Il a apporté comme une fraîcheur printanière lors d'un chaud soir d'été. Normal, il est né au printemps 1988, un 29 avril. Vingt-quatre ans plus tard, il devient champion olympique à Londres. Un fabuleux destin pour un gars qui a bravé tant de difficultés. Un parcours de combattant, de gagneur et une consécration des plus méritées. Il la doit à lui-même mais surtout à son nouvel entraîneur qui lui a tant apporté depuis qu'ils collaborent ensemble. Souleymane Jama Aden, un sorcier somalien qui transforme tout ce qu'il touche en or. Les rêves commencent étant petit, ils grandissent avec nous. Certains perdurent, d'autres se brisent. Ceux qui croient en leur bonne étoile et ne la quittent pas des yeux jusqu'à la tutoyer un jour. Que le rêve prenne forme, devienne réalité. Taoufik Makhloufi a atteint le septième ciel. Un diamant brut parmi tant d'autres. D'autres qui ont rendu les armes pour perdre petit à petit de leur éclat dans une mine à talents mal exploités. L'histoire d'amour ne fait que commencer. Des liens qui se sont tissés à 15 ans avec sa discipline fétiche, le demi-fond. A 15 ans, quelque part dans cette ville de l'est algérien, le prodige a tapé dans l'œil d'Ali Redjimi, celui qui deviendra son coach dans la section de Souk Ahras de la Protection civile pour les 6 années où il commencera à grandir. Le tout premier podium survient en 2006 à l'occasion des jeux scolaires arabes où il décroche la médaille de bronze, c'était à Alger. Où il restera après avoir répondu favorablement aux sollicitations du Groupe sportif pétrolier qui le courtisait, il passe sous la houlette de Amar Brahmia. Le club algérois, considéré comme le meilleur en matière de moyens financiers et encadrement technique, permettra à Makhloufi de récolter les premiers fruits, en devenant champion d'Algérie sur ses deux distances fétiches, le 1 500 m et 800m à 5 reprises consécutives. Une domination territoriale qui s'étend ensuite sur le continent africain où il remporte la médaille d'or, sur 800 m cette fois, à Maputo. Lors de cette course, il s'est payé le luxe de reléguer les deux Kenyans Boaz Lalang et David Mutua au second et troisième rangs. Pour le 1 500m, il se contentera d'une médaille de bronze. Se rendant compte de la difficulté des échéances à venir et de tout ce que les compétitions de haut niveau requièrent comme préparation, il décide de s'engager avec celui qui purifiera ce diamant pour lui donner tout son éclat. Peu de gens le connaissent. Un cadeau tombé du ciel. Un homme qui n'a pas tardé à marquer de son empreinte la carrière très prometteuse du natif de Souk Ahras en lui donnant une autre dimension. Enigmatique ? Pas vraiment ! Souleymane Jama Aden s'est déjà fait un nom parmi le gotha de l'athlétisme mondial. Coureur de demi-fond lui aussi, il s'est reconverti en entraîneur. Une reconversion qui lui réussit plutôt bien, très bien même puisqu'en 2008 il est récompensé par l'Iaaf comme étant l'entraîneur de l'année de la course du demi-fond. Le Somalien est, entre autres, l'entraîneur des coureurs qataris du demi-fond. Sous ses ordres, on retrouve Abubakr Kaki Khamis, qui est devenu champion du monde en salle du 800 m en 2008 et en 2010, ou Ismail Ahmed Ismail, médaillé d'argent au 800 m des jeux olympiques de Pékin, le cadet Hamza Driouch du qatar, médaillé d'argent du 1 000 m aux Jeux Olympiques de la jeunesse à Singapour, et son compatriote le junior Mohamed Al-Garni médaillé de bronze du 1 500 m au Championnat du monde junior de Moncton. Les performances de ses poulains lui ont valu une autre distinction, celle du meilleur entraîneur du monde arabe. La collaboration avec l'Algérien était sans doute une étape importante pour son nouveau «chouchou» depuis le mois de janvier. Comme un signe, il monte, quelques mois après, sur la plus haute marche du podium à Porto-Novo (Bénin) lors du 18e Championnat d'Afrique d'athlétisme. Décidément, l'Algérien s'est depuis attaché à cette première place et a tout fait pour la retrouver, la garder. Une préparation d'avant JO entre l'Ethiopie, berceau des coureurs de fond, et la Suède et un chrono de 3 min 30s80 signé à Monaco, le 20 juillet 2012 pour annoncer la couleur. Deux semaines après, il a rendez-vous sur le podium de l'Olympe et le plus beau, le plus prisé des trophées, une médaille dans le plus pur des métaux précieux, pour une nouvelle merveille de l'athlétisme algérien. Pas la première et sans doute pas la dernière fois. En trois tours et demi, la bague de Souleymane Jama Aden a changé la vie de Makhloufi qui passe de l'anonymat total à la gloire de l'Olympe. Une nouvelle étoile est née pour éclairer le ciel de l'athlétisme mondial. Un nom à retenir. Merci d'avoir rendu le sourire au sport algérien. À l'Algérie.