«Le groupe est hyper motivé pour cette demi-finale» Dans le camp algérien, cette CAN restera sans aucun doute celle de Hassen Yabda. Ce n'est pas là l'avis d'un groupe de fans de ce joueur, mais c'est l'opinion des spécialistes. Rabah Madjer dans ces mêmes colonnes disait : «Yabda fait sensation.» Un constat que nul ne peut contredire venant de Monsieur talonnade en finale de la Coupe d'Europe des clubs champions. Parions que Yebda ne fera pas long feu à Portsmouth. Après le Benfica, il connaîtra à nouveau ce que c'est de jouer pour un autre grand club. D'ailleurs, on parle déjà de chants de sirènes venant du Calcio… * Comment abordez-vous cette demi-finale contre l'Egypte ? Dans les meilleures conditions, Hamdoullah. L'équipe est très motivée pour cette demi-finale et tout se passe très bien pour l'instant. On est content et on va essayer, inch'Allah, d'aller plus loin dans cette CAN. * C'est votre première CAN et vous êtes déjà en demi-finale… C'est ma première CAN en effet et j'ai envie de la vivre pleinement. J'ai très envie d'aller au bout avec cette équipe, car on a tout ce qu'il faut pour le faire. Certes, on a mal démarré contre le Malawi, mais on avait une grande envie de revenir et de se remettre en selle. C'est ce qu'on a fait pour être en demi-finales. Ce n'est pas le moment de lâcher et cela tous les joueurs le savent très bien. * Franchement Hassan, est-ce que vous pensiez arriver en demi-finales après avoir perdu 3-0 contre le Malawi ? Sincèrement, oui ! La preuve, c'est que j'avais dit à Madjid (Bougherra) que Mourad (Meghni) et moi, quand on avait joué le Championnat du monde des moins de 18 ans, avec l'équipe de France, on avait perdu notre premier match 3-1 contre le Nigeria. On avait le même sentiment alors, mais, à la fin, on a réussi à gagner tous nos autres matchs et, en finale, on avait rejoué contre le Nigeria et on avait gagné 3-0. C'est comme ça qu'on était devenus champions du monde. J'ai dit aussi à Madjid Bougherra qu'on a peut-être perdu contre le Malawi 3 à 0, mais tu vas voir que, par la suite, on va aller très loin. Et finalement, on est en demi-finales et, inch'Allah, on va aller plus loin. * C'est une belle histoire que vous êtes en train de vivre Mourad Meghni et vous, non ? Oui, c'est vraiment extraordinaire ce qu'on a vécu jusque-là et, inch'Allah, le meilleur est à venir. On a vécu des moments très intenses et une histoire très semblable en sélection. D'abord en jeune avec l'équipe de France, puis aujourd'hui avec l'Algérie. Il n'y a pas beaucoup de cas comme le nôtre. * On imagine que vous en parlez souvent entre vous… C'est sûr ! On en rigole beaucoup, même ! Mais on se dit surtout qu'on est fiers d'avoir choisi de jouer pour notre pays. On est persuadés que c'est la plus belle des choses qu'on a faite. On est très, très, très, très, très, très (il l'a dit six fois, ndlr) fiers d'avoir joué pour l'Algérie. Surtout avec ce qu'on est en train de vivre ensemble. On se dit que ça n'a vraiment rien à voir avec ce qu'on avait vécu en jeunes avec l'équipe de France. On a des émotions qu'on n'aurait jamais eues en jouant pour l'équipe de France. On n'en a aucun doute. * Qu'est-ce qu'ils disent chez vous à la maison ? Ils sont très contents pour moi et pour toute l'équipe nationale. Ils suivent cela avec une attention particulière et ils vibrent avec nous comme tous les Algériens. Ils sont contents de mes prestations parce qu'ils savent que je suis en train de jouer à mon vrai poste. Ils savent combien je voulais jouer comme ça et monsieur Saâdane l'a compris et m'a fait confiance. J'espère continuer à élever mon niveau pour lui montrer qu'il avait raison de me faire jouer