Photo : M. Hacène Par Wafia Sifouane Pour le dernier jour de la compétition du 6ème festival national de théâtre professionnel, qui aura duré deux semaines, le théâtre régional de Skikda a clôturé l'édition 2011 avec la présentation de sa dernière production, Aam lahbel (l'année de la corde).La représentation a drainé une foule impressionnante de spectateurs. Adaptée du roman de Mustapha Netour et mise en scène par Djamel Marir, la pièce est une célébration du patrimoine oral à travers une remise au goût du jour de la halqa et du goual, cher au défunt Abdelkader Aloulla.Le rideau se lève et une envoûtante odeur d'encens baigne la salle. La comédienne sur scène tient un encensoir d'où s'élèvent les volutes du «jaoui et b'khour». Elle est venue louer le grand saint Sidi Achour et demander sa bénédiction. Treize comédiens vêtus de tenues traditionnelles des Aïssaoua font leur apparition et forment un cercle autour du chanteur, le goual. Des bendirs à la main, les comédiens font vibrer leurs instruments de percussions accompagnant les déclamations du goual qui a hérité de ce métier de ses ancêtres. Et c'est avec fierté et conviction qu'il s'efforce d'assurer sa mission à la perfection : distraire, informer et sensibiliser le peuple. La scénographie, signée Abderrahmane Zaaboubi, elle, est faite d'un grand grillage qui encercle les comédiens sur lequel sont accrochés les bendirs. Au pied de ce grillage une sorte d'estrade sur laquelle les comédiens se déplaceront. Nous sommes en plein Aam lahbel, une année où la misère règne dans le pays sous protectorat ottoman. Les récoltes sont maigres et l'argent rare. El goual entame son récit face à une assistance qu'il captive.Mais à trop vouloir charmer, le comédien surjoue son rôle, ce qui nous fait penser à une pâle imitation de Alloula. Les danseurs tentent tant bien que mal de maintenir le rythme de la percussion. Difficile pari pour des personnes qui maîtrisent moyennement l'instrument. Le rythme en prendra un coup à plusieurs reprises. La pièce est également riche en tableaux chorégraphiques conçus par Slimane Habess. Le chorégraphe, gardant l'aspect rituel de la circumambulation des aïssaouas, a apporté une touche de modernité. Manquant de pratique, les treize comédiens ont eu du mal à effectuer leurs pas de danse. Beaucoup plus comédiens que danseurs, ils arrivaient tout juste à éviter de se marcher sur les pieds. Pour mettre toutes les chances de son coté, le metteur en scène innove en intégrant une fille déguisée en homme dans la ronde des danseurs. Clin d'œil à la modernité, bousculement de la tradition (les femmes ne sont pas admises dans les danses rituelles des aïssaouas) ? Optant pour la facilité avec une pièce folklorique destinée au grand public, le TRS a sorti le grand jeu et cela en se focalisant sur la revalorisation du patrimoine et son exploitation par le 4ème art, avec quelques petites touches de «modernité». On notera qu'avec cette représentation qui suggère en filigrane un hommage à Alloula, le théâtre régional de Skikda a, en fait, mit toutes les chances de son côté pour enlever un prix et cela au détriment de la qualité qui était tout juste moyenne.