper la gorge. Mrs Sprot apparut et déposa sur le carrelage sa fille Betty, qui étreignait un chandail de poupée et un chiot en peluche auquel il manquait une oreille. — Voilà, Betty, ordonna-t-elle. Tu vas habiller Bonzo pour sa promenade pendant que maman se prépare pour sortir. Lugubre, la voix de Mr Cayley continuait de bourdonner, débitant des chiffres et des statistiques du plus mauvais augure les uns que les autres. En contrepoint, Betty, dans son langage bien à elle, commentait sans se lasser ces propos peu réjouissants à l'intention de Bonzo : — Truquelle... Truqueli... Pah bat ! affirmait-elle. Soudain, un oiseau se posa à côté d'elle. Avec un petit rire ravi, elle tendit la main. L'oiseau s'envola. Du regard, Betty affronta l'assemblée des adultes et articula avec netteté, très fière: — Zozial ! — Cette enfant apprend à parler à une vitesse étonnante, minauda miss Minton. Dis «Ta-ta», Betty, «Ta-ta ». Betty fixa sur miss Minton un œil froid et répliqua : Gluque ! (à suivre...)