Dix huit mois après un raid meurtrier à Port-Soudan, Israël récidive en bombardant une usine militaire à Khartoum, faisant deux morts et des dégâts importants. Un acte d'agression qui étrangement n'a pas suscité des réactions de la part de capitales d'habitude promptes à réagir au quart de tour lorsque le Hamas fait éclater un pétard dans le ciel. L'attaque a provoqué une série d'explosions, suivies d'un incendie à l'usine militaire de Yarmouk, dans le sud de la capitale soudanaise. Des preuves pointant un habitué, Israël, ont été découvertes parmi les restes des explosifs. L'usine de Yarmouk fabrique des «armes traditionnelles» selon Khartoum, qui confirmera que «l'attaque a détruit une partie de l'infrastructure du complexe, tuant et blessant grièvement plusieurs personnes». L'attaque est un véritable acte de guerre qui pourrait embraser une région déjà pas mal secouée. D'ailleurs Khartoum a dit se réserver le droit de riposter en lieu et date de son choix. A l'ONU, l'ambassadeur soudanais, Ali Osman, a demandé au Conseil de sécurité de condamner Israël, un Etat coutumier des agressions visant ses voisins et ce dans l'impunité. Un appel qui restera sans nul doute sans suite, l'Etat hébreu jouissant d'un statut spécial dans les relations internationales. En fait ce n'est pas la première fois que le Soudan subit les actes de guerre de l'aviation israélienne. En avril 2011, le Soudan a déjà fait l'objet d'une agression de l'aviation de l'Etat hébreu contre un véhicule, qui a fait deux morts, à Port-Soudan. Un raid similaire avait été mené sur un convoi d'armes, dans l'est du Soudan, en janvier 2009. Toujours dans l'indifférence générale, malgré les preuves irréfutables de l'implication d'Israël. L'Etat hébreu, qui occupe toujours illégalement des terres, semble suivre son protecteur américain en se permettant d'agresser des Etats souverains sans risquer un contrecoup. En août 1998 les Etats-Unis avaient attaqué à l'aide de missiles l'usine pharmaceutique Al-Chifa, dans le nord de Khartoum, qui, selon Washington, était liée à la production d'armes chimiques. Les allégations américaines n'ont jamais été prouvées. En 2008 Israël a également effectué un raid contre une présumée usine nucléaire en Syrie. Un véritable acte de guerre qui n'a pas provoqué l'indignation, décidément trop sélective, des puissances. C'est que ce genre d'opération, relevant du terrorisme d'Etat, est entouré de précautions particulières et n'est généralement pas revendiqué ou seulement du bout des lèvres. Pour l'attaque de mardi passé, des images satellites du site militaire soudanais, qui a pris feu, suggèrent que l'explosion est bien liée à une frappe aérienne, rapporte le journal britannique The Guardian. Les images satellitaires diffusées par l'association Satellite Sentinel Project indiquent que Yarmouk comprend une installation de stockage de pétrole, un dépôt militaire et une usine de munitions. Les images publiées montrent également de larges cratères près de l'épicentre de l'explosion. Pour les spécialiste il ne fait aucun doute, les impacts étaient compatibles avec des cratères résultat d'une frappe aérienne. Le complexe Yarmouk, ouvert en 1996, est l'un des plus importants du Soudan, selon les informations de The Guardian. Israël, sachant le Soudan dans une situation internationale difficile, se permet un acte agressif sans risquer une réaction. Le Soudan est soumis depuis des années à des pressions occidentales intenables dont Israël est loin d'être neutre. Après la crise liée au Darfour, le Soudan a subi la scission sur le plan territorial. Israël a soutenu longuement en sous main la partie indépendantiste et entamé promptement des relations officielles avec le Soudan du Sud. Immédiatement après avoir noué des relations diplomatiques, le président sud soudanais, Salva Kiir, a effectué une visite officielle en Israël. Cette première visite du chef du nouvel Etat a été qualifiée d'«historique». Pour beaucoup d'observateurs soudanais la main d'Israël aura joué un rôle capital dans la scission. Israël voudrait à travers le contrôle du Sud Soudan un territoire stratégique qui pourrait permettre une agression à grande échelle visant l'Iran par le sud. L'attaque contre l'usine Yarmouk n'aura pas été possible sans un ravitaillement en vol ou via une base terrestre, que certains observateurs soupçonnent sur le sol même du Sud Soudan. Et de fait pour les analystes, l'attaque des Israéliens contre le Soudan équivaudrait à un avertissement à l'endroit des Iraniens. D'autant plus que les Soudanais ont signé un pacte militaire avec Téhéran. L'Iran a, depuis, indirectement répliqué en annonçant que son armée était en possession des images prises par le fameux drone du Hezbollah. M. B.