De notre correspondant à Oran Samir Ould Ali Le Haut-Commissariat à l'amazighité, la Ligue des arts dramatiques de Tizi Ouzou, l'Association Numidya d'Oran et le Collectif d'Ath Yenni organisent deux jours d'étude sur les héritages de Mouloud Mammeri, sans doute l'écrivain maghrébin le moins prolifique de sa génération mais aussi, et surtout, l'un des romanciers qui ont le plus indéniablement marqué la littérature algérienne, bien qu'il fût longtemps occulté par les instances officielles et médias de son pays alors même que d'autres auteurs étaient un peu trop célébrés : «Pourquoi ce silence des médias autour d'un auteur aussi capital et aussi lu, pourquoi ce refus d'aborder de front un intellectuel qui ne manque pas d'intérêt, de discuter des idées et des œuvres de cet écrivain en dehors de certaines polémiques biaisées ? Si l'homme Mammeri est parfois jugé, l'écrivain est rarement commenté», s'inquiètent les rédacteurs du texte introductif au programme de l'hommage qui a lieu depuis hier au CRIDSSH. Homme de lettres mondialement connu, traduit dans onze langues, Mouloud Mammeri (1917-1989) n'en demeure pas moins une énigme chez des milliers de jeunes et moins jeunes Algériens. Et ceux qui le connaissent déplorent que l'auteur de l'inoubliable la Colline oubliée et de l'Opium et le Bâton, roman adapté à l'écran par Ahmed Rachedi, n'ait pas encore eu droit à une reconnaissance officielle, ni son œuvre à l'attention et l'intérêt qu'elle suscite ailleurs : «Combien d'Algériens savent que cet homme était également anthropologue et linguiste, qu'il a dirigé le Centre de recherches anthropologiques de préhistoire et ethnographiques d'Alger (CRAPE), qu'il a fondé en France, le Centre d'études et de recherches amazighes, qu'il a reçu le titre de docteur honoris causa à la Sorbonne… ? Et combien se rappellent que c'est l'annulation d'une de ses conférences à Tizi Ouzou qui a été à l'origine du Printemps berbère en 1980», déplore l'une des rares personnes à avoir assisté, hier mercredi, à l'inauguration des deux journées d'étude. A l'évidence très peu, du moins à Oran, puisque la majorité des travées de la petite salle du CRIDSSH sont restées désespérément vides. Parmi les participants à cette manifestation, il y a lieu de noter la présence de Hamid Aouameur, (metteur en scène et directeur du théâtre Jean Sénac de Marseille), qui a donné lecture de la Cité du soleil avec Salima Tayeb et Samia Graïche du T.R Béjaïa, de l'écrivain Hamid Nacer-Khodja, du poète Youcef Merahi (dont le livre Digest de la Kabylie est en vente-dédicace), de Boudjema Aziri, membre du HCA, du linguiste Rachid Benali Mohamed, des écrivains Arezki Metref et Noureddine Saadi. Tous ces participants interviendront autour des héritages, de la personnalité et de l'œuvre de celui dont Tahar Djaout a dit un jour : «[…] Il n'écrit que lorsque la nécessité et la perfection sont toutes les deux au rendez-vous.»