Un patient atteint d'une tumeur au poumon s'est vu greffer une bronche artificielle. Une première mondiale, réalisée par une équipe française, à l'hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis), par le Pr Emmanuel Martinod et son équipe, dont le Pr. Alain Carpentier de l'hôpital européen Georges-Pompidou, en France, ont rapporté jeudi les agences de presse. Il s'agit d'une première chirurgicale porteuse d'espoir pour les malades atteints d'un cancer du poumon : une équipe française de l'hôpital Avicenne de Bobigny a greffé avec succès une bronche artificielle chez un patient de 78 ans, lui évitant l'ablation complète du poumon. L'intervention de trois heures a été réalisée le 28 octobre 2009, mais l'équipe du Pr. Emmanuel Martinod, chirurgien thoracique et vasculaire, a préféré s'assurer de sa réussite avant de la rendre publique. Elle est l'aboutissement de dix années de recherche. Aujourd'hui, le patient «va très bien», selon le Pr. Martinod. «Il justifie d'une surveillance régulière, mais il va bien, il marche, il va dans sa maison de campagne», a-t-il précisé jeudi lors d'une conférence de presse. «Il a la fonction respiratoire d'un patient de 80 ans qui a fumé», a ajouté le conférencier. Actuellement, la chirurgie est le meilleur traitement des formes précoces non métastasiques du cancer broncho-pulmonaire, le plus meurtrier des cancers. Si la tumeur se situe en périphérie du poumon, seule une partie du poumon est enlevée. Mais si la tumeur est plus centrale, une ablation complète peut être nécessaire. La mortalité post-opératoire est alors importante, jusqu'à 26% à 90 jours. «Cette intervention ne s'adresse pas à tous les patients qui ont un cancer du poumon», a-t-il souligné, appelant en outre à «rester très prudent» dans l'attente des résultats d'une étude sur 20 à 30 patients qui doit débuter ce mois-ci. La bronche artificielle, qui vient se substituer à la bronche touchée par la tumeur, est constituée d'un tissu biologique (morceau d'artère prélevé sur un donneur mort), dont les cellules ne sont plus viables, renforcé par une structure métallique interne (stent). La greffe de tissu aortique, préservé par le froid et stocké dans une banque de tissus, présente l'avantage de ne pas rendre nécessaires de médicaments antirejet, contre-indiqués dans les cancers. Les travaux expérimentaux ont été réalisés dans le laboratoire de recherche bio-chirurgicale du Pr Alain Carpentier, mondialement connu pour la mise au point des bio-prothèses valvulaires cardiaques et président de l'Académie des sciences. «On assiste à une régénération de la bronche», a expliqué le Pr. Carpentier, qualifiant ce résultat de «magique». Le tissu aortique constitue une «matrice» que viennent coloniser les cellules bronchiques pour reconstituer un épithélium, la partie de la bronche en contact avec l'air, dont les cellules permettent à la fois la sécrétion de mucus et «un ramonage permanent de la bronche». Les médecins ont également pu constater en laboratoire une régénération du cartilage, la structure naturelle qui assure la rigidité de la bronche. Mais pour le moment, il n'est pas prévu d'enlever le stent.«Dans le contexte particulier des patients atteints du cancer, votre intervention représente un progrès et un espoir nouveaux dont vous pouvez légitimement être fiers», a écrit le ministre de la Santé Xavier Bertrand dans une lettre de félicitations au Pr. Martinod. Le cancer broncho-pulmonaire tue plus de 29 000 personnes chaque année en France (projections 2010 de l'Institut de veille sanitaire), dont plus de 21 000 hommes. Près de 30 000 nouveaux cas étaient attendus en 2010. Les taux de survie pour ce cancer sont faibles : 46% un an après le diagnostic, seulement 14% cinq ans après. Le cancer broncho-pulmonaire représente la première cause de décès par cancer. Dans 90% des cas, le tabac est à l'origine de cette pathologie. Agressées en permanence par les substances cancérigènes contenues dans la fumée de cigarette, les cellules qui tapissent l'intérieur des bronches finissent par proliférer de façon anormale et par obstruer les tissus. Certains signes doivent alerter et amener à consulter un médecin afin d'entreprendre des examens qui s'imposent. Des crachats contenant un peu de sang, des infections respiratoires récidivantes ou difficiles à traiter, une toux persistante différente de celle du fumeur, un essoufflement anormal, une modification de la voix, une douleur dans la poitrine, un amaigrissement inexpliqué, une fatigue, une altération de l'état général figurent parmi les symptômes du cancer du poumon. R. S.