Dans un pays de 1 200 km de bande côtière, le poisson a, au propre et au figuré, la cote ; il fait imploser la mercuriale, en haute saison comme en basse saison, par beau temps comme par mauvais temps, à marée basse comme à marée haute. Le prix de la sardine, par exemple, dépasse, depuis quelques jours, tout entendement ; il a été multiplié par trois, voire par quatre. Dans certaines régions, elle se vend à quatre cents dinars. C'est du jamais-vu. Le secteur de la pêche vit-il une réelle crise produite en mer ? A cette question, beaucoup répondent par l'affirmative. Et pourtant, l'Algérie est un pays exportateur de poisson. Elle en vend à des pays européens notamment. Elle met dans l'assiette des Européens des produits de mer, dits de luxe, comme la crevette, la langouste, l'espadon et la daurade. En valeur, cela correspond à une quarantaine de millions d'euros. C'est insignifiant. Elle en a ainsi été réduite à occuper le bas de l'échelle dans le panorama des exportateurs de poisson de la Méditerranée. C'est en deçà des potentialités dont elle dispose. Les chargés du secteur de la pêche n'arrivent ni à satisfaire les besoins du marché domestique ni à exporter suffisamment sur les marchés extérieurs. Sur le marché local, la consommation de poisson demeure faible : elle est passée, selon des statistiques non officielles, de 2,2 kg par personne et par an à 5 kg par personne et par an, ces dernières années, alors que la norme internationale est fixée à 7 kg et le seuil requis par la FAO est de 6,2 kg par habitant et par an. Que le secteur ait intensifié ses efforts en vue de renforcer les capacités de pêche, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif, et garantir l'efficacité de la stratégie de gestion durable de ses ressources halieutiques, cela ne signifie pas pour autant que les choses ont évolué. Les prix restent, et on ne le dit pas assez, intenables, inabordables pour les consommateurs, les ménages qui, faute de mieux, se tournent vers le surgelé et le congelé, quand ils en trouvent. Depuis des années, on entend parler de réformes engagées dans le secteur de la pêche (équipements, formation…). Les résultats se font cependant attendre. L'on dit que le stock pêchable de l'Algérie est estimé à environ 280 000 tonnes. Est-il exploité comme il le doit ? Les professionnels du secteur rappellent, chaque fois que l'occasion leur en est donnée, que non, parce qu'ils sont sous-dotés de moyens. Pour que cette situation change et que le poisson ne tienne pas le haut du pavé en termes de prix, il faut moderniser l'outil de production par l'acquisition de nouveaux bateaux de pêche équipés de moyens de communication et de détection de zones de pêche, augmenter la production nationale halieutique et développer l'aquaculture. Cette dernière représente aujourd'hui la seule alternative de nature à faire face à l'évolution constante de la demande et à renforcer la production. C'est un défi à tenir. Et les pêcheurs y croient. Y. S.