Aujourd'hui est célébrée dans le monde la Journée internationale des handicapés. Comme si le handicap ne durait qu'un jour, nombreuses seront les cérémonies annuelles d'usage, où les institutions en charge du dossier et autres associations, absentes le reste de l'année, s'évertueront à pousser des cris de solidarité en alignant, bon gré mal gré, des hommes et des femmes meurtris dans leur chair, intimidés et écœurés par la place qui leur est réservé dans la société. L'Algérie compte actuellement plus de 1,9 million de handicapés. Ce chiffre ne traduit pas toute l'ampleur de la chose, puisque, jusqu'à présent, il n'y a pas eu d'étude exhaustive pour déterminer le nombre exact. Car pour être comptabilisée, la personne handicapée doit se présenter au niveau des directions de l'action sociale. Le 4 novembre dernier, le ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Communauté algérienne à l'étranger a annoncé qu'une enquête nationale sur le handicap, dont les résultats seront connus fin 2009, sera menée par Handicap International dans l'optique d'améliorer les conditions de vie de cette catégorie de citoyens. Que demande un handicapé ? D'abord changer le regard de la société. Etre diminué d'une fonction du corps ne fait pas d'une personne un sous-homme. Qu'il soit physique ou mental, le handicap n'amoindrit pas la sentimentalité de l'être. Il ressent aussi bien que les «valides» le besoin d'être aimé et considéré, et n'est nullement dénué d'amour propre. C'est pour cette raison qu'il tend à vivre «normalement». Avoir accès à l'éducation, à la santé, au travail et au logement constitue un droit fondamental, pour lui comme pour tout citoyen, que l'Etat doit lui garantir. Le 8 mai 2002, une loi pour la promotion des droits des handicapés comprend, entre autres articles, l'obligation faite aux entreprises de réserver 1% des postes d'emploi aux personnes handicapées. Mais les décrets exécutifs tardent à voir le jour. D'autres propositions émanant du ministère de la Solidarité ne trouvent pas encore de réponse comme l'augmentation de la pension pour handicapés à 6 000 DA (contre 4 500 actuellement). Par ailleurs, le projet, lancé en 1996 par la wilaya d'Alger, de construction de 100 logements sociaux en faveur de cette frange de la société n'est pas concrétisé. Seuls 45 logements ont été distribués en 2003. D'autres facteurs se greffent sur ces insuffisances. L'inadaptation du transport, des accès aux bâtiments administratifs, des trottoirs… constitue un véritable casse-tête pour les handicapés moteurs. Tous ces problèmes sont à soulever, mais qui doit le faire et surtout qui doit leur trouver des solutions ? Normalement, cela relève des mouvements associatifs. Ces associations censées se battre pour le droit des simples citoyens et non organiser des manifestations sporadiques et conjoncturelles. Elles devraient constituer une force de proposition et porter haut la souffrance de ceux qui peinent à vivre «normalement». Il appartiendra dès lors aux pouvoirs publics de lever tous les écueils, et, à défaut, de pallier à l'inertie du mouvement associatif. Mais cela est une autre histoire. «Celui à qui la souffrance est épargnée doit se sentir appelé à soulager celle des autres», disait Albert Schweitzer. S. A.