Les pratiques et savoirs liés à l'Imzad et le pèlerinage Rakb au mausolée de Sidi Cheikh ont été inscrits, mercredi dernier, sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité par l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), lors du comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, qui a tenu sa 8e session à Bakou, en Azerbaïdjan. Cette inscription conforte les travaux menés par l'Algérie pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel menacé dans toutes les régions algériennes et même dans les pays voisins. Il est à noter que le patrimoine culturel immatériel de l'humanité comprend les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire, ainsi que les instruments, objets et espaces culturels qui leur sont associés et que les communautés reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Il est transmis de génération en génération, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine. Ainsi, le classement de l'Imzad intervient après le dépôt par l'Algérie d'un dossier international en son nom propre ainsi qu'au nom du Mali et du Niger qui partagent avec l'Algérie ce patrimoine. L'inscription de l'Imzad implique aussi le classement des traditions orales et de la langue comme vecteurs du patrimoine culturel immatériel, tout en incluant l'aspect festif et artisanal. Ce legs mémoriel, commun à toute la société touareg, a pratiquement disparu dans les pays voisins de l'Algérie, notamment le Mali, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad (autres pays qui partagent cet héritage où il ne reste plus que quelques joueuses connues). Une opération d'inventorisation, d'enregistrement et de traduction des poèmes de l'Imzad est menée depuis quelques années par l'Office du parc national de l'Ahaggar (Opna) à Tamanrasset, préalablement au dossier de classification présenté à l'Unesco, en collaboration avec le Cnrpah (Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques). L'inscription de l'Imzad, instrument de musique plusieurs fois millénaire mais aussi patrimoine poétique et artisanal exclusivement féminin, implique par la même le classement de traditions orales et d'une langue communes au cinq pays africains. Après avoir encouragé les quelques rares joueuses encore vivantes à initier les jeunes de Tamanrasset à la pratique de l'Imzad, l'Opna et le Cnrpah ont entamé des travaux de recherches, menés entre autres par Dida Badi, au sein des communautés touareg d'Algérie, du Mali et du Niger. Pour sa part, le pèlerinage Rakb au mausolée Sidi Cheikh, événement qui draine chaque année des milliers de personnes dans le sud-ouest algérien, regroupe des pratiques mystiques et des danses, dont le saf et le â'laoui, ainsi que des jeux équestres et d'escrime. Le Rakb est organisé par les communautés qui descendent du grand soufi, Sidi Abdelkader Ben Mohamed, dit Sidi Cheikh, disparu en 1616 et enterré à Labiodh Sidi Cheikh où un mausolée a été érigé en son honneur. Le pèlerinage rassemble les communautés affiliées à la confrérie soufie dite Boucheikhiya à partir du dernier jeudi du mois de juin de chaque année. La selka, également inscrite dans ce Rakb, consiste à réciter le texte Sacré en choeur pendant toute la nuit du jeudi au vendredi. Au petit matin, a lieu une cérémonie, appelée el khatima, est organisée pour renouveler l'affiliation des communautés à la confrérie Boucheikhiya. Les louanges à Sidi Cheikh, la danse de femmes dite Saf ainsi que la danse guerrière dite a'laoui sont également organisées. Des jeux équestres mobilisant plus de trois cent cavaliers venant de toutes les communautés rattachées à la confrérie, des jeux d'escrime et une commensalité, consistant en l'offre de nourriture aux pèlerins et à tous les visiteurs étrangers, figurent également dans les célébrations du Rakb. Ces classements viennent s'ajouter à l'Ahalil du Gourara, une musique mystique du sud algérien, et à la Chedda de Tlemcen, inscrits au patrimoine de l'Unesco en 2008 et 2012 respectivement, portant ainsi à quatre le nombre de pratiques culturelles immatérielles algériennes classées. La sbeiba, un rituel de danses pratiqué à Djanet et le sboû de Timimoun, célébrant la naissance du prophète de l'Islam, devraient également avoir toutes leurs chances pour être inscrits sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité lors des prochaines sessions du Comité de sauvegarde de l'Unesco. Des dossiers pour le classement du tissage du burnous, de la musique maghrebo-andalouse et du couscous, en tant que patrimoine commun aux peuples du Maghreb, sont également en chantier au Cnrpah. S. B.