Pourtant, Feghouli, Derraji et Msakni ont fait des gestes techniques Alors que les deux matches de la première journée de la CAN-2013, Afrique du Sud-Cap-Vert et Angola-Maroc, ont été jugés comme les plus ternes de la compétition depuis son début, le bouquet de télévision sud-africain SABC, sur la foi d'opinions postées par ses téléspectateurs de différents pays (il détient les droits de diffusion du tournoi par satellite vers tous les pays africains anglophones), a estimé que Tunisie-Algérie a été le match le moins attractif joué jusqu'à mardi soir. Le motif ? «Les deux équipes sont trop européennes.» «Les deux équipes ont fait trop de calculs et de tactiques» Ce jugement est basé, selon la chaîne et ses téléspectateurs interactifs, sur un constat : «Tout au long du match, surtout lors de la première mi-temps, les deux équipes ont été calculatrices, avec une prédominance du positionnement tactique sur la spontanéité technique.» Ils en veulent pour preuve qu'il n'y a pas eu assez d'actions individuelles et de gestes techniques propres aux Africains, estimant que les joueurs «européens» présents sur le terrain ont lénifié le jeu de leurs équipes. Pourtant, Feghouli, Derraji et Msakni ont fait des gestes techniques «C'est une Coupe d'Afrique des nations et nous aurions aimé voir un jeu à l'africaine, fait de technique individuelle et de spontanéité, comme dans les autres matches», ont affirmé les reporters de la SABC et leurs internautes. Ce constat, il faut le dire, est plus un postulat qu'une vérité prouvée, puisqu'il y a bel et bien eu quelques beaux gestes techniques, notamment par Sofiane Feghouli, Islam Slimani, Youssef Msakni et Oussama Derraji. Le but en lui-même est une merveille de geste technique : une frappe enroulée et idéalement dosée. La technique n'est pas seulement d'user de petits et grands ponts. L'Egypte a remporté la CAN trois fois de suite avec un style «européen» Il est utile aussi de rappeler que l'Egypte, la seule sélection africaine qui a remporté la CAN trois fois de suite, ne comptait pas dans ses rangs de grands techniciens. C'est une équipe dont les forces étaient la stabilité et le collectif. D'ailleurs, suivant les standards européens - et cela a été souligné par tous les spécialistes -, la formation d'Egypte des années 2000 était la plus «européenne» d'Afrique par son niveau d'organisation tactique et par son fond de jeu, même en ne renfermant pas des techniciens de niveau international. Visiblement, pour certains africains, le football s'est arrêté à l'ère du folklore. ------- Les Verts n'ont plus marqué depuis trois matches Quand Vahid Halilhodzic avait été nommé sélectionneur, il avait un chantier urgent : réapprendre à la sélection nationale à marquer des buts. La mission était réussie en quelques semaines seulement, puisque l'Algérie avait réussi à marquer des buts à chacun de ses dix premiers matches en tant que sélectionneur. Les Verts ont même réappris à inscrire trois buts et plus, ce qui n'était plus arrivé depuis longtemps. Or, ne voilà-t-il pas que la sélection nationale est retombée dans ses travers. Et pourtant, Slimani, Soudani, Kadir et Feghouli sont toujours là Cela fait trois matches de suite qu'elle n'a pas inscrit le moindre but : contre la Bosnie-Herzégovine, face à l'Afrique du Sud et devant la Tunisie (le match amical face aux Platinum Stars ne compte pas, car il n'est pas reconnu par la FIFA). C'est intriguant que l'attaque algérienne, sa principale force de frappe durant les derniers mois, se soit grippée tout d'un coup, alors que les mêmes joueurs qui ont été les buteurs providentiels (Slimani, Soudani, Kadir, Feghouli...) sont toujours là. Hichri l'a constaté : «Il y a trop de distance entre les lignes algériennes» L'explication pourrait être trouvée dans le changement tactique opéré par Vahid Halilhodzic ces derniers temps. Avoir trois milieux récupérateurs alignés d'entrée, le relais avec l'attaque ne se fait pas tout aussi rapidement qu'il l'était, même si Medhi Lacen et Adlene Guedioura se démènent pour monter haut à chaque fois que l'équipe est en possession du ballon. Le défenseur central tunisien, Walid Hichri, l'a constaté lui-même : «Il y a trop de distance entre les lignes algériennes, ce qui a fait que Slimani n'a pas toujours reçu les ballons dans de bonnes conditions.» Halilhodzic a musclé le milieu au détriment de l'animation offensive Le constat se tient, surtout que, durant les matches où l'Algérie avait cartonné (contre le Niger, le Rwanda et la Gambie), il y avait le 4-2-3-1, soit quatre joueurs à vocation offensive sur le terrain, avec généralement Foued Kadir à droit, Hilal Soudani à gauche, Islam Slimani en pointe et Sofiane Feghouli juste derrière lui. Or, Halilhodzic opte désormais pour le 4-3-3, avec deux ailiers purs à l'ancienne (Feghouli à droite et Kadir à gauche), sacrifiant Soudani à sa tactique new-look basée sur la musculation du milieu du terrain au détriment d'une plus grande animation offensive. Du coup, il n'y a plus de relayeur pur. Le match contre le Mali, le déclencheur Cette nouvelle tactique a sans doute été inspirée par la mésaventure vécue au mois de juin dernier à Ouagadougou face au Mali et qui est visiblement restée en travers de la gorge du sélectionneur. Ce jour-là, les Verts avaient le contrôle du jeu, mais s'étaient fait surprendre sur des balles arrêtées. Le coach tient vraisemblablement à densifier désormais le milieu du terrain face à des équipes joueuses (il ne l'avait pas fait contre la Libye, parce que cette équipe ne montait pas souvent à l'attaque) afin de les empêcher autant que faire se peut d'obtenir des balles arrêtées dangereuses. Comme on ne peut pas tout avoir, ce choix prudent n'est pas sans avoir des conséquences sur le front de l'attaque. Pourtant - et c'est Halilhodzic qui le répétait lors de sa nomination à la tête des Verts -, le football est de faire en sorte de marquer plus de buts que l'adversaire et non pas d'en encaisser moins. Ses certitudes semblent avoir changé.