Les Algériens sont connus pour leur générosité et leurs élans de solidarité à chaque fois qu'un coup dur frappe leurs concitoyens. C'est presque une seconde nature, qui entraîne à la compassion et au don de soi. Les dissensions et les intérêts personnels sont mis de côté, seule compte l'aide qu'ils peuvent apporter. Mais la fausse note réside dans le fait qu'hormis les catastrophes naturelles et autres accidents dont la vie accable les êtres humains, nous restons de marbre. La vue de toutes ces personnes qui peuplent les rues et qui «logent» sous les arcades des boulevards ne semblent pas émouvoir outre mesure. L'indifférence qui nous caractérise face à cette frange de la population a de quoi surprendre. Alors que, sous d'autres cieux, la mobilisation est à son niveau le plus élevé durant la période hivernale pour épargner aux SDF le froid et la faim, et même pour les sauver de la mort, les sans domicile fixe de notre pays sont laissés à leur sort et souffrent aussi bien de la froideur du climat que de celle des cœurs. Ces individus refusés par l'existence nous font face chaque jour et nous renvoient notre insensibilité et notre torpeur devant une situation qui ne peut pas et ne doit pas nous laisser endormis sur nos lauriers, au propre comme au figuré, au moment où ils n'ont rien d'autre que le ciel en guise de toit et des bouts de carton pour y poser leur corps fatigué, la nuit venue. Qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, ils hantent les rues et rien ne vient les protéger du froid, si ce n'est quelques actions sans envergure du Croissant-Rouge algérien et de la Direction de l'action sociale. La société civile ne bouge pas le petit doigt pour venir en aide à ces damnés de la terre. Les restaurants de la rahma, nos restos du cœur, qui activent durant le mois de Ramadhan grâce à l'initiative de leurs propriétaires et à la générosité des donateurs et des âmes charitables, leur restent désespérément fermés pendant l'hiver, seuls quelques chanceux bénéficient épisodiquement d'un repas chaud. Créer un espace où les SDF pourraient avoir le gîte et le couvert en période de froid, cela devrait être possible si le mouvement associatif et la société civile pensaient à sensibiliser les éventuels donateurs pour la mise en place d'une structure non étatique qui prendrait en charge ces laissés-pour-compte. C'est cela l'humanisme. R. M.