Le «cessez-le-feu permanent» demandé par les Nations unies à Bangkok et Phnom Penh semble plus fragile que jamais après l'annonce par l'armée thaïlandaise qu'un soldat avait été blessé lors d'un nouvel incident à la frontière. «Le Cambodge a lancé des grenades à main vers la Thaïlande et nous avons tiré des coups de feu et c'est tout», a indiqué Sunsern Kaewkumnerd, quelques heures à peine après la réunion du Conseil de sécurité de l'ONU à New York. «Ce ne sont pas desaffrontements», a-t-il noté, précisant qu'un soldat de son armée avait tout de même été blessé. Les deux voisins se disputent une zone frontalière qui abrite le temple de Preah Vihear, des ruines du XIe siècle dont le classement par l'Unesco en 2008 avait provoqué la colère des nationalistes thaïlandais. Ils se rejettent mutuellement la responsabilité du déclenchement d'affrontements à l'arme lourde qui les ont opposés entre le 4 et le 7 février, tuant dix personnes, dont sept côté cambodgien. Lundi, après avoir entendu leurs arguments, le Conseil de sécurité les a exhortés à «éviter toute action qui pourrait aggraver la situation» et à «établir un cessez-le-feu permanent, à le respecter pleinement et à résoudre la situation pacifiquement par un dialogue efficace». Mais les protagonistes continuaient hier de s'opposer comme au premier jour sur la façon d'en finir avec leur querelle, en revendiquant tous deux être sortis vainqueur de la réunion de New York. Le Cambodge avait réclamé un cessez-le-feu durable et a été entendu sur ce point. Mais il a été débouté de sa requête d'envoi de Casques bleus dans la zone contestée. Il exige par ailleurs l'implication d'un tiers, en particulier l'Association des Nations d'Asie du Sud-Est (Asean). Mais Bangkok juge cette médiation inutile. «Si la communauté internationale pense que le problème doit être résolu de façon bilatérale, le Cambodge n'a aucune raison de refuser. Ils doivent revenir discuter», a estimé hier à Bangkok le Premier ministre thaïlandais Abhisit Vejjajiva. «Les négociations bilatérales ne marchent pas», a répondu, pour la énième fois, le porte-parole du ministère cambodgien des Affaires étrangères Koy Kuong. Les deux ministres des Affaires étrangères, présents à New York, devraient toutefois participer le 22 février à Jakarta à une réunion avec leurs pairs. Le temple khmer au cœur de la dispute relève de la souveraineté du Cambodge, selon une décision de la Cour internationale de justice de 1962. Mais les Thaïlandais contrôlent ses principaux accès et les deux pays revendiquent une zone de 4,6 km2 en contrebas de l'édifice qui n'a pas été délimitée, comme d'autres zones de la frontière. Phnom Penh a accusé l'artillerie thaïlandaise d'avoir causé l'effondrement d'une aile de l'édifice pendant les combats. L'Unesco a annoncé de son côté l'envoi dès que possible d'une équipe pour évaluer les dégâts. Une mission catégoriquement rejetée par la Thaïlande qui a accusé l'agence onusienne d'avoir déclenché la dispute en classant le temple. R. I.