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Vahid Halihodzic : «On a failli me couper la tête»
Publié dans Le Buteur le 25 - 09 - 2011

«On a brûlé ma maison juste parce que je suis musulman»
Le public algérien connaît l'entraîneur que vous êtes, mais très peu l'homme, Vahid Halilhodzic…
C'est vrai, peu de gens connaissent le vrai Vahid. Certains ont écrit trois livres sur moi et ma vie, mais il y avait plein de conneries dedans. Ce sont des gens qui ne me connaissent pas et qui ont écrit sur moi. Mais c'est peut-être aussi de ma faute, parce que je n'ai jamais travaillé mon «image», comme on dit en France. L'essentiel, c'est que, moi, je sais qui je suis et je suis fier d'être comme je suis. Je sais que je ne fais pas l'unanimité, je ne suis pas d'accord avec tout le monde, mais côté humain, je suis fier de ma sincérité et de mon respect envers les gens et du respect que les gens me manifestent. J'ai toujours privilégié les qualités humaines dans mes rapports avec les gens. J'aime beaucoup aider les autres, je suis très sociable, je vais souvent vers les autres. Dans ma vie, j'ai eu à maintes fois l'occasion de prouver mon côté humain, ma solidarité et mon abnégation vis-à-vis des autres. En tout cas, je suis fier d'être comme ça.
Vous faites exprès pour vous protéger de garder secrètes votre vie en Bosnie, votre enfance, la famille, la guerre…
C'est impossible d'en parler en si peu de temps. Il s'agit de toute une vie ! On a écrit trois livres sur ma vie, comme je vous ai dit, un livre autorisé et les deux autres sans mon accord et c'est vrai que, quelque part, ma vie ressemble à un roman. J'ai eu des hauts et des bas, mais si j'ai pu remonter la pente, c'est toujours grâce à mon travail. Je suis quelqu'un qui est amoureux de son travail. Ce n'est pas tout le temps facile d'être footballeur ou entraîneur. Certes, il y a des moments exceptionnels, mais en parallèle, on a aussi des périodes assez difficiles. Mais ce sont les risques du métier. Un homme public est toujours exposé aux difficultés. On est toujours dans le viseur. Beaucoup de gens peuvent vous détester et beaucoup de gens peuvent vous estimer à la fois. C'est la vie d'un homme public, quoi !
Vous avez prononcé un jour une phrase très intéressante dans ce sens. Vous aviez dit : «J'ai eu deux vies pratiquement. Jusqu'à 42 ans, j'ai mené une vie irréelle. J'ai tout eu : la gloire, la richesse et tous les honneurs qu'un footballeur peut connaître dans sa carrière. Et, en un moment, j'ai tout perdu. J'ai donc recommencé ma seconde vie». C'était par rapport à quoi, au juste ?
C'était par rapport à mon destin, à tout ce que j'ai connu, à la guerre qui a ravagé mon pays surtout. J'étais riche et, du jour au lendemain, je n'avais plus rien. Je me suis retrouvé avec un pantalon jeans et une chemise. C'est tout ce qui me restait. Pendant 17 années de ma vie, j'ai été très riche, je jouais en première division en France (au FC Nantes, ndlr), j'étais sélectionné en Equipe de Yougoslavie, j'ai gagné des titres, j'ai été élu meilleur joueur de l'ex-Yougoslavie, j'ai été meilleur joueur d'Europe des moins de 23 ans, j'ai été meilleur buteur du championnat d'Europe des moins de 23 ans en 1978, lorsqu'on a été champions d'Europe, car, avant, on faisait jouer jusqu'aux U23, pas comme aujourd'hui où il n'y a que les U21. J'avais donc connu de vrais moments de gloire. Par la suite, il y a eu la guerre dans mon pays, avec la venue du fascisme et tout ce qu'on connaît. Je voyais cela de loin, à la télé et après, j'ai été touché de plein fouet. J'avais une belle maison et, le lendemain, il n'y avait plus rien. J'ai perdu ma maison et tout ce que j'avais…
On vous a brûlé votre maison, c'est ça ?
Oui, on a brûlé ma maison et on a voulu me tuer. Ils voulaient me couper la tête juste parce que je suis musulman. Désolé, je ne voudrais pas trop m'étaler sur ce sujet. Le plus important, c'est qu'aujourd'hui je suis toujours vivant. Je me demande encore à ce jour, comment les gens qui ont commis toutes ces exactions, tous ces crimes, peuvent encore dormir tranquilles. Moi, aujourd'hui, je suis de nouveau riche et vivant. Mais, surtout, je peux regarder les gens droit dans les yeux et c'est cela ma grande fierté.
