L'attentat suicide qui a ravagé jeudi la mosquée Al Iman, à Damas, a provoqué la mort d'une cinquantaine de personnes et des dizaines de blessés, prolongeant le drame de la Syrie, un pays en état de destruction programmé. Parmi les victimes de cet attentat sanglant, figure le célèbre savant musulman cheikh Muhammad Saïd Ramadhan Al-Bouti, qui donnait alors un cours de religion à des fidèles. Parmi les victimes de l'attentat qui a visé la mosquée, dans le quartier de Mazraa au nord de la capitale syrienne, figurait également le petit-fils du savant. Il s'agit du premier attentat-suicide contre une mosquée en Syrie, accroissant d'un cran l'horreur qui happe le pays du Cham voila maintenant plus de deux années. Al-Bouti, éminent théologien âgé de 84 ans, était un des plus grands savants dans le monde musulman et une référence reconnue. Les Algériens l'ont connu lors de ses différents passages dans les colloques sur la pensée islamique, durant les années quatre-vingt. Il s'est distingué également lors de la décennie rouge qui a durement frappé l'Algérie, en condamnant clairement le terrorisme, alors que la plupart des savants religieux dans le monde arabe observaient un silence incompréhensible. Al Bouti, né en 1929, était titulaire d'un doctorat en sciences islamiques de l'Université Al-Azhar du Caire. Le savant syrien d'origine kurde, quasiment une école en lui-même, est l'auteur d'une soixantaine d'ouvrages traitant de religion, de philosophie et de littérature. Il jouissait d'un grand respect parmi les Syriens, et présentait tous les vendredis ses sermons à la grande mosquée Omeyade de Damas. Il était régulièrement invité dans des conférences et colloques à travers le monde. La mort brutal de Cheikh Saïd Al-Bouti a provoqué la consternation en Syrie et dans le monde arabe, où il était particulièrement connu. Le cheikh Saïd Al-Bouti a refusé la destruction de la Syrie dès l'éclatement de la crise en mars 2011. Sa position de principe lui a valu l'inimitié des salafistes de son pays et des critiques acerbes des wahabites des pays du Golfe. Dans l'enfer qu'est devenu la Syrie, Al-Bouti refusait toute protection, affirmant qu'il remettait sa vie entre les mains de Dieu. Il était aussi hostile à toute fouille par la police des fidèles venus écouter ses sermons. Dans un message en réaction à sa mort le président syrien Assad en fera l'éloge : «Ils t'ont tué croyant faire taire la voix de l'islam et la foi dans le pays (...), ils t'ont tué pour avoir élevé la voix face à leurs idées obscurantistes visant à détruire les principes de notre religion clémente.» «Je jure au peuple syrien que ton sang, celui de ton petit-fils et de tous les martyrs de la patrie n'aura pas coulé gratuitement, car nous serons fidèles à tes idées en anéantissant leur obscurantisme et leur incroyance jusqu'à ce que nous en nettoyons le pays», dira le président Syrien. L'Algérie a condamné avec «la plus grande force» l'attentat de la mosquée Al Iman qui a fait de nombreuses victimes, dont l'éminent théologien et prédicateur cheikh Al-Bouti. M. B./Agences