Au moment où des spécialistes d'universités algériennes et étrangères multiplient les recherches et les rencontres sur le phénomène du dépérissement du cèdre de l'Atlas, la cédraie du parc national de Belezma (7 km à l'ouest de Batna) abrite des sujets bien portant poussant sur des dalles rocheuses.Ce sont, en effet, pas moins de 50 ha de cèdres sur dalles qui ont été recensés sur le versant nord du massif de Belezma, au cœur du parc national éponyme qui couvre une aire protégée de 26 000 ha abritant une biodiversité végétale et faunistique importante ainsi qu'une vaste cédraie, alternée par des chênes verts.Selon un cadre forestier familier de la région, le phénomène des cèdres sur dalles est inexistant sur le versant sud qui fait face directement à l'ensoleillement et à l'aridité. Les cèdres sur dalles poussent, explique-t-il, sur des fissures de la roche, à la faveur d'une faible densité qui favorise leur croissance sans concurrence d'autres espèces végétales.Les dalles rocheuses du versant nord, souvent ombragées, constituent dans cette région semi- aride, qui reçoit moins de 300 mm de précipitations, une réserve hydrique qui nourrit une population de cèdres allant jusqu'à 200 plants par hectare, ajoute ce spécialiste qui estime que cette «cédraie spécifique dans la cédraie», mérite une protection particulière, pour l'enseignement que peuvent en tirer les chercheurs dans le domaine de la régénération.Mais les cèdres sur dalles ne constituent pas seulement une curiosité scientifique, car sur les sommets du Chlaâlaà qui culminent à 1800 m, le visiteur est saisi par la beauté majestueuse de cette noble espèce qu'est le cèdre de l'Atlas, représentant ici un symbole aussi mythique que le cèdre du Liban ou la feuille d'érable du drapeau du Canada.Ce phénomène rare apparaît comme un miracle dans cette région-carrefour qui fait face à la Méditerranée, au nord, et au Sahara au sud, et où se côtoient étonnamment le palmier et le cèdre de l'Atlas, un contraste inattendu que l'on ne retrouve ni dans la cédraie de Theniet El Had (Tissemsilt) ni dans celle de Chréa (Blida) encore moins dans le Djurdjura (Tizi Ouzou).Selon M. Mohand Messaoudène, de l'Institut national de recherche forestière (INRF) d'Alger, le socle rocheuxn, qui s'étale à l'abri de l'aridité du versant opposé, offre aux graines de cèdre un incubateur idéal assurant une survie inattendue de cette espèce, défiant ainsi la proximité du plus grand désert du monde.Le parc national de Belezma avait récemment organisé une journée d'étude sur terrain qui avait regroupé des représentants des autres parcs nationaux abritant le cèdre, (Blida, Tissemsilt,Tizi Ouzou), des chercheurs de l'université de Batna et des cadres de plusieurs Conservations des forêts. Ils ont considéré que les cèdres sur dalles permettent à cette espèce de résister aux pics de sécheresse qui affectent le versant le sud, de vastes superficies de la cédraie de Belezma, comme ailleurs dans le massif des Aurès, tel le mont Chélia, à l'est de Batna. Les forestiers et les chercheurs s'efforcent de sauver cette espèce menacée par les changements climatiques mais également agressée par les incendies et les coupes illicites effectuées par l'homme, car la présence du cèdre dans les Aurès remonte à au moins trois siècles avant Jésus-Christ, puisque les archéologues ont établi que le mausolée d'Imedghassen a été construit avec des charpentes en bois de cèdre de provenance locale.La direction du parc national de Belezma a entrepris, depuis 2008, d'effectuer des travaux d'entretien forestier sur une cédraie de 7000 ha pour favoriser sa régénération, en débarrassant la forêt des troncs morts qui couvrent de 40 à 100 % des bois dans les monts de Bourdjem et Boumerzoug notamment. Depuis 2006, cet inquiétant phénomène de dépérissement a fait l'objet de multiples rencontres et colloques scientifiques animés par des chercheurs algériens et étrangers, parmi lesquels d'éminents spécialistes comme le professeur Ramzy Touchène, spécialiste en dendrologie qui avait établi, avec l'équipe de son laboratoire, que le phénomène du dépérissement est lié aux changements climatiques enregistrés entre 1998 et 2002. Un phénomène qui a affecté l'ensemble du bassin méditerranéen, donnant lieu à des taux de dépérissement pouvant atteindre jusqu'à 60 %. Le directeur du parc national de Belezma, M. Abderrahmani, considère que l'espoir de «revoir la cédraie sous son meilleur jour est permis», les expériences de régénération peuvent être concluantes avec la mise en place de pépinières «in situ» et un nettoyage soutenu des forêts qui doivent être débarrassées des sujets morts, destinés à l'industrie du bois d'industrie. Le professeur Ramzy Touchène, de l'université de l'Arizona (USA), avait évoqué, le 13 décembre dernier à l'occasion d'un colloque international organisé par l'université de Batna, la mise en place dans la capitale des Aurès, d'une annexe du laboratoire de l'université d'Arizona, pour approfondir les études sur le cèdre, en formant des cadres algériens spécialisés et en lançant une coopération dans ce domaine, avec les pays du bassin méditerranéen. APS