Le siège du parti ne paie pas de mine. C'est un appartement situé à la rue Larbi Ben M'hidi. Presque pas de meubles. Mais dans le hall d'entrée, des piles d'affiches sont entreposées attendant leur acheminement vers l'ensemble du territoire national, notamment dans les 19 wilayas où le candidat de Ahd 54 compte animer des meetings. Un secrétariat doté d'un micro-ordinateur, où s'affairaient deux jeunes filles, pleines d'espoir et d'optimisme quant à la réussite de leur candidat. Elles y croient dur comme fer. Parce que Fawzi Rebaïne n'est pas n'importe qui. Il est issu de la famille révolutionnaire. Son grand oncle n'était autre que Omar Oussedik, son père est tombé au champ d'honneur et sa mère est une moudjahida, Fattouma Ouzegane, qui, même après l'indépendance, n'a pas baissé les bras, continuant le combat, notamment pour les droits des femmes algériennes, pour l'abrogation du code de la famille. Fawzi Rebaïne a été emprisonné par deux fois pour atteinte à la sûreté de l'Etat. Il a été membre fondateur de la première Ligue algérienne des droits de l'Homme, avec Mes Ali Yahia et Menouar, membre fondateur de l'organisation des enfants de chouhada. Toutes deux dans la clandestinité à l'époque. Un parcours militant non négligeable, mais ont le président de AHD 54 n'a pas su capitaliser les acquis qu'il a arrachés, surtout après les événements d'octobre 1988. C'est la deuxième fois que Fawzi Rebaïne tente la course à la présidentielle. Mais, contrairement à 2004, il compte cette fois-ci se présenter comme l'unique concurrent de Abdelaziz Bouteflika, selon ses dires. C'est donc au 53, rue Larbi Ben M'hidi, dans ce modeste appartement, que M. Rebaïne a animé sa dernière conférence de presse d'avant la campagne électorale. D'entrée de jeu, il démentira les résultats du Conseil constitutionnel quant au nombre de formulaires signés. Il en veut pour preuve le décompte qu'il a effectué avec les militants et sympathisants de son parti avant le jour J en présence de deux huissiers de justice qui ont établi un procès-verbal en bonne et due forme. Procès-verbal qu'il montrera à la presse présente en force. «Il est faux de dire que je n'ai déposé que 97 000 signatures.» Catégorique, le P-V des deux auxiliaires de justice faisant foi, il lancera : «Ce sont bien 128 000 signatures et je n'ai pas rajouté les centaines de formulaires qui arrivaient encore.» En fait, M. Rebaïne sous-entendait que le Conseil constitutionnel voulait amoindrir la capacité de Ahd 54 de réunir autant de signatures, et qu'il a juste rempli les conditions requises. La mise au point faite, il abordera la question des observateurs internationaux. A commencer par ceux de l'ONU. Le premier responsable de Ahd 54 a rapporté aux journalistes qu'il a rencontré trois d'entre eux qui lui ont précisé que l'ONU avait des règles et des normes à respecter. L'une d'entre elle et la plus importante en matière de supervision d'élections, c'est que la délégation désignée doit avoir le quitus de l'Assemblée générale ou du Conseil de sécurité. Or, rapporte encore M. Rebaïne, aucune des deux structures n'a statué sur la question. Du moins jusqu'à présent. Toutefois, ses interlocuteurs l'ont informé qu'ils allaient retourner à Alger entre le 4 et 14 avril prochain. Le même discours lui aurait été tenu par la délégation de l'UA. La présence ou non d'observateurs internationaux ne semble pas indisposer outre mesure le candidat à la présidentielle qui n'a pas été, en revanche, de main morte avec la Commission nationale de surveillance des élections. Il rapportera que les candidats s'étaient réunis il y a quelques jours avec M. Teguia. «Nous lui avons fait part de nos préoccupations et des déséquilibres qui entourent le déroulement de la campagne, en termes de moyens financiers. M. Teguia partageait nos inquiétudes. Mais ce qui était évident pour tous, y compris lui, lors de la discussion, ne l'était plus lorsqu'il est revenu nous voir après un coup de fil.» Là aussi, M. Rebaïne brandit le procès-verbal de la discussion, nous invitant à le consulter. Mais cela ne semble pas décourager le responsable de Ahd 54 qui affirme qu'il faut continuer à se battre et ne pas faire dans la politique de la chaise vide. «Nous nous battrons avec les moyens dont nous disposons.» M. Rebaïne se dit continuellement isolé par les médias publics, notamment l'ENTV. Il ne se fait d'illusions, mais il faut «qu'il y ait des gens comme moi pour faire changer les choses. Je demande aux gouvernants de se limiter uniquement au respect des lois de la République. Parce que, malheureusement, nous sommes toujours dans l'ère du parti unique. Il faut un minimum d'honnêteté politique». F. A.