Après Tripoli, Ouagadougou, et bientôt Le Caire, l'exposition itinérante de photographies et de créations «Visionary Africa : art at work» fait halte au siège de l'Union Africaine (UA).C'est dans un pavillon en bois, situé au cœur même du siège de l'Union Africaine et conçu spécialement pour l'occasion, qu'on peut visiter une série de photographies exceptionnelles et de créations artistiques dans le cadre de cette exposition. Construite à chaque fois in situ et avec du bois local, la structure, conçue par l'architecte ghanéen David Adjaye, est ensuite confiée à une organisation locale pour permettre à des artistes du pays d'y exposer leurs œuvres et de se l'approprier. Le Président de la Commission de l'UA, Jean Ping, et l'ambassadeur de l'Union Européenne (UE) auprès de l'UA, Gary Quince, ont tous deux soulignés le lien profond existant entre l'art et la politique. Nombreuses sont d'ailleurs les œuvres de cette exposition qui viennent soutenir leurs propos.Les œuvres de cette exposition itinérante, organisée par l'Union Européenne, avec la participation de l'Union Africaine, sont le fruit d'une étroite collaboration entre des institutions culturelles européennes et africaines (Palais des Beaux Arts de Bruxelles et huit centres d'art africains).«Visionary Africa : art at work» propose un nouveau regard sur la création africaine et offre ainsi un espace de dialogue avec un public large et diversifié dans les places publiques de centres urbains africains.Lors de son discours d'inauguration, le Dr Jean Ping a déclaré : «Après les étapes de Tripoli et d'Ouagadougou donc, l'Union africaine qui représente toute l'Afrique est heureuse de recevoir pour quelques jours, cette exposition itinérante qui non seulement témoigne de la vitalité du partenariat entre l'Afrique et l'Europe mais aussi permet de prendre la mesure du foisonnement créatif de la photographie africaine s'affirmant aujourd'hui sur la scène mondiale.» «Ce projet a été conçu pour marquer d'une part le 50ème anniversaire d'une vingtaine de pays africains mais aussi pour souligner la richesse des créateurs africains et la nécessité de prendre en compte la culture comme facteur de développement», a expliqué Gary Quince.Cette exposition se veut une vraie caravane symbolique, parcourant les différentes capitales du continent africain pour mobiliser les esprits créatifs des villes visitées et pour contribuer à donner un nouveau visage aux pays ; un visage qui corresponde à leurs racines et qui regarde vers un futur porteur d'une prospérité partagée, renchérira un responsable européen.L'idée de ce projet a été conçue à l'occasion du colloque international «Culture et création : facteurs de développement», organisé par la Commission européenne en avril 2009, et a été endossée et développée dans le cadre du partenariat Afrique-UE. Lancée en décembre 2010 au sommet Afrique-UE de Tripoli, l'exposition a déjà fait une halte à Ouagadougou en mars 2011. Dans quelques jours, elle repartira pour le Caire, puis dans deux autres capitales africaines.Ce projet a pour objectif de souligner l'importance de la culture et de la créativité comme outil de développement, et s'inscrit directement dans le prolongement de la Déclaration de Bruxelles des professionnels de la culture des pays ACP et de l'UE. Il comprend : une exposition urbaine itinérante de pratiques artistiques africaines contemporaines ; des résidences d'artistes en provenance d'un autre pays africain ;des ateliers de discussion sur l'interaction entre l'art et le développement de centres urbains en Afrique, et des projections digitales dans différents quartiers de la ville.L'exposition présente un voyage à travers «le passé, le présent et le futur de l'Afrique indépendante», conçu par le Co commissaire de l'exposition, Simon Ndjami (Cameroun). Le passé récent de 50 ans d'indépendance est vu à travers les yeux d'artistes de toutes les régions d'Afrique, comme Bob Gosani, Ricardo Rangel, Malick Sidibe, Jean Depara, Samuel Fosso, Philippe Koudjina, Mohamed Amin, Santu Mofokeng, Akinbode