BATNA - Des forestiers et des chercheurs ont appelé mercredi lors du séminaire international sur le cèdre de l'Atlas, ouvert mardi à Batna à la consolidation de la politique de développement rural, "facteur décisif dans la protection du patrimoine sylvicole et l'élimination des causes humaines du dépérissement des espèces protégée comme le cèdre de l'Atlas". Les participants à cette rencontre initiée dans l'enceinte de l'université Hadj Lakhdar par l'Institut des sciences vétérinaires et des sciences agronomiques, ont organisé, mercredi, une sortie de terrain au parc national de Belezma où ils ont pu observer et discuter de plusieurs aspects scientifiques du phénomène du dépérissement du cèdre qui a frappé cette espèce sylvicole de 1999 à 2002 dans les cédraies de plusieurs pays du pourtour méditerranéen, en raison du réchauffement climatique, ainsi que l'attestent les spécialistes. Les chercheurs réunis à Batna avaient exposé, mardi, de nombreuses études qui ont mis en évidence les liens entre les changements climatiques qui touchent la planète et le dépérissement massif du cèdre, considérant qu'il s'agit de la principale cause de la régression des cédraies. Dans ce contexte, le professeur Ramzy Touchan de l'université d'Arizona (Etats-Unis) a apporté sa contribution pour confirmer les effets du climat sur l'état du milieu forestier, attestés par des études scientifiques et des observations des variations climatiques portant sur des siècles, en Afrique du Nord. Il n'en demeure pas moins que les causes humaines aggravent considérablement le dépérissement du cèdre (et des autres espèces sylvicoles), comme l'ont constaté les séminaristes dans l'enceinte du parc national de Belezma. Incendies, surpâturages et pacages incontrôlés, coupes illicites prouvent la "main de l'homme". Dans le "canton de Tuggurt", à l'intérieur du parc national de Belezma, des coupes sanitaires ont porté sur 6.000 ha pour produire du bois d'œuvre, du bois d'industrie et du bois de chauffage, cédé à des industriels privés. Ce travail d'assainissement a permis à une cédraie considérablement dégradée, de retrouver un aspect verdoyant, à la faveur d'une régénération amorcée à partir de 2005. Les spécialistes, universitaires, forestiers et chercheurs, ont considéré que la coopération étroite entre les universitaires et l'administration forestière, devient une "nécessité vitale" pour améliorer la situation du patrimoine forestier, notamment en optant pour les techniques les plus efficientes en matière de reboisement et de régénération (pépinières volantes produisant des espèces locales adaptées, protection continue). La présence effective de gardes et d'agents de l'administration dans les domaines forestiers doit être permanente et porter sur la surveillance, la répression des coupes illicites, l'interdiction des pacages et l'observation du milieu, ont convenu les différents intervenants. Les forestiers ont également considéré que le développement rural apporte une "contribution irremplaçable" à la protection du milieu forestier, par le repeuplement des zones rurales désertées. A ce titre, une expérience a été lancée avec succès à Tifrane, dans la commune de Séfiane, au profit de 54 ménages ruraux, a indiqué Aissa Labed, ancien directeur du parc national de Belezma et directeur du bureau d'étude Eurl Labcedrus, chargé de l'étude de ce programme. Selon cet intervenant, la réussite de ce programme est "avant tout le fait de l'organisation en association de cette communauté qui a bénéficié d'importants investissements portant sur la construction de trois km de pistes, la réalisation de trois km de seguias, l'électrification rurale et un forage de 13 litres par seconde". Une enveloppe complémentaire a été attribuée à ce programme par le wali de Batna, à titre d'encouragement, a-t-on également appris de même source. Renforcer la relation chercheurs-gestionnaires pour sauver le cèdre en Algérie BATNA - Les participants au séminaire international sur la cédraie des Aurès, clôturé mercredi à l'université de Batna, ont insisté sur le renforcement de la relation chercheurs-gestionnaires pour sauver le cèdre de l'Atlas en Algérie, notamment dans la région des Aurès. Ce patrimoine naturel menacé de disparition par le problème du dépérissement "interpelle l'ensemble de la société et non pas seulement les forestiers et les universitaires", a-t-on indiqué dans les recommandations émises par les participants qui préconisent une "intervention des décideurs locaux et nationaux pour encourager les chercheurs et mettre tous les moyens à leur disposition pour mieux comprendre et tenter d'endiguer ce phénomène". Les conclusions du laboratoire de l'université d'Arizona (Etats-Unis) où ont été étudiés, en 2006, des troncs de cèdres coupés, signalent que 62% des cas de dépérissement constatés dans la cédraie des Aurès sont "concomitantes à des périodes de sécheresse", selon le Pr. Ramzy Touchan, expert au sein de ce laboratoire. La seconde journée de la rencontre a donné lieu à une sortie de terrain vers le parc national de Belezma notamment les localités de Barjam, Talmat (1.800 mètres d'altitude), ainsi que de Boumerzoug où la cédraie a totalement dépéri. Saïd Abderahmani, directeur du parc national de Belezma, a noté que les actions de nettoyage de la cédraie ont permis de recueillir 20.000 m3 de bois en dépit du relief accidenté et de la hauteur de certains arbres dépéris qui dépassent les 30 mètres avec jusqu'à 1,5 mètres de diamètre. Des tentatives de régénération de cédraies mortes ont été également engagées parallèlement à la mise en défens de ces espaces, a affirmé le même spécialiste. Lors des visites aux trois sites, les spécialistes ont relevé que la sécheresse de la période 1998 à 2002 a été la plus dévastatrice pour le cèdre de l'Atlas de la région. Selon Mohand Messaoudène, de la station de Tizi-Ouzou rattachée à l'Institut des recherches forestières d'Alger, la pluviométrie de la région des Aurès entre 1970 et 2005 a chuté de 25% par rapport à la période située entre 1913 et 1939, alors que les températures se sont accrues. De jeunes plants de frênes ont été aperçus sur les sites des vieilles cédraies dépéries de la région, phénomène qui, de l'avis du Pr. Touchan, pourrait signifier qu'une nouvelle société florale est en train de réoccuper l'espace traditionnel du cèdre de l'Atlas sous l'effet des importants changements climatiques qu'a connus la région. Cette rencontre internationale a été organisée par l'institut des sciences vétérinaires et d'agronomie de l'université Hadj Lakhdar de Batna.