Un message qui s'adresse «aux uns et aux autres» avec toute «la franchise que me dictent la Constitution et la fidélité aux sacrifices des Chouhada». Dans un long texte, lu en son nom par son ministre des Moudjahidine, le chef de l'Etat s'est exprimé d'une manière claire, directe et prolixe comme il ne l'a pas fait depuis sa maladie. Il a mis les points sur les «i» en rappelant que «le DRS est partie intégrante de l'ANP», que les «règlements de comptes, l'insulte et les invectives» sont inacceptables et a mis en garde contre la «guerre médiatique» menée contre l'Algérie et sa stabilité. Le président de la République a commencé par reconnaître à tous les enfants de la nation «le droit, voire le devoir d'élaborer des stratégies et plans qu'ils jugent pertinents et utiles, d'envisager comme bon leur semble l'avenir du pays (...)» mais «sans pour autant porter atteinte aux constantes et aux symboles de la nation et à ses institutions. Ils ne doivent pas également susciter la discorde, ni des troubles sociaux qui affectent la stabilité et la quiétude (...)», a-t-il dit avant d'être plus précis en qualifiant les propos qui ont «porté ou ont risqué de porter» atteinte à l'unité de l'Armée nationale populaire de «déclarations irresponsables, non réfléchies». Sans citer Amar Saâdani, le secrétaire général du FLN qui est l'origine de ces déclarations, le président de la République poursuit : «Des déclarations irréfléchies de certaines hautes personnalités publiques, relayées par des commentaires de tous bords, ont donné matière, aux médias nationaux et étrangers, à des commentaires et des supputations attentatoires à l'unité de l'Armée nationale populaire.» Pour le chef de l'Etat, qui a d'ailleurs appelé le peuple, à leur tête les jeunes, «à s'unir autour des constantes de la nation et à faire preuve de vigilance et de prudence», des adversaires, occultes et déclarés, exploitent cette situation préjudiciable pour tenter d'imposer «la thèse du conflit interne au sein de l'Armée nationale populaire en présentant le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) comme une structure agissant en violation des règles qui régissent ses missions et attributions». Une thèse «imaginaire», dit sans détour Abdelaziz Bouteflika et une tentative qui oblige «tous les responsables à agir rapidement afin de mettre un terme à cette situation». Plus violent dans ses propos, le chef suprême des armées lance : «Le Département du renseignement et de la sécurité, en tant que partie intégrante de l'Armée nationale populaire, doit continuer à exécuter ses missions et attributions», et d'ajouter que «nul n'est en droit d'attenter aux fondements de l'édifice républicain ni aux acquis. Nul n'est en droit, quelles que soient ses responsabilités, de se placer au dessus des dispositions de la Constitution et des lois de la République». Mieux encore : «Nul n'est en droit de régler ses comptes personnels avec les autres au détriment des intérêts suprêmes de la nation tant à l'intérieur qu'à l'extérieur», a précisé le Président en rappelant que «l'heure n'est plus à l'insulte et aux invectives» mais «à la nécessité de se concentrer sur ce qu'il y a de mieux pour notre nation». «Ces quelques rappels ont pour objectif de réaffirmer clairement que, contrairement aux allégations et aux spéculations rapportées par voie de presse au préjudice de la stabilité de l'Etat et de l'Armée nationale populaire, le DRS reste pleinement mobilisé pour la bonne exécution des missions qui lui incombent, à l'instar des autres composantes de l'ANP», a poursuivi le président de la République. «Compte tenu des menaces tangibles qui pèsent présentement sur l'Algérie», le Président a appelé «tous les responsables concernés de prendre toutes les mesures requises, afin de rétablir la bonne mesure de concertation et de saine coopération à tous les niveaux et de faire en sorte que chaque responsable et chaque structure agissent conformément aux dispositions réglementaires qui régissent leurs activités». Le Président évoque une tentative de déstabilisation qui relève d'un processus bien élaboré «par tous ceux que le poids et le rôle de l'Algérie dans la région dérangent». Une tentative qui vise «à créer des distorsions et à paralyser les activités de défense et de sécurité nationales». Elle vise «surtout, l'Armée nationale populaire et, au-delà, l'Etat national». Le Président ne cache pas son inquiétude en déclarant que «ce processus peut, malheureusement, être favorisé par le comportement irresponsable des uns et le manque de maturité des autres, sous l'influence des différents volets de la guerre médiatique menée présentement contre l'Algérie, la présidence de la République, l'Armée nationale populaire et le DRS». Accusant «certains (qui) semblent avoir choisi d'emprunter des chemins sinueux», d'avoir «oublié le devoir patriotique à l'égard de la patrie», Abdelaziz Bouteflika appelle l'ensemble des Algériens à retrouver l'esprit patriotique afin de faire face à «ces nouveaux dangers, générés par la division, la rivalité entre des visions antagoniques, la fitna générée par des divergences d'opinions». Démentant formellement «la thèse des soi-disant conflits entre les institutions constitutionnelles, entre la présidence de la République et d'autres institutions, au sein du ministère de la Défense nationale et entre des composantes de l'Armée nationale populaire», le Président demande à tous les citoyens de prendre conscience des «véritables enjeux qui se cachent derrière les opinions et les commentaires, faits au nom de la liberté d'expression» et qui visent «en réalité, des objectifs autrement plus sournois, ciblant la stabilité et l'affaiblissement du système de défense et de sécurité nationales». Il tient à expliquer au peuple que «l'appareil de sécurité nationale, au sujet duquel des commentaires de tous genres et provenances sont émis, est régi par des textes réglementaires qui définissent clairement ses missions et attributions, tant au niveau de l'Etat qu'au sein du ministère de la Défense nationale». Abordant l'échéance de l'élection présidentielle qui «constitue une nouvelle étape censée permettre à l'Algérie de consolider ses acquis dans tous les domaines», le Président s'est adressé au peuple pour «lui dire toute (sa) confiance en sa maturité, sa clairvoyance et en la justesse du choix qui sera le sien». Il appellera toutes les parties concernées par la prochaine élection présidentielle «à s'élever, chacune selon ce que lui dictent ses obligations et son rôle, au niveau de ce que le sens des responsabilités citoyennes dicte en termes de respect délibéré et conscient, des devoirs qu'implique une citoyenneté qu'anime l'amour du bien de la patrie et de son peuple, pour favoriser le déroulement d'une élection présidentielle durant laquelle prévaudra la civilité». Tout en appelant à relever le défi en assurant le succès de l'opération électorale dans le cadre d'une compétition loyale et sereine, le chef de l'Etat terminera son message en disant que «notre objectif est la préservation de ce pays pour les générations actuelles et futures et le parachèvement de l'édification de l'Etat où prévaudra la pleine citoyenneté, l'Etat des institutions dont les responsables s'engagent à respecter dans la lettre comme dans l'esprit, la Constitution et les lois de la République (...) un Etat où il ne sera plus permis que perdure l'arbitraire bureaucratique animé par l'esprit de lucre et d'enrichissement illicite aux dépens du citoyen et de l'Etat, ni de mettre les missions et les moyens humains et matériels des institutions au service de clientèles claniques ou d'en user à des fins égoïstes, partisanes ou sectaires pernicieuses, aux dépens du vaillant peuple algérien qui a tout consenti pour sa patrie et tant donné qu'il mérite que ses serviteurs fassent, tous, preuve de loyauté à son égard et veillent jalousement à préserver sa fierté et sa dignité». H. Y.