Propos recueillis par Bahia Aliouche M. Abdennour Nouiri, docteur en économie, maître de conférences à l'Ecole des hautes études commerciales (EHEC) d'Alger (ex- INC), directeur du laboratoire Marketing & TIC et ex-sous-directeur auprès du ministère du Commerce, évalue dans cet entretien les premières assises nationales du commerce. Il met aussi l'accent sur l'importance d'ouvrir le dialogue avec le monde universitaire et l'investissement dans la ressource humaine, en vue d'améliorer la performance du secteur du commerce. Comment évaluez-vous les travaux des premières assises nationales du commerce ? Bien que cette initiative ait, exagérément, tardé, elle a, néanmoins, permis aux participants – représentants de différents ministères, d'organismes à caractère socioéconomique, d'organisations patronales, universitaires, etc. – de dégager une vision nationale globale, en vue d'améliorer la performance du secteur du commerce, dans le contexte des réformes économiques engagées par l'Algérie. Le point marquant de cette rencontre est l'invitation des universitaires au dialogue. D'ailleurs, après mon intervention lors de laquelle j'ai proposé de jeter les ponts entre le ministère du Commerce et les universités pour lutter contre différents fléaux commerciaux, M. Mustapha Benbada s'est montré favorable quant à une collaboration avec notre établissement, en l'occurrence l'EHEC d'Alger. Cette collaboration permettrait à nos experts d'éclairer les décideurs du pays sur diverses questions d'ordre commercial. Quel serait l'apport de l'EHEC dans ce cadre ? L'EHEC dispose des cadres de haut niveau et d'enseignants formés à l'étranger. Ces cadres, vu leurs compétences, auraient pu, valablement, être impliqués dans différentes discussions sur, à titre d'exemple, l'adhésion de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). De ce fait, il est aujourd'hui grand temps de faire basculer l'université dans le monde économique.
Quelles sont les insuffisances constatées dans le secteur du commerce national ? En Algérie, la formation dans le commerce fait défaut. D'après mes recherches universitaires dans ce domaine, j'ai constaté l'absence de formation dans, entre autres, la grande distribution. Autrement dit, aucun institut national de l'enseignement supérieur, public ou privé, ne propose des formations dans la gestion de grands espaces commerciaux. Cela a induit des retards dans le développement de plusieurs aspects commerciaux, tels le marchand design, la franchise, le commerce électronique, la vente par correspondance, etc. Avec l'avènement des assises nationales du commerce, les décideurs doivent accélérer leurs démarches dans la gestion des ressources humaines, la formation et le recyclage, et ce, dans l'optique de relancer ce secteur et de contrecarrer le commerce informel qui a gagné du terrain. Si nous donnons de l'importance à l'aspect formation, le marché informel va, certainement, reculer pour peu qu'il y ait une volonté politique. Justement, selon des informations émanant du ministère du Commerce, il est prévu la création d'un centre de formation au profit des cadres du secteur. Qu'en pensez-vous ? C'est une excellente initiative. Mais, en attendant que le ministère ait sa propre institution de formation, l'Ecole des hautes études commerciales d'Alger est disposée à lancer des cycles de formation et des opérations de recyclage au profit des cadres du ministère du Commerce et ceux des directions du commerce de différentes wilayas. Je vous signale qu'en Algérie il n'existe que deux grandes écoles spécialisées dans le commerce, en l'occurrence l'Ecole supérieure de commerce (ESC) et l'Ecole des hautes études commerciales (EHEC) d'Alger. De ce fait, la création d'autres grandes écoles est plus que nécessaire. En France, chaque ville possède une grande école de commerce. Aujourd'hui, les différentes chambres de commerce du pays doivent disposer de leurs propres écoles de formation. Qu'attendez-vous des résolutions des premières assises nationales du commerce ? Après la tenue de cette première rencontre, faisant ressortir une centaine de recommandations, nous espérons que ces dernières seront mises en application dans les plus brefs délais. Je tiens à féliciter, dans ce cadre, la décision du ministre relative à l'installation future d'une commission de suivi de l'application des recommandations issues de ces assises. Nous espérons, aussi, que cette rencontre sera suivie d'une manière régulière – tous les deux ou trois ans – d'autres assises, en faisant participer des gens d'horizons divers. Cependant, la lutte contre le commerce parallèle est la grande bataille que doit mener le ministère du Commerce. Nous aurons beau former et recycler nos ressources humaines pour le développement du commerce national, mais si l'informel continue à se propager, il va freiner le développement du commerce légal. Il empêchera, également, les investisseurs étrangers de venir en Algérie pour lancer des projets dans la grande distribution, pour cause de concurrence déloyale.