On dit que vous avez sauvé beaucoup de gens en Bosnie…
(Il hésite un peu...) Oui, c'est vrai, j'ai sauvé des milliers de personnes pendant cette guerre. J'ai dépensé tout mon argent pour sauver les miens. C'est pour cela qu'on a voulu me tuer.
Vous avez fait partir votre famille en France...
Oui, heureusement qu'il y avait cette possibilité, sinon, je ne sais pas ce qu'on aurait fait. Ma propre famille est allée en France, mais mes frères sont restés en Bosnie, ils ont été expulsés de leurs maisons et ils sont partis ailleurs. C'était des moments sombres, vraiment incompréhensibles, mais que pouvions-nous faire ? Aujourd'hui, on peut dire que j'ai connu des moments terribles avec cette guerre, le fascisme et toutes les horreurs qui vont avec.
Est-ce tout cela qui vous a poussé à mettre cette carapace ?
Non, je n'ai mis aucune carapace entre les gens et moi. Je suis à l'inverse de ce que vous pouvez imaginer. Je suis plutôt sensible et sentimental. Je pleure facilement, parfois juste en voyant le malheur des autres. Par exemple, je peux écraser une larme en voyant une scène triste d'un film ou l'image d'un enfant malade. Cela me touche profondément et je peux pleurer donc sur les malheurs des autres, comme si c'étaient les miens. Je n'ai franchement aucune carapace. Quand je rigole, je le fais naturellement et c'est pareil pour mes larmes. Je n'ai pas honte de cela et je ne m'en cache vraiment pas. Je n'ai aucun souci avec cela. Je prends souvent les choses au premier degré. Quand je parle de quelque chose, je n'aime pas changer d'idée en cours de route.
Jérôme Alonzo (ancien gardien de but du PSG, ndlr) nous a fait un témoignage dans lequel il dit qu'en dehors du terrain, vous êtes quelqu'un de très sensible à la souffrance des autres…
Eh bien, c'est ça, il a raison de le dire, car il ne s'est pas trompé. Moi qui ai souffert dans la vie, je ne peux pas ignorer la souffrance des autres. Je suis extrêmement sensible à la douleur des autres. Mais à cette sensibilité, heureusement que j'ai une personnalité très forte qui fait que je n'ai peur de rien. Vous savez, pendant la guerre, il y avait quelqu'un qui allait tuer des personnes devant moi et je n'ai pas eu peur de me mettre entre lui et ces gens pour lui dire : non ! J'ai mis mon corps entre ces personnes et son Uzi ! Vous imaginez ce que c'est ? Ils m'ont dit : mais vous faites face à un Uzi, ce n'est pas une Kalachnikov ! Je leur ai répondu : peu importe que ce soit un Uzi ou autre, je n'en ai jamais entendu parler ! Mais j'ai tout fait pour que ces personnes ne soient pas tuées. C'était mon but et j'ai été jusqu'au bout. Non, j'ai une personnalité qui gêne certaines personnes, mais…
(A ce moment, un fan qui le reconnaît le salue en lui serrant la main)
Vous voyez, j'aime bien les gens simples qui passent et qui me disent bonjour. Je préfère un bonjour aussi sincère que celui d'un simple travailleur que celui d'une personnalité… (il lève la main vers le haut).
Et en Algérie, on vous dit souvent bonjour ?
Vous savez, j'ai passé un mois seulement en Algérie, j'ai beaucoup travaillé. Je n'ai pas encore connu beaucoup de gens là-bas. Pour le moment, je n'ai connu que la fédération, Sidi Moussa et mon hôtel. Je suis sorti une fois parce qu'il y avait une délégation d'un ministre de Bosnie en visite en Algérie. Je suis allé donc manger avec lui, et c'est tout. Je n'ai pas eu le temps de sortir en Algérie. Je suis venu pour travailler et, vous pouvez me croire, il y a beaucoup de boulot. Je pense que c'est l'une des tâches les plus difficiles de toute ma carrière.
A ce point ?
Oui, ça me fait rappeler la fois où j'avais pris en main l'équipe de Lille en deuxième division et qui jouait en bas du tableau. En trois ans, elle jouait déjà la Ligue des Champions. Mais de là à dire que je pourrai refaire la même chose avec l'équipe d'Algérie, je n'en sais rien, car cela dépendra de beaucoup de facteurs.
Vous imaginez la responsabilité qui pèse sur vos épaules avec ces 35 millions d'Algériens qui vous voient comme le sauveur des Verts ?
Et même 40 millions ! Il n'y a pas que 35 millions, vous oubliez aussi les 5 millions d'Algériens en France ! (Il rigole). Eux aussi, il faut les compter. En plus, ceux de France comptent double tellement ils sont passionnés. Ils ne lâchent rien, eux non plus.
Quelle idée vous faisiez-vous de l'Algérie avant votre venue et quelle est la chose qui vous a le plus marqué sur place ?
