Le Conseil militaire suprême (YAS) a débuté hier une réunion qui va durer quatre jours pour l'examen annuel de l'évolution des carrières au sein de l'armée turque, qui semble perdre de plus en plus d'influence devant le gouvernement islamo-conservateur du Parti de la justice et du développement (AKP) du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan. Cette réunion intervient après moins d'une semaine de la démission collective du chef d'état-major de l'armée et des hauts cadres de l'armée de terre, de la marine et de l'aviation. Neuf sur les quatorze généraux membres du YAS ont assisté aux travaux de la première journée de réunion du Conseil, ont rapporté les médias turcs. Le conflit autour de la promotion de certains officiers de l'armée turque, actuellement en prison en raison de leur présumée implication dans un complot qui aurait visé le gouvernement de l'AKP en 2010, était à l'origine de cette défection du général Isik Kosaner, remplacé vendredi soir par le général et ex-chef de la gendarmerie, Necdet Özel, via un décret du Premier ministre et du président de la République Abdullah Gül. M. Özel devrait être nommé officiellement à la tête de l'état-major de l'armée turque à la clôture de la réunion du YAS qui, parallèlement, doit rendre publique la liste des nouvelles promotions. Les militaires démissionnaires avaient exigé que les officiers incarcérés depuis février 2010 soient inclus dans la liste des militaires à bénéficier d'une promotion même s'ils sont actuellement en prison et tant que leur procès n'a pas encore eu lieu. Ce que le Premier ministre avait catégoriquement refusé, entraînant ainsi son gouvernement dans un véritable bras de fer avec cette institution qui se dit être garante de la laïcité en Turquie et de la démocratie. L'armée turque, à l'origine de trois putschs depuis 1960, dont le dernier remonte à 1997 contre l'ancien gouvernement dominé par des islamistes, a été accusée par l'AKP de chercher à l'évincer du pouvoir. Plus de 120 personnes des membres de cette puissante institution ont ainsi été arrêtées et incarcérées. Vendredi dernier, 22 officiers et sous-officiers ont été inculpés par le procureur enquêtant sur cette affaire de complot contre le gouvernement et de tentative de putsch. La liste des chefs d'inculpation reste encore longue. Au total, plus de 40 généraux d'active, soit un dixième du commandement militaire turc, sont en détention, accusés d'être impliqués dans des complots visant l'AKP, ont rapporté les médias turcs. Malgré cette tension, le président Abdullah Gül, également commandant suprême des forces armées turques, et le gouvernement de l'AKP assurent qu'il n'y a aucune crise au sommet de l'Etat. Toutefois, il faudra encore attendre la fin du conseil du YAS pour voir le peuple turc rassuré. L. M.