De notre correspondante à Tlemcen Amira Bensabeur Les travaux du colloque international sur la poésie féminine se sont clôturés, hier, à Tlemcen par une lecture des recommandations. Les intervenants ont souligné la nécessité d'approfondir la recherche et de faire sortir les poétesses de l'anonymat.Cette rencontre scientifique, à laquelle ont pris part de nombreux chercheurs nationaux et internationaux, a abordé l'ensemble des sujets. Le Dr Benali Zineb de l'université de Paris VIII, évoquant les chants féminins du pays chaoui, a indiqué qu'ils sont bilingues (arabes et amazigh et de plus en plus monolingues. «Ils ont pris les couleurs de leurs temps, des amours secrètes, et, bien sûr, de la vie et de la condition des femmes, de la guerre. Ils semblent avoir tenu, en changeant», dira l'oratrice qui n'a pas manqué de souligner que, aujourd'hui, les nouveaux supports les font reculer car, a-t-elle expliqué, on ne chante plus dans les fêtes, et si l'on danse toujours, on écoute moins… De son côté, le Dr Amria Belkaïd de Tlemcen a parlé du rite dans la poésie féminine orale, précisant que, en raison de la place qu'il occupe dans le discours versifié au sein de la poésie féminine orale, il exige un intérêt particulier. «En tant qu'expression, cette poésie traduit la cohésion du groupe social et reflète sa vie quotidienne, elle est non seulement un moyen de communication mais aussi une base de régulation sociale, économique, religieuse et culturelle.»La poésie orale et l'importance de sa complication ont été largement expliquées par le Dr Brahmi Fatima. Elle a indiqué que les pédagogues, les historiens et les sociologues feraient un bon usage de la poésie féminine, pour en faire des leçons, des supports et des événements historiques témoignant d'un vécu et d'un passé de tout un peuple. «Ces productions orales populaires, transmises de père en fils, n'aspirent pas seulement à une présence timide aux côtés des cultures officielles, mais à leur imprégner une légitimité sociale et civilisatrice parce qu'elles sont plus proches de l'âme des gens et plus intimement liées à leur réalité, leur vécu et leur histoire. Nous sentons ainsi l'importance de documents portant sur cet héritage populaire, pari non négligeable du legs culturel», dira-t-elle Quant au jeu de la bouqala (pluriel bouqalète), il a été évoqué par le Dr Bouchrtit de France qui expliquera qu'il consistait à réciter, quelquefois à improviser, un court poème appelé bouqala qui exprimait des présages. La récitation, a-t-elle indiqué, était précédée d'une préparation et d'une invocation dont un récipient, également appelé bouqala était le centre. «Cette pratique exclusivement féminine et citadine, connue autrefois dans quelques villes, est tombée en désuétude pour renaître sous d'autres formes liées à sa diffusion, en tant que texte écrit fixé par les chercheurs qui l'ont envisagé sous divers aspects […]. Cette fixation écrite de poèmes et les travaux auxquels ont abouti les recherches ont sans doute contribué à donner à cette pratique une seconde vie qui, de jeu de divertissements réservé à l'intimité de l'espace domestique féminin, s'est propagé dans l'espace public par le biais de la radio durant les années 1970 et de l'Internet de nos jours», dira la chercheuse. Dans sa conférence sur «la poésie féminine à Tlemcen et sa région», l'universitaire Mourad Yelles de Tlemcen a fait une sorte d'état des lieux de la recherche sur la poésie féminine dans cette région. Plusieurs conférences ont été données lors de ce colloque de trois jours, portant notamment sur «les travailleuses de la laine», «l'origine anthropologique du jeu de la bouqala», «la création poétique féminine villageoise de Kabylie»…