Cela fait vingt ans, jour pour jour, que les cinq pays du Maghreb ont décidé de créer l'Union du Maghreb arabe (UMA). C'était le 17 février 1989, à Marrakech, au Maroc. Le traité, qui porte le nom de la ville marocaine, a été précédé, moins d'une année auparavant - en juin 1988 - par la déclaration de Zeralda. C'était le beau temps, la lune du miel entre les cinq pays de la région, qui espéraient devenir un ensemble hétéroclite et complémentaire à la fois. Mais, vingt ans après, que reste-t-il de cette UMA qui a tant fait vibrer les peuples du Maghreb des années durant ? Qu'a-t-on fait de ce rêve qui a accompagné, tout au long du XXe siècle, les mouvements libérateurs des cinq pays, notamment des trois nations pionnières, à savoir l'Algérie, la Tunisie et le Maroc ? Mais, avant de répondre à ces questionnements, il faudrait revenir un peu en arrière et tenter de revisiter ces vingt ans de désamour et, même d'hypocrisie. Avant de sceller cette union, qui répondait beaucoup plus à une logique en vogue à l'époque, qui faisait que le monde se construit sur des ensembles, les relations entre les cinq pays, auxquels voulait s'ajouter l'Egypte - la proposition est toujours de mise -, étaient paradoxales, sinon froides, notamment entre l'Algérie et le Maroc. Malgré cela, les cinq dirigeants de l'époque, Chadli pour l'Algérie, Hassan II pour le Maroc, Benali pour la Tunisie, Ould Taya pour la Mauritanie et l'invincible Kadhafi pour la Libye, ont tenté de faire le minimum pour montrer un semblant d'union. Des réunions se sont succédées, d'abord entre les différents responsables avant de s'élargir aux chefs d'Etat. Cela a débouché, donc sur le fameux Traité de Marrakech. Depuis, peu, sinon très peu de choses ont été faites. Sur le terrain, mis à part certaines unités industrielles et la suppression des visas - mesure reprise en 1994 entre l'Algérie et le Maroc- peu d'évolutions ont été enregistrées. Il reste que sur le plan politique, hormis la création d'un parlement et d'un secrétariat général qui font semblant de fonctionner, seuls quatre sommets ont été organisés en 20 ans. Depuis 2005, aucune rencontre, même informelle, entre les chefs d'Etat, n'a eu lieu. Il est vrai que les ministres des Affaires Etrangères et ceux de l'Intérieur se rencontrent de temps en temps -même leurs réunions passent souvent inaperçues - mais sans déboucher sur des décisions concrètes. Cela au moment où chacun des Etats de la région a signé, en solo, l'accord d'association avec l'Union européenne. A cela, s'ajoute un couac de taille : les frontières terrestres - celles aériennes sont depuis rouvertes - entre l'Algérie et le Maroc sont fermées depuis 1994, suite à l'attentat terroriste de Marrakech. A la même période, le Maroc a décidé d'instaurer le visa d'entrée sur le territoire marocain pour les citoyens algériens, puis, l'Algérie avait répliqué par le principe de réciprocité. La mesure a beau être suspendue, par décision des deux chefs d'Etat en 2005, mais sans résultat tangible. A cela, il faut ajouter, comme facteur de blocage, le conflit du Sahara occidental, que le Maroc brandit à chaque fois qu'une issue est entrouverte.Vingt ans après, l'Union du Maghreb arabe ne signifie pratiquement plus rien, sinon un slogan de plus. Or, les cinq pays le savent très bien : leur développement reste tributaire de leur union. A. B. L'intégration économique maghrébine en débat à Tunis La complémentarité dans le domaine agricole, dans la perspective de l'intégration économique du Maghreb, dans un contexte international fortement concurrentiel, a été au centre d'une rencontre organisée hier à Tunis par des instances professionnelles maghrébines, à l'occasion de la célébration du 20ème anniversaire de l'UMA. Pour l'Union maghrébine des agriculteurs (Umagri), basée à Tunis, les bouleversements induits par la hausse de la demande alimentaire mondiale, la multiplication des regroupements et la spéculation sur le commerce des produits agricoles de base engendrent pour les pays du Maghreb un défi en matière de sécurité alimentaire. Le changement climatique et ses pressions sur les ressources naturelles, la forte concurrence sur les marchés extérieurs et l'accroissement des conditionnalités imposées aux exportations agricoles renforcent ce besoin, «aujourd'hui plus que jamais», de coordination de l'action des pays du Maghreb, sur la base de la concertation, de la solidarité et de l'interaction des intérêts, avec un double objectif : protéger les intérêts des peuples du Maghreb et renforcer sa position aux plans régional et international, a estimé le président de l'Umagri, Mabrouk Bahri. Un appel est ainsi lancé aux pays maghrébins afin qu'ils exploitent l'ensemble des opportunités de partenariat, dans le but d'accroître le volume des investissements dans la filière agricole et de lancer des projets efficaces porteurs de haute valeur ajoutée, notamment dans l'agro-industrie. Le président de l'Union maghrébine des employeurs (UME), basée à Alger, Hedi Djilani, a précisé que le processus d'intégration souffrait de l'absence d'approches d'accompagnement telles que l'harmonisation des dispositifs législatifs des pays membres, le maillage des institutions bancaires et financières, l'octroi de régime préférentiel pour l'investisseur maghrébin, en plus de l'absence, présentement, d'une infrastructure maghrébine adéquate (transports terrestre et maritime, autoroutes, voies ferrées). Il a souligné la nécessité pour les entreprises de s'imprégner de la culture de compétition et d'abandonner celle du marché local protégé, annonçant, dans ce contexte, l'organisation par l'UME, en mai prochain à Alger, d'un forum consacré à l'imprégnation des organisations et entreprises de la région d'une vision économique maghrébine unifiée.