Mohamed Rahmani Depuis mercredi dernier, des travailleurs du complexe sidérurgique ArcelorMittal-Algérie d'Annaba ont bloqué toute activité au niveau du laminoir rond à béton (LRB) et du quai réservé au déchargement des matières premières importées à partir des autres sites de l'entreprise à l'étranger. Cette action met en péril le complexe et peut, à terme, mener à sa faillite au vu de la situation financière très critique qu'il traverse. «Ces actions et comportements sont inadmissibles, incompréhensibles et l'attitude adoptée est complètement opposée aux principes contenus dans le pacte de stabilité sociale pour l'investissement signé en septembre 2013 entre les actionnaires, la direction générale d'ArcelorMittal Algérie et le partenaire social. Comme vous le savez, l'usine traverse une situation très critique sur le plan financier en raison de l'arrêt prolongé du haut fourneau n°2 qui a entrainé l'arrêt total des installations en amont et en aval. Afin de minimiser les pertes, préserver les emplois existants, respecter nos engagements vis-à-vis de nos clients et assurer un minimum de ressources nécessaires au financement de l'activité, nous avons décidé d'importer des billettes et des brames pour faire fonctionner nos laminoirs. Bloquer le déchargement des semi-produits importés et arrêter le LRB signifie la mort de la Société», rapporte un communiqué publié dans Infos Usine, la revue interne du complexe, daté du 9 octobre et transmis à notre rédaction régionale d'Annaba. Au niveau de l'unité LRB de l'usine rien ne tourne plus, c'est le calme plat et des ouvriers occupent les lieux empêchant toute activité. Machines à l'arrêt, chariot mobile bloqué, expéditions empêchées, véhicules immobilisés, bref la seule unité qui donnait une bouffée d'oxygène à l'usine au bord de la faillite ne tourne plus. Au niveau du port, une cargaison de 10 000 tonnes de brames et de billettes, produits semi-finis destinés au laminoir, est toujours en attente sur un navire à quai. Là aussi, les travailleurs d'ArcelorMittal empêchent toute activité et veillent à ce que personne ne s'en approche quitte à utiliser la force. Sur cette action qui menace sérieusement la pérennité de l'activité et, de là, les postes d'emploi, un ouvrier nous a déclaré que les travailleurs ont décidé d'entreprendre cette action pour exiger l'institution d'une prime pour les chargements et déchargements. «Nous avons demandé à la direction d'intégrer cette prime dans nos salaires et notre revendication a été rejetée alors nous avons entrepris cette action car le syndicat de l'entreprise ne nous a pas écouté; d'ailleurs nous ne le reconnaissons pas et il ne nous représente pas», nous confie-t-il. Selon nos informations, ces ouvriers qui travaillaient pour une entreprise de sous-traitance et qui avaient été recrutés par ArcelorMittal sont manipulés par des personnes étrangères au complexe dont les intérêts sont menacés et qui usent de tous les moyens pour en paralyser l'activité. Pour le LRB, la principale revendication des ouvriers est le départ du directeur d'unité, nommé il y a quelques mois, car selon les grévistes ce dernier ne les respecte pas et abuse de son autorité à leur égard. Là aussi et selon certaines indiscrétions, il s'agirait de manipulations de l'extérieur. Une petite analyse de la situation fait apparaître qu'il y a volonté flagrante de nuire au complexe sidérurgique, car en bloquant l'approvisionnement du LRB en brames et billettes -sachant que le haut fourneau et toutes les unités en amont et en aval sont à l'arrêt- et en empêchant toute activité au sein de cette même unité, la seule ressource dont dispose l'usine pour continuer à tourner a été supprimée. Le complexe est donc paralysé et plus rien ne tourne. Le syndicat d'entreprise s'est contenté d'un communiqué dans lequel il condamne indirectement et vaguement ces actions sans les citer, tout en appelant à la vigilance, à la solidarité et à l'unité d'action «pour barrer la route aux intrus et aux opportunistes», au dialogue et à la concertation «comme moyen démocratique pour surmonter tous les problèmes», est-il notamment précisé dans le communiqué transmis à notre rédaction et signé par le SG du syndicat ArcelorMittal. Pour sa part la direction du complexe sidérurgique a porté l'affaire devant la justice et a obtenu une décision ordonnant la libération des lieux de travail et a adressé une note à l'intention des travailleurs pour leur expliquer la situation. «La société a pris les mesures nécessaires et entend appliquer la réglementation dans toute sa rigueur car nous ne pouvons pas permettre ce genre de comportements devant les défis qui nous attendent. La société a respecté tous ses engagements contenus dans le pacte de stabilité sociale pour l'investissement et défendra ses intérêts dans un cadre légal. Le Groupe Sider et la société ArcelorMittal-Algérie, désapprouvent et condamnent avec fermeté ces actions qui se déclarent en marge du processus de concertation et de règlement des différends», rapporte un article d'Infos Usine signé conjointement par le directeur général du Groupe Sider et PCA/ArcelorMittal-Algérie, A. Benabbas, et le directeur général d'ArcelorMittal-Algérie, M. V. Kulkarni. Cependant, le complexe est paralysé et rien ne tourne plus depuis le 7 octobre dernier... M. R.