Akinbiyi, Jodi Bieber, Pierrot Men, Zwelethu Mthethwa, Zineb Sedira, Tracey Derrick, Andrew Tshabangu, Aïda Muluneh, Eileen Perrier, Myriam Abdelazziz, Musa Nsumalo, Lolo Veloko. Le présent des villes africaines est symbolisé par les photographies de voyage prises dans les 72 capitales d'Afrique par David Adjaye. Le futur est représenté par les œuvres des différents artistes contemporains. Le projet présenté à Tripoli poursuit un débat entre Europe et Afrique à propos du futur développement des sociétés et de villes africaines commencé dans l'été 2010 au Palais des Beaux Arts de Bruxelles avec le programme «Visionary Africa : Geographics/Un rêve utile». Ainsi, le voyage de «Visionary Africa : art at work» entre les différentes capitales africaines a pour objectif l'initiation d'un débat sur tout le continent à propos de l'interaction de l'art et de la culture avec le développement des villes et des sociétés de l'Afrique du future prochain. Dans chaque ville visitée par l'exposition un atelier est organisé à la fin de l'exposition, dans le cadre duquel sera aussi présentée l'œuvre originale crée par un grand artiste africain à la fin de sa période de résidence dans la ville. Des séries des projections digitales et d'animations dans les différents quartiers de la ville complètent le menu de ce projet multidisciplinaire.Commentant l'exposition, M. Ping dira qu'«à travers leurs œuvres exposées, les photographes africains ont voulu décliné le monde et la vie, chacun à sa façon, au gré de sa sensibilité et selon sa perception de l'art, rappelant la richesse des créateurs et artistes du continent. Dans cette exposition qui présente des pans de vie, j'allais dire une fresque de vie, l'on trouve de tout : de l'ambiance, des couleurs, des époques, de l'émotion, de l'humour, des sentiments, des paysages, des souvenirs, des expressions, des attitudes, de l'instantané, du permanent… Ce qui confirme encore que pour nous Africains, l'art est connaissance et explication du monde […]. La Charte de la Renaissance culturelle africaine rappelle à juste titre que ‘‘la culture doit être perçue comme un ensemble de caractéristiques linguistiques, spirituelles, matérielles, intellectuelles et émotionnelles de la société ou d'un groupe social'' et qu'elle englobe ‘‘outre l'art et la littérature, les modes de vie, les manières de vivre ensemble, les systèmes de valeur, les traditions et les croyances.'' La culture est donc un facteur de développement […]. L'Afrique, berceau de l'humanité, creuset de la civilisation et de la sagesse universelle, ce que nous appellerons ‘‘la primogéniture culturelle'', lutte afin de revitaliser ses valeurs communes, son identité et ses richesses culturelles et d'encourager les populations ainsi que leurs dirigeants à s'engager pour la bonne gouvernance, le patriotisme, la justice sociale et le progrès […]. C'est donc tout naturellement que l'Union Africaine a accepté d'accueillir au cœur même de son siège ici à Addis Abéba, Visionary Africa : Art at Work qui exprime le même engagement, la même conception de la culture, lui reconnaissant une portée politique et sociale […]. L'originalité du concept de cette exposition itinérante réside dans sa vocation à s'adresser aux masses, au peuple. Elle s'inscrit dans une réflexion sur les stratégies qui mettent l'art à la portée de tous. Le but est d'aller vers les populations pour leur rendre l'art accessible, en dehors des sphères de consécration traditionnelles comme les musées et les biennales, vases clos habituellement réservés à une certaine élite socioculturelle locale. Ce faisant, Visionary Africa tente aussi de s'adapter à la fois aux diverses réalités urbaines des villes qui jalonnent son itinéraire qu'aux réactions suscitées par la transformation temporaire du paysage de ses escales».A bien y regarder, l'œuvre artistique en général et la photo en particulier, peuvent être des messagers porteurs du rêve d'une société et/ou des drames dans lesquels elle se débat. Ne dit-on pas qu'une photo vaut mille mots ? R. C.