J'ai déjà travaillé avec des joueurs algériens et j'ai beaucoup d'amis algériens aussi. A Lille, j'avais un joueur algérien, à Paris aussi j'ai travaillé avec un Algérien (le Dr Chalabi qui est actuellement à Aspetar, ndlr), je connais donc assez bien la mentalité des Algériens, surtout aujourd'hui. Et je crois que vous aimez plus parler que travailler. C'est exactement comme en Bosnie. Mais j'espère que les gens ne le prendront pas mal, car c'est aussi le défaut des Bosniaques. Le mieux est d'inverser cela. Travailler beaucoup et parler moins.
Vous au moins vous êtes sincère en disant la vérité. Vous savez, les Algériens apprécient beaucoup ceux qui leur disent les choses en face…
C'est dans ma nature de dire les choses en face. Mais là, ce n'est pas une critique. Nous aussi en Bosnie, on est comme ça et c'est parce qu'on partage ce défaut que j'aimerais qu'on s'en débarrasse, pour notre bien à tous. J'espère que les gens vont bien comprendre mon message et ne pas dire que Vahid a commencé à dérailler. C'est sincère ce que je dis là. Pour avoir des résultats dans le football, il faut beaucoup travailler. Il faut aussi avoir beaucoup de rigueur et de la discipline. Les résultats en dépendent souvent.
Vous avez dit un jour : «Quand je discute avec un joueur, je note sur mon calepin tous ses engagements et je les lui ressors le jour où il fera le contraire». L'avez-vous fait aussi avec les Verts ?
Oui, c'est cela. Je note tout le temps ce que les joueurs me disent. Je prends acte de leurs engagements, parce que les gens ont tendance à dire des choses sans en comprendre l'importance. Moi, quand je donne une parole, je la tiens. C'est ce que j'ai fait avec le président (il parle de Raouraoua, ndlr) et un an après, on a discuté et finalisé ma venue en Algérie.
Est-ce qu'en Bosnie aussi la parole donnée est sacrée ?
Non, non, en Bosnie aussi les gens sont un peu ch… C'est la mentalité méditerranéenne qui est comme ça. Non, c'est plutôt l'éducation des parents qui peut vous apprendre cela. C'est là qu'on apprend à respecter la parole donnée.
Est-il vrai que, quand vous courrez, vous faites toujours neuf tours, par rapport au numéro 9 que vous portiez quand vous étiez footballeur ?
(Il rigole). Figurez-vous que ce matin aussi j'ai couru neuf kilomètres ! (Il se marre). Cela est en rapport direct avec le numéro 9 que je portais quand j'étais joueur. J'étais avant-centre, comme vous le savez. C'est en quelque sorte un clin d'œil pour remercier le chiffre 9 pour tout ce qu'il m'a apporté.
C'est votre chiffre fétiche ?
Non, pas à ce point. Je ne suis pas dans ces choses là, je ne suis pas dans l'abstrait. Je suis plutôt terre-à-terre dans la vie. J'ai les pieds bien posés par terre. Après tout ce que j'ai vécu, la vie m'a bien appris à ne compter que sur soi. Dieu peut t'aider certes, mais c'est à toi de faire l'effort. Ce n'est pas un chiffre qui va m'aider dans mon travail. Non, je suis trop réaliste pour compter sur autre chose que mon travail.
Vous avez été international yougoslave de 1976 à 1985. Vous vous rappelez donc certainement du match entre la Yougoslavie et l'Algérie en demi-finale des Jeux Méditerranéens de 1979 à Split. Etiez-vous sur le terrain ce jour-là ?
Oui, je me rappelle bien de cette bagarre entre les deux équipes. Mais je n'avais pas joué ce match. On m'a parlé de cela en Algérie. De la bagarre et tout. Mais connaissant les deux peuples, ça ne m'étonne pas qu'il y ait du grabuge entre eux. Alors là, pas du tout ! (Il se marre). Vous savez pourquoi il n'y a pas d'équipe de rugby ni en Algérie ni en Yougoslavie ? C'est parce que les matchs n'iront jamais à leur terme. Il y aura toujours des bagarres dès la cinquième minute ! (Il rigole encore).
Vous allez certainement profiter de cette agressivité naturelle de l'Algérien pour en faire une arme redoutable chez les Verts, non ?
Oui, certainement ! C'est très important de prendre cela en compte. L'Algérien fonctionne avec le cœur d'abord, puis avec sa tête. Il est très dynamique et il bouge très facilement. Il faut profiter de cela, le respecter, le mettre en confiance, en le mettant dans de bonnes conditions. Il faut faire un bon travail pédagogique, psychologique et sociologique pour obtenir un rendement optimal sur le terrain.


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