L'urgence de la mise à niveau de l'université algérienne pour répondre aux besoins de l'économie n'est plus à démontrer tant sont évidents, d'une part, la caducité du système universitaire qui ne «produit quasiment plus que des chômeurs», selon une formule bien connue, et, d'autre part, le fossé qui sépare les établissements universitaires des entreprises économiques : «Le monde scientifique moderne s'épanouit sur la collaboration et la coopération partout où les talents doivent être trouvés […]. Malheureusement, le progrès scientifique dans le milieu universitaire en Algérie est souvent entravé par l'isolement», avait regretté dans les médias nationaux un professeur algérien installé à l'étranger. Evoquant une étude de l'Unesco, le même professeur affirme que des pays comme le Liban, l'Iran, le Koweït, la Cisjordanie et Ghaza, qui ont connu (ou connaissent toujours) des conflits importants depuis les années soixante, «se sont montrés capables de maintenir leur place à un haut niveau». Contrairement à notre pays, dont les enseignants et les chercheurs continuent toujours de galérer entre une bureaucratie suffocante et un système universitaire obsolète. Pour de nombreux universitaires (dont certains ont régulièrement recours à la grève pour dénoncer la précarité de leur situation), le salut de l'université algérienne passe notamment par la réhabilitation de l'enseignant, la reconnaissance du rôle de chercheur, la réforme du système, la mise en place de passerelles avec le monde économique et la reconstruction de liens avec l'importante diaspora algérienne installée à l'étranger. Et déjà, l'université d'Alger semble avoir mesuré le rôle que la diaspora en question pourrait jouer dans le développement algérien puisqu'elle organise dès demain une université d'été de la communauté nationale établie à l'étranger. Selon les promoteurs de cette manifestation, qui devrait regrouper 500 participants exerçant dans divers secteurs d'activité, l'université d'été constituera l'occasion de tendre les passerelles entre ces compétences, qui ont maintes fois exprimé leur désir de contribuer au développement économique de leur patrie, et l'Algérie dont les officiels ont, plusieurs fois, réclamé leur retour. Pour autant, il faudra certainement beaucoup plus qu'une université d'été et des professions de foi pour convaincre une communauté bien installée à l'étranger et qui conditionne son retour par le minimum vital, soit un environnement de travail sérieux et un cadre de vie agréable. Consciente de l'importance du secteur économique dans un monde qui n'a jamais été aussi mercantiliste, l'université de Béjaïa a, elle, organisé cette année son troisième forum autour de «l'université et le monde productif» pour insister sur la nécessité de s'adapter aux exigences du marché du travail. «Confrontée à un contexte socioéconomique en perpétuel changement, son défi est de former un potentiel humain, façonner un comportement capable de communiquer, d'entreprendre, d'innover et de créer afin d'aider à la propulsion économique de leurs futurs collaborateurs», avait expliqué son recteur en résumant ce qui est attendu d'une université moderne qui veut aller au-delà du souci de la quantité. Il reste qu'entre les discours officiels et les manifestations organisées ici et là pour vanter les mérites de l'université contemporaine, les premiers intéressés que sont les enseignants et les étudiants attendent toujours cette «petite nouveauté» qui les convaincra que l'université est désormais en marche vers la modernité. Et que les années qui arrivent ne seront pas la copie conforme de leurs précédentes avec les inévitables grèves et débrayages, le manque d'enseignants, les problèmes d'hébergements… qui précédent le tout aussi inévitable chômage avec, en poche, un diplôme qu'aucune université étrangère ne reconnaîtra. S. O. A.