Le bombardement vendredi du palais présidentiel qui a fait des morts et des blessés parmi les personnalités du pouvoir pourrait constituer un point de non retour dans le bras de fer qui oppose le président Saleh et les contestataires. La journée d'hier a été marquée par de nouveaux heurts dans les villes de Taëz et Sanaa. Le Yémen semble engagé dans le pire. Les responsables blessés la veille sont hospitalisés en Arabie Saoudite voisine. Il s'agit du Premier ministre Ali Moujawar, du président de la Chambre des députés et du vice-Premier ministre pour les Affaires intérieures. Le flou reste entier en ce qui concerne le président Saleh. Hospitalisé à l'hôpital militaire de la capitale après avoir été blessé dans l'attaque. Sa situation serait «stable» et «n'inspire pas d'inquiétude» selon les canaux d'Etat. «Légèrement blessé à la tête» Saleh a assuré être bien portant dans un message audio diffusé par la télévision. Saleh a fait porter la responsabilité de l'agression à son rival, Sadek al-Ahmar, le plus puissant des chefs tribaux du pays. Les hommes de ce dernier, se sont engagés dans une bataille sanglante contre les forces fidèles au chef de l'Etat. Des échanges de tirs se sont poursuivis hier par intermittence à Al-Hassaba, un quartier du nord de Sanaa, secoué pour la cinquième nuit consécutive par de violents accrochages aux obus et aux roquettes. Des habitants, effrayés par la persistance des violences, continuent à fuir Al-Hassaba, où se trouve la résidence de cheikh Sadek al-Ahmar. A Taëz, située à 270 km au sud-ouest de Sanaa, des accrochages ont opposé des militaires à des hommes armés qui assuraient la protection de centaines de protestataires rassemblés sur la place de la Liberté. L'opposition parlementaire a exhorté les pays frères et la communauté internationale à agir d'urgence pour «sauver le Yémen et son peuple du risque de sombrer dans la guerre civile.» Les violences au Yémen ont conduit certains pays à prendre des dispositions. L'Allemagne a fermé son ambassade et l'Union européenne a commencé à coordonner l'évacuation des citoyens de ses pays membres. Coté défection, hier c'était également une journée particulière. Le commandant de la 33e division blindée de l'armée yéménite, le général Jebrane Yahia al-Hachedi, a annoncé son ralliement au mouvement de contestation contre le président Saleh. La 33e division est en charge d'une vaste région du sud-ouest du Yémen incluant Bab al-Mandeb, un détroit stratégique à l'entrée de la mer Rouge et un lien important entre l'océan Indien et la mer Rouge, notamment pour le passage des pétroliers. Le général Hachedi a annoncé sa défection après avoir rappelé, -sous la pression d'un groupe de ses officiers et soldats-, des troupes envoyées ces deux derniers jours dans le centre de Taëz pour réprimer des protestations hostiles au régime. Les officiers et les soldats auraient proclamé leur refus d'obtempérer aux ordres leur demandant de tirer sur les protestataires à Taëz, où un sit-in de protestation sur la Place de la Liberté avait été démantelé le 29 mai par la force au prix de plus de 50 morts. M. B./agences