Le ministère de la Santé a ordonné le retrait du RHB, un produit présenté initialement comme un antidiabétique miraculeux puis dégradé au rang de simple complément alimentaire. Mesure de précaution bien tardive, mais salutaire. Le ministère a fini par prendre cette décision après celle, de même nature, du ministère du Commerce, et à la suite d'une énorme controverse dans la presse et sur les réseaux sociaux. L'interdiction à la vente de ce produit, fortement critiqué par les praticiens algériens, a donc tardé à intervenir, il faut le souligner encore. Sa mystérieuse homologation, sa mise en circulation et sa défense systématique et énergique par le ministre de la Santé lui-même, sont les trois chaînons d'une bien étrange affaire. Fait unique dans les annales de la médecine algérienne, c'est la première qu'un ministre de la Santé publique s'implique autant dans la défense et la promotion d'un produit de pharmacie ou de parapharmacie. A titre personnel, par médias audiovisuels interposés, et surtout en recevant l'inventeur de ce produit comme s'il accueillait Pasteur ou Pierre et Marie Curie ! Et s'il ne faut pas écouter les mauvaises langues quand elles prétendent que le ministre avait au minimum des sentiments de sympathie ou d'empathie à l'égard de l'inventeur de la prétendue panacée, il est difficile pour autant de comprendre son attitude. Posture qui a consisté à mouiller la chemise au point d'agir en VRP assez motivé pour assurer le SAV du produit ! Peut-être qu'il a été influencé par le militantisme zélé de Echourouk-TV qui a porté le produit au firmament, montrant à l'occasion des qualités insoupçonnées en termes de marketing et vente ! Pourtant, l'inventeur de «Rahmat Rabbi», le désormais fameux RHB, n'est pas diplômé d'une université suisse, pas plus qu'il n'aurait été un ancien cadre de Saidal, comme l'a démenti catégoriquement son ancien P-dg, Ali Aoun. Des doutes sérieux persistaient également au sujet même de sa qualité de médecin, encore plus à propos de ses qualifications dans les domaines de la pharmacie, la pharmacologie, la biologie ou la physiologie. Et on même vu, non sans sidération, ce professeur Tournesol algérien finir par admettre lui-même qu'il n'a jamais été médecin et qu'il ne possède pas de diplôme adéquat ! L'on ne peut donc que s'interroger sur ce qui a motivé la mise initiale sur le marché d'un produit dont on a fini par dire officiellement qu'il ne répondait pas aux critères scientifiques et juridiques présidant à l'analyse de sa conformité et l'autorisation de sa vente. Le fait même que ce soit le ministère du Commerce, qui a agi avant le ministère de la Santé, concerné au premier chef, renforce les interrogations. Le pire dans cette histoire abracadabrantesque est que le RHB a été testé sur des patients, selon les aveux publics de son inventeur ! Le ministre, qui a bien entendu le Merlin l'Enchanteur algérien l'affirmer, savait pourtant que les essais sur des humains sont rigoureusement encadrés. Il n'ignorait pas non plus qu'avant toute commercialisation, tout médicament ou complément alimentaire doit d'abord être testé sur des animaux. Comment dès lors expliquer le soutien indéfectible du ministre en personne et non de l'administration du ministère, à l'alchimiste de «Rahmat Rabbi» ? Mystère et boule de gomme ! Certes, même des médicaments chimiques dûment homologués se sont avérés dangereux et ont été ensuite retirés de la circulation. Mais il ne faut quand même pas mettre sur un même pied d'égalité scientifique des produits diabétologiques, qui ont déjà fait leurs preuves thérapeutiques, et des «Ovnis» pharmaceutiques ! Il est vrai que des «Zaibet» existent aussi ailleurs, sauf qu'ils ne reçoivent pas l'appui personnel du ministre de la Santé et celui d'une télé à forte audience. N. K.