Eto'o : «Je suis trois fois Ballon d'Or, alors respectez-moi !» La conférence de presse animée par les Camerounais après leur victoire difficile (3-2) sur la Zambie a été des plus mouvementées. Et pour cause, d'un côté, il y avait un entraîneur, Paul Le Guen, qui ne semblait par faire l'unanimité chez les journalistes camerounais ; et d'autre part, un très offensif Samuel Eto'o, qui ne se gênait pas de dire ce qu'il a sur le cœur à qui veut le chercher. On reproche à Le Guen la titularisation de Binya ! Le ton était manifestement haut entre les journalistes camerounais et leurs représentants dans cette CAN. D'entrée, une flèche empoisonnée est lancée à l'endroit du sélectionneur français des Lions indomptables, à qui on avait demandé des explications sur le choix de son arrière gauche, Binya, l'ancien joueur du MC Oran, aux dépens de beaucoup d'autres qui leur semblaient meilleurs. «J'ai cherché partout un latéral gauche !» Le Guen ne s'affole pas et répond calmement : «Mais bien sûr, j'ai cherché partout un arrière latéral gauche et malheureusement, tous ceux qui étaient susceptibles de faire l'affaire, étaient soit en méforme, soit blessés. C'est pour cela que j'ai fait confiance à Binya», a-t-il déclaré sans s'emporter, comme le feraient beaucoup d'entraîneurs à sa place. Grisé par les noms des joueurs Le journaliste de la Radio et Télévision du Cameroun a été un peu plus offensif dans son intervention, en reprochant au sélectionneur de ne compter que sur le courage de ses joueurs, qui ne développent pas un bon jeu et ne séduisent pas encore, comme ils ont l'habitude de le faire. Raphael Nkoa a vivement critiqué Le Guen en lui reprochant d'être grisé par les noms des joueurs qu'il gère et les résultats du passé. Le Guen reste calme malgré les attaques Ce que le Français a vite fait de démentir, sans s'emporter : «Je n'ai jamais considéré que l'équipe type allait jouer tout le tournoi. Je reste ouvert à ce que je vois et à la forme de chacun. Lorsque j'ai pris l'équipe en main, on a fini premiers, alors que l'équipe était dernière du groupe. Mais j'ai toujours mesuré la difficulté de la situation et je pense qu'on peut devenir meilleurs. Et je pense avoir une analyse extrêmement lucide, vraiment !», a-t-il assuré avec calme et beaucoup de bonne volonté. «Vous êtes Camerounais d'abord ?», demande Eto'o C'est à ce moment que Samuel Eto'o fit son apparition dans la salle pour aller s'asseoir à gauche de son coach. Souriant comme lors de la dernière défaite contre le Gabon, le Roi Lion ne tarda pas à rugir à la face de ce journaliste qui osa lui demander : «Si, au vu de la prestation de l'équipe dans cette CAN, vous pensez que le Cameroun peut aller jusqu'au bout de la compétition ?» La réponse d'Eto'o refroidit la salle aussitôt : «Vous êtes Camerounais d'abord ?», demanda-t-il… «Je suis trois fois Ballon d'Or, alors, respectez-moi !» «Oui !», répond le journaliste tout intimidé. Puis, Eto'o de poursuivre : «Je suis trois fois Ballon d'Or africain ! Et si je joue dans une équipe, c'est que cette équipe a des possibilités de gagner ce titre. Alors respectez-moi d'abord ! Car je n'ai pas ramassé ces titres comme ça ! On ne me les a pas offerts pour rien. Vous négligez le Gabon ? Vous manquez de respect aux Zambiens ? Ou alors, le Togo, c'est une petite équipe ? Adebayor, c'est le meilleur joueur de l'année dernière. Alors respectez-nous au moins ! Respectez-nous vraiment !», insista-t-il devant une foule surprise et comme médusée par cette offensive inattendue. «On a plusieurs manières pour gagner !» Eto'o ne voulut pas se taire, fixant le journaliste dans les yeux, pour lui asséner encore : «Moi, je suis plutôt content, parce qu'on a montré une autre facette du Cameroun. Le Cameroun, c'est aussi le mental ! Et je suis fier aujourd'hui, parce qu'on a gagné grâce à notre mental. Vous avez vu les quatre derniers matchs qu'on a gagnés en qualification au Mondial ? On les a gagnés parce qu'on avait très bien joué au football. On a montré qu'on avait plusieurs facettes, plusieurs manières de jouer et gagner. Respectez-nous, s'il vous plaît !», a ajouté le Roi Lion d'un ton féroce et fâché, avant de regarder ailleurs pour marquer son mécontentement. «Je félicite Hervé Renard pour son dispositif tactique qui nous a gênés» Le joueur de l'Inter de Milan gardera cette colère encore sur la question suivante d'un journaliste qu'il connaît pourtant bien et qui lui demandait s'il s'est habitué à ce jeu de yoyo qui le fait jouer tantôt excentré, tantôt en électron libre en attaque. Même le «Sam» intime que lui a adressé le journaliste ne le refroidira pas complètement : «Je ne suis pas à mon premier match en équipe nationale, ce n'est même pas mon premier match comme footballeur. A la mi-temps, on a compris qu'on avait une très bonne équipe en face de nous et je tiens à féliciter le coach (Hervé Renard) pour le dispositif tactique qu'il a mis en place pour nous contrer. Nous avons fait le maximum pour revenir avant la pause, en vain», a-t-il reconnu. Nacym Djender