Des centaines de milliers de partisans de Mohamed Morsi se sont rassemblés pour le premier vendredi du Ramadan devant la mosquée de Rabaa al Adawiya au Caire, exigeant le retour de leur président renversé par les manifestations du 30 juin soutenues par les militaires. Un climat de tension et de fortes incertitudes politiques est tangible dans tout le pays. Les anti-Morsi avaient également prévu une démonstration de force sur la place Tahrir, en fin de journée, à l'occasion de la rupture du jeûne. A la mi-journée, la foule était déjà très nombreuse devant la mosquée Rabaa al-Adawiya, à Nasr City, que des partisans du président déchu occupent depuis deux semaines. A ce titre, l'Allemagne a publiquement demandé hier à l'Egypte de mettre «fin à toutes les mesures limitant (sa) liberté de mouvement». Jeudi, les Etats-Unis ont de leur côté exhorté l'armée et les autorités intérimaires à cesser les arrestations arbitraires de membres des Frères musulmans, estimant que cela ne pouvait que contribuer à aggraver la crise politique. «Nous allons poursuivre la résistance. Nous resterons un mois, deux mois, et même un an ou deux s'il le faut. Nous ne partirons pas d'ici avant le retour de notre président», a lancé à la foule du Caire à un haut responsable islamiste, Safwat Hegazi. Rejetant le processus politique engagé par les nouvelles autorités, il a martelé les exigences du camp des Frères musulmans : retour immédiat du premier président élu démocratiquement, tenue de législatives et création d'un comité chargé d'élaborer un plan de réconciliation nationale. A quelques kilomètres de là, l'emblématique place Tahrir était quasi-vide, sous le soleil écrasant de l'été, seuls quelques douzaines de manifestants écoutaient un prêche. Le grand rendez-vous était fixé pour la rupture du jeûne. Cette double démonstration de force dans la rue fait craindre de nouvelles violences, après celles qui ont fait une centaine de morts depuis le renversement de M. Morsi, accusé d'avoir trahi les idéaux de la révolte contre Hosni Moubarak, de n'avoir pas su gérer le pays et de n'avoir servi que les intérêts de sa confrérie. La défiance des islamistes à l'égard des nouvelles autorités a été renforcée mercredi par un nouveau mandat d'arrêt contre le Guide suprême, Mohamed Badie, et d'autres responsables de la confrérie, recherchés pour incitation à la violence en lien avec le drame de lundi. Parallèlement, les tractations se poursuivent pour former un gouvernement sous la direction du Premier ministre désigné en début de semaine, Hazem el Beblawi, chargé de maintenir sur les rails le processus de transition édicté par le président intérimaire Adly Mansour, qui prévoit une nouvelle Constitution et des élections législatives début 2014. Un cadre rejeté par les islamistes, et suscite le courroux du mouvement Tamarrod qui le juge dictatorial. Cependant les accrochages se poursuivaient dans le Sinaï. Dans la nuit de jeudi à vendredi, plusieurs incidents graves ont encore eu lieu dans la péninsule, particulièrement instable depuis deux ans. Un policier de haut rang a été tué dans l'attaque d'un poste de contrôle et un poste de police a été attaqué dans la ville d'El-Arich. M. S.