à mon vrai poste. * On vous sent totalement libéré cette fois dans cette équipe et vous faites partie des prétendants potentiels pour le titre honorifique de meilleur joueur de cette CAN. Est-ce qu'on a vu le vrai visage de Hassan Yebda ? Non, je ne sais pas. J'essaie de me donner comme d'habitude pour cette équipe. Mais c'est vrai que je me sens un peu plus dans mon élément, parce que je joue à mon vrai poste cette fois. Mais je pense que je peux encore faire mieux, inch'Allah. Il y a toujours une marge de progression à aller chercher quand on veut s'améliorer. Il y a aussi des erreurs à corriger constamment, c'est sûr que ce n'est jamais parfait. J'espère que ça va aller de mieux en mieux dans cette demi-finale. * Vous sentez justement que l'équipe est prête pour cette demi-finale ? Qu'est-ce que vous vous dites au juste entre vous ? Avec les autres joueurs, on se parle tout le temps. On est tous concernés par les mêmes objectifs. Comme après le Malawi, le Mali et l'Angola, à chaque fois on se parle entre nous et on se dit que voilà, cette fois, ça devient de plus en plus sérieux et on ne doit pas prendre les choses à la légère. Le premier match face au Malawi, on avait commis des erreurs et personne ne veut revivre la défaite. C'est un match qui nous a appris beaucoup de choses de cette CAN. On a appris à corriger toutes erreurs commises contre le Malawi. C'est pour cela qu'on est de plus en plus concentrés à mesure qu'on avance dans cette CAN. A chaque fois, on se dit qu'il faut gagner ce match à tout prix, comme tous les autres. On s'est toujours dit qu'on devait se donner à fond et que même si on perdait, il fallait qu'on laisse notre corps sur le terrain et finalement, ça a payé et j'espère qu'on va continuer, inch'Allah. * Qu'est-ce qu'on se dit lorsqu'on a en face de soi une armada de stars comme Drogba, Touré, Kalou et les autres, on les respecte un peu trop au départ ? Non, on y va à fond d'entrée et je pense que cela s'est vu sur le terrain. Aucun de nous n'a fait de concession contre la Côte d'Ivoire, malgré la présence de ces grands joueurs. On savait qu'on pouvait battre cette équipe et dès qu'on est entrés sur le terrain, on y est allés à 200 %. Aucun de nous n'a refusé d'aller au combat et, au final, ça a donné une victoire belle et méritée. * Vous encaissez un but à la 89'. Qu'est-ce qu'on se dit à ce moment, c'est perdu définitivement ? Franchement et là, je vais dire toute la vérité, tout ce que j'ai ressenti profondément à cet instant. On prend le but à une minute de la fin alors qu'on dominait totalement nos adversaires. Leur but ne reflétait déjà pas la physionomie du match. On prend le ballon pour la remise en jeu, et je vois Madjid Bougherra venir vers moi pour me dire : «Hassan, je vais monter devant, parce qu'il ne reste plus que trois minutes de temps additionnel.» Dès que j'ai entendu cela, ça m'a coupé les jambes. J'étais dégoûté. J'avais les jambes sciées et j'avais presque les larmes aux yeux. J'avais envie de pleurer comme un gamin, tellement c'était dur à accepter. Car, dans ma tête, il restait au moins un bon quart d'heure à jouer encore. Sincèrement, je croyais qu'on était éliminés à ce moment. * Et lorsque Bougherra a marqué son but ? Là, j'ai ressenti quelque chose que je ne peux pas exprimer avec des mots. C'était incroyablement bon. * Nous avions tous la chair de poule. Toute l'Algérie avait explosé de bonheur après cette égalisation. Et comment vit-on cela sur le terrain ? Nous aussi, nous étions pareils que vous. On est passés d'un sentiment de déception totale à une joie totale. C'était de la folie, tout simplement. Je l'ai vécu dans l'euphorie totale. Madjid