La langue parlée est un système de signes vocaux permettant la communication entre individus. Elle évolue selon l'espace et le temps. La langue arabe par exemple, a mesure qu'elle a conquis des territoires, a gagné en sonorités, en complexité et subi l'influence des autres parlers. De nouveaux mots sont introduits, d'autres déformés et d'autres encore inventés. Une langue évolue donc en fonction de sa mixtion avec les différents langages. Si avant, le brassage des cultures et des langues se faisait soit par le commerce ou par les invasions, de notre temps, les moyens favorisant le mélange sont de nature plus soft mais tout aussi efficaces. C'est l'invasion culturelle. Tellement puissante qu'elle est relayée par des outils technologiques de plus en plus performants. Après la radio dans les années 1930, la télévision prend rapidement le relais. En Algérie, un autre outil a contribué à faire évoluer le langage parlé des nouvelles générations. Il s'agit de l'antenne parabolique. Cette fameuse assiette qui décore toutes les façades des immeubles. Leur rôle : recueillir le signal des chaînes satellitaires étrangères. Dès la fin des années 1980, les premières antennes paraboliques ont fait leur apparition. A cette époque, les têtes étaient orientées vers les bouquets français. Pendant plus d'une vingtaine d'années, les Algériens ont presque boudé la télévision nationale pour celles de l'Hexagone. De ce fait, la langue française a enregistré un renforcement important dans le parler des Algériens. De plus en plus de jeunes parlent correctement la langue de Molière. Il n'est pas rare, en effet, de trouver un adolescent maîtrisant parfaitement le français parlé sans pouvoir transcrire une phrase correctement. C'est la preuve de l'influence de la télévision satellitaire. A partir des années 2 000, les Algériens changent de cap. Les paraboles sont réorientées. Direction les chaînes satellitaires arabes. NileSAt et ArabSat remplacent Hotberd et Astra. Le nouveau système de cryptage des chaînes devenu indéchiffrable et les abonnements onéreux conjugués avec l'amélioration sans conteste des programmes des chaînes arabes ont vite fait basculer le «téléphile algérien». Encore un virage important dans l'influence du langage. Aujourd'hui, il est de bon aloi de prononcer quelques mots en arabe, non pas classique et non plus le dialecte égyptien mais plutôt ceux syrien et libanais. La loi des séries télévisées est établie sans conteste. Les enfants, qui jadis s'habituaient très tôt aux sonorités de la langue française, se retrouvent maintenant à reprendre des chansons en provenance du «Echem» (Orient). S. A.