Epreuves n La patience est, peut-être, dans nos gènes. Jamais peuple n'a fait autant preuve de patience que le peuple algérien. Pendant des années, il a supporté les privations imposées par un socialisme dur et pur. Pas de dessert, pas de fruits tropicaux dont la fameuse banane, pas de layette pour les enfants encore moins de jouets, souvent pas de beurre et l'huile au compte-gouttes sur les marchés. Il a connu même une pénurie de détergents qui étaient commercialisés sous le manteau. Pour aller à l'étranger, il lui fallait une autorisation de sortie en bonne et due forme signée par le chef de daïra ou par le wali, il lui fallait également une excuse valable comme un rendez-vous médical ou un décès. En outre, il n'avait droit pour son séjour qu'à 320 francs français, l'équivalent aujourd'hui de 20 euros ! Il ne pouvait rapporter que le strict minimum, la douane ne plaisantant pas avec les surplus. Et puis vint la plus noire décennie de son histoire : le terrorisme intégriste. Il a vu des familles massacrées la nuit parce que leur douar était isolé, il a connu la peur, la menace, les intimidations à peine voilées d'une horde de barbares sans foi ni loi, il a vu des malheureux tués à bout portant, des jeunes filles le visage passé au vitriol, des femmes enceintes éventrées, des têtes coupées et brandies au bout d'un piquet, des hommes émasculés, des épouses violées à tour de rôle, des vieillards torturés. Il est allé jusqu'au bout d'un enfer imposé à tous les Algériens qui n'avaient d'autre alternative que d'enterrer leurs morts et de se défendre… contre leurs propres enfants. Avec ses dizaines de milliers de morts, ses dizaines de milliers de blessés et d'estropiés, ses milliers de veuves et d'orphelins qui ont jonché ces années terribles, ce grand peuple qu'est le peuple algérien, a pardonné même s'il ne pourra jamais oublier. L'endurance dont il fait preuve tous les jours et surtout avec laquelle il affronte toutes les épreuves, font de lui, à n'en pas douter, l'un des peuples les plus admirables de la planète. C'est une qualité que l'on trouve rarement ailleurs et qui fait précisément que l'Algérien est presque à part sur la planète. Exception faite toutefois des Vietnamiens et des Palestiniens qui savent ce que le mot sacrifice veut dire. Pour cette raison, on pourrait excuser peut-être tous ses dépassements et tous ses débordements. La hogra n L'Algérien a les reins solides. Il peut tout supporter, parfois même sans broncher. Mais il y a une chose qui lui fait monter la moutarde au nez : la hogra, c'est-à-dire l'injustice. Elle le révolte. Il est capable de tout pour la combattre parce qu'il la considère comme l'ultime injustice que l'on puisse faire à quelqu'un, particulièrement quand il s'agit d'un zawali.