Alors que les pouvoirs publics brillent par leur absence concrètement sur le terrain, l'opérateur, lui, tente de se préserver des préjudices économiques en attirant l'attention sur les dangers de la contrefaçon. En attendant un plan national de lutte contre le phénomène, les opérateurs, parfois à titre individuel parfois en groupes, organisent des journées d'information pour prévenir des dangers dont pourraient être à l'origine certains produits contrefaits populairement appelés produits «Taiwan». Les pouvoirs publics ont jugé important de créer par décret exécutif l'Institut national algérien de la propriété industrielle (Inapi). Et pourtant, la réglementation n'a pas réduit le phénomène qui, depuis plus d'une décennie, est, dit-on, «ravageur» car n'épargnant aucun produit. En plus du lourd manque à gagner en matière de revenus fiscaux pour l'Etat, il a pour conséquences immédiates de «fragiliser les industries existantes, de décourager l'investissement national nouveau, de susciter la méfiance des investisseurs étrangers, de détruire l'emploi et de mettre en danger la santé et la sécurité du citoyen». À propos de ce dernier point, il est indiqué que même les médicaments n'échappent pas aux contrefacteurs. Ainsi, 10 à 15% des médicaments commercialisés dans le monde sont faux. 55% de faux médicaments sont sur le marché africain et près d'un million de faux médicaments sont en transit annuellement dans les pays de l'Union européenne. Aucun chiffre n'a été donné en ce qui concerne notre pays, mais il est certain qu'il n'est pas épargné par l'introduction de médicaments contrefaits. Produits cosmétiques et d'hygiène, cigarettes, produits électriques, pièces de rechange automobiles, pinceaux et rouleaux de peinture, quincaillerie, effets vestimentaires... Aucun secteur n'est épargné par la contrefaçon qui utilise deux canaux : une partie de la production locale échappant à tout contrôle et les importations opérées par le biais des circuits informels. Mettre en place les mécanismes nécessaires pour combattre sans relâche ce fléau est urgent. 8 500 agents de contrôle ont été recrutés depuis 2008, et ce, dans la perspective de renforcer le contrôle du marché. Dans le même cadre, le ministère du Commerce a lancé le projet de laboratoire national d'essai dont l'état d'avancement des travaux est à 80%. Cette structure, considérée comme la première du genre en Afrique, permettra de contrôler tous les produits industriels. Elle sera opérationnelle dès le premier semestre 2015. Les missions essentielles de ce laboratoire porteront sur le contrôle de conformité des produits industriels aux normes en vigueur. Il faut noter que ce laboratoire national, qui sera doté de tous les équipements de pointe, prendra également en charge les essais sur des produits industriels, notamment les matériaux de construction et le rond à béton, de métrologie, de robinetterie, les matériaux domestiques à gaz. Ce laboratoire constituera l'outil analytique national pour l'autorité chargée du contrôle de la conformité et contribuera à la promotion de la production nationale. Les 48 wilayas du pays seront toutes dotées d'un laboratoire de contrôle de la qualité des produits de consommation d'ici à 2015, signale-t-on. D'autre part, il faut savoir que plus de 378 208 articles contrefaits ont été saisis en 2013, la cartographie des produits contrefaits n'a pas changé depuis 2007 et la Chine est classée comme première au rang des pays d'où proviennent des articles contrefaits. Le marché de la pièce détachée est secoué ces derniers temps par une certaine polémique au sujet des moyens qu'il faut mettre en œuvre pour stopper l'invasion des pièces de rechange contrefaites sur le marché national. Selon certains spécialistes dans la vente des pièces automobiles, ce phénomène connaît une montée inquiétante dans le pays. En effet, 40% des pièces de rechange en circulation sont trafiquées. Cette contrefaçon touche malheureusement l'ensemble des pièces du véhicule, à savoir freins, feux, roues, essuie-glaces... Divers types de pièces détachées ne sont pas soumis au contrôle préalable du constructeur automobile et ne portent ni sa marque, ni aucune de ses garanties. Sur un autre registre, l'étiquetage pose aussi problème dans notre pays. Celui des produits alimentaires vise à garantir que les consommateurs disposent d'une information complète sur le contenu et la composition de ces produits, afin de protéger leur santé et leurs intérêts. L'étiquetage de certains produits non alimentaires doit également contenir des informations particulières, afin de garantir la sécurité de leur utilisation et de permettre au consommateur d'opérer un véritable choix. Par ailleurs, l'emballage des produits alimentaires doit respecter des critères de fabrication afin d'éviter qu'il ne contamine ces produits. Il est nécessaire aujourd'hui de doter les agents de contrôle d'un nouvel arsenal juridique à même de leur permettre de bien vérifier la bonne qualité des produits. Certains produits échappent au contrôle pour la simple raison qu'ils sont écoulés dans des marchés hebdomadaires ou au niveau de certains commerces qui agissent en pleine illégalité. Il faudrait une armée de contrôleurs pour parvenir à couvrir tous les espaces commerçants. Il faudrait dans ce cas renforcer le potentiel humain et le doter de moyens à même de lui permettre d'agir avec efficacité. Le ministre avait indiqué que 7 000 nouveaux agents contrôleurs seront recrutés à travers l'ensemble des wilayas du pays avant la fin du programme quinquennal 2010-2014. Ces nouveaux contrôleurs seront ajoutés aux 3 600 déjà en activité au sein des différentes directions du commerce du pays. Il est aussi question de former ces agents pour lutter avec efficacité et rapidité contre la contrefaçon. Les normes existent, mais le problème réside dans le fait que leur mise en application et la mise en réseau des laboratoires d'évaluation de la conformité demeurent problématiques. L'Etat doit accompagner les laboratoires de contrôle et d'analyses, les organismes d'inspection et de certification dans leur politique de mise à niveau dans le but de se mettre aux standards internationaux, ainsi que les institutions en charge du contrôle : ministère du Commerce et Douanes. Un appui de l'Etat va les aider à assurer leur mission de régulateur des produits d'importation. Il y a lieu également de revoir le dispositif de contrôle des produits importés et des produits locaux, ainsi que la réglementation qui s'y rapporte. L'Etat devra élaborer une stratégie adaptée en vue de permettre aux laboratoires, aux organismes d'inspection et aux organismes de certification de jouer pleinement leurs rôles de contrôleur et de régulateur pour s'assurer de la conformité des produits importés, d'alléger les frais liés à l'importation des produits et de sauvegarder la santé des consommateurs. L'Etat est interpellé pour accompagner les infrastructures de promotion de la qualité et la mise à niveau des ressources humaines, des équipements et de la formation sur les normes. S'ils sont suffisamment développés, ces organismes pourraient, dans un délai raisonnable, devenir un instrument privilégié de l'Etat, afin de contrecarrer la contrefaçon, de préserver l'économie nationale et de valoriser le produit national. A. K.