C'est dans une salle bien garnie de la jeune élite africaine, futurs leaders que Barack Obama a exhorté ce mardi les jeunes Africains à enraciner les principes démocratiques dans leurs pays, et à ne pas suivre les pas de la génération des indépendances qui s'est selon lui accrochée au pouvoir, à l'exemple du Zimbabwéen Robert Mugabe qu'il a durement critiqué. À la Maison-Blanche, c'est plus d'une centaine de jeunes Africains qui sont regroupés en forum à l'occasion du demi-siècle des indépendances africaines de 1960. Décontracté à l'extrême, Obama a exprimé l'espoir que «certains d'entre vous deviendront un jour dirigeants de vos pays». Le président américain venait ainsi de lancer une bouffée d'oxygène à ses jeunes invités comme pour les mettre à l'aise. Ce fut le déclenchement du jeu questions-réponses autour des sujets qui touchent le monde en général et l'Afrique en particulier. «Si vous y réfléchissez, dans les années 1960, lorsque vos grands-parents, arrière-grands-parents se battaient pour l'indépendance, les premiers dirigeants disaient tous qu'ils étaient pour la démocratie», a rappelé le président américain. Ce fut beaucoup plus une séance de questions-réponses qu'une simple rencontre traditionnelle. L'ambiance était au beau fixe et les interrogations venaient d'une manière toute spontanée, comme pour exprimer la soif de ces jeunes africains d'apprendre plus, de connaître mieux les choses de la vie. «Et ce qui s'est produit, c'est que lorsque vous avez été au pouvoir pendant un certain temps, vous vous dites «j'ai été un si bon dirigeant que pour le bien du peuple, je dois rester en place»». C'est alors que l'ambiance devenait de plus en plus bon enfant pour mieux capter les perspectives d'un avenir meilleur débarrassé à jamais des visées colonialistes et où il n'y aura plus jamais aussi d'Africains de différentes catégories. Mais juste une Afrique prospère, l'Afrique des Africains sans bâton du pèlerin. «Et c'est comme cela que l'on commence à changer les lois, à intimider et à emprisonner des opposants. Et bientôt, des jeunes gens comme vous, pleins d'avenir et de promesses, sont devenus ce qu'ils avaient combattu», a regretté M. Obama, en citant en exemple la démocratie américaine, «dans laquelle les institutions sont plus importantes qu'un individu». «Et cela ne veut pas dire que nous sommes parfaits, nous avons aussi beaucoup de problèmes», a reconnu le président, tout en estimant que «vos pays doivent aussi prendre confiance dans le processus démocratique». Pour célébrer le 50e anniversaire de l'accession à l'indépendance de 17 pays d'Afrique sub-saharienne, les autorités américaines, plutôt que de réunir des chefs d'Etat ou de gouvernement, ont convié 115 jeunes à la Maison-Blanche pour discuter avec M. Obama de «leur vision de l'Afrique pour les 50 ans à venir». Et à l'occasion d'une question posée par un ressortissant du Zimbabwe, M. Obama s'en est pris au président Robert Mugabe, 86 ans dont 30 au pouvoir. En écho au discours qu'il avait prononcé lors de sa seule visite en Afrique noire en tant que président, en juillet 2009 au Ghana, M. Obama, né aux Etats-Unis de père kényan, a répété que «la bonne gouvernance est au cœur du développement». Réaffirmant que «le destin de l'Afrique sera déterminé par les Africains», il s'est néanmoins engagé à «faire en sorte que vos voix soient entendues pour que vous puissiez saisir ces opportunités». Les 115 jeunes Africains qui se trouvent à Washington pour trois journées sont d'ores et déjà qualifiés aux Etats-Unis «dirigeants de la société civile et du secteur privé» par l'Amérique au nom de laquelle la chef de la diplomatie Hillary Clinton avait elle aussi exhorté ces jeunes à confier plus de pouvoir aux citoyens. «Nous sommes à la recherche de dirigeants qui savent que le fait de donner plus de pouvoir aux citoyens est dans l'intérêt de tous», a dit Mme Clinton Dans le monde actuel, «un pouvoir basé sur un rapport hiérarchique allant du sommet à la base n'est plus tenable», a-t-elle poursuivi.