a marqué et c'est toujours magique avec lui. C'est pour cela qu'on l'appelle «Magic» ! * Qu'est-ce que vous a dit Bougherra dans le vestiaire après la victoire ? Il m'a dit : «Je ne sais pas ce qui m'est arrivé, mais je sentais le coup, je savais que j'allais marquer ce but» Je lui ai dit et bien tant mieux ! * A 2-2 contre la Côte d'Ivoire, qu'est-ce que vous vous dites avant de commencer les prolongations ? On s'est tous parlé entre nous pour nous dire : «Cette fois les gars, on se serre les coudes un peu plus. Il ne faut rien lâcher !» Tout le monde est monté au créneau pour se motiver un max. Moi, j'étais avec Ziani et Bougherra. On s'est dit : «Maintenant qu'on est revenus au score de cette manière, on doit prouver qu'on ne l'a pas fait pour rien !» Si on est passés du désespoir total à l'espoir total. On a voulu rester solidaires pour aller au moins jusqu'aux penalties. On se devait donc de gagner ce match et, Hamdoullah, c'est ce qu'on a fait. * Après le but de Bouazza, c'était tout de suite gagné dans vos têtes ? Oui, là, on le savait tous. Comme on a une équipe très soudée, je savais qu'on allait gagner ce match jusqu'au bout, malgré les occasions qu'on a ratées. * Au coup de sifflet final, vous avez été consolé les Ivoiriens... Oui, j'avais Gervinho à côté de moi et je lui ai dit qu'ils avaient fait un bon match eux aussi et qu'avec l'équipe qu'ils ont, ils peuvent encore faire de belles choses en Coupe du monde. * Hier dans Le Buteur, Guy Roux a dit beaucoup de bien de vous. Qu'est-ce que cela vous fait ? Je n'ai pas lu ce qu'il a écrit, parce qu'on n'a pas Internet dans l'hôtel. Mais le fait d'apprendre qu'un monument comme Guy Roux dise du bien de moi, c'est sûr que c'est flatteur. Il me connaît très bien. Comme je vous l'ai déjà dit, s'il était resté à Auxerre au temps où j'y étais, j'aurais joué sans problème dans son équipe. J'avais toute sa confiance, mais malheureusement il était parti au mauvais moment pour moi. En tout cas, j'apprécie beaucoup ce qu'il a dit de moi. C'est tout de même monsieur Guy Roux qui l'a dit ! Ce n'est pas n'importe qui dans le football. * Vous ne pensez pas que si le public algérien débarquait au stade de Benguela vous auriez encore plus d'envie de gagner contre l'Egypte ? On se sent un peu seuls ici, parce qu'il n'y a pas nos compatriotes avec nous, nos supporteurs nous manquent. Et on sait très bien qu'à Khartoum, c'est eux qui avaient fait la différence et on aimerait tant les avoir avec nous dans ce stade. Maintenant, s'ils viennent on sera très heureux, mais s'ils ne viennent pas, on essaiera de puiser dans nos ressources comme on l'a fait jusque-là pendant cette CAN pour aller au bout. On va tout faire pour aller vers eux avec la Coupe d'Afrique dans les mains, inch'Allah. * Qu'est-ce que vous dites au peuple algérien qui espère encore de toutes ses forces vous voir battre l'Egypte et aller en finale ? Il ne faut pas nier que l'équipe d'Egypte a de bons joueurs qui sont en train de faire un parcours sans faute jusque-là et qui semblent déterminés à décrocher un troisième titre africain d'affilée. Mais nous aussi, on a une bonne équipe déterminée à aller jusqu'au bout de cette CAN. Et je crois qu'on a bien mérité d'être en demi-finales après avoir éliminé de grandes équipes comme le Mali et la Côte d'Ivoire. Les Algériens doivent savoir que nous, les joueurs, sommes tous déterminés à ne rien lâcher dans ce match et qu'on va se donner à 1000 % pour battre l'Egypte et aller en finale. On jouera nos chances à fond, quitte à laisser nos corps sur le terrain. En tout cas, sachez qu'on ne lâchera rien du tout contre l'Egypte ! Entretien réalisé par Nacym Djender
