Face aux données officielles sur la situation de l'économie algérienne, annoncées lors de la séance de l'audience par le président de la République au ministre des Finances le 15 aout 2010, (reproduit par l'Organe officiel APS le 16 aout 2010), l'objet de cette contribution est de se poser la question suivante : quelle est donc la réalité de l'économie algérienne , un chiffre devant être interprété dans son véritable contexte , surtout avec l'effritement du système d'information en Algérie, les déclarations de responsables aux plus hauts niveaux se contredisant en termes de tests de cohérence et ce, afin d‘éviter des interprétations biaisées qui peuvent conduire à des politiques socio- économiques erronées. La Nation à des pertes de plusieurs milliards de dollars. I-LES DONNEES OFFICIELLES Elles sont les suivantes -La croissance hors Hydrocarbures aurait été de 9,3% en 2009 contre 6,1% en 2008 tirée essentiellement par l'agriculture et le BTPH ; -L'inflation aurait été de 5,75% en 2009 ; -La valeur des importations en 2009 a accusé une baisse de 1% par rapport à 2008 qui était d'environ 40 milliards de dollars ; -Les exportations ont reculé d'environ 40% en 2009 par rapport à 2008, en précisant que selon le dernier bilan de Sonatrach du 10 août 2010, les exportations de l'année 2009 se sont élevées à 44,3 milliards de dollars contre 76,9 milliards de Dollars en 2008, les prix du pétrole brut étant en moyenne annuelle, à 61,5 dollars le baril en 2009, contre 99,2 dollars le baril en 2008, dont l'autofinancement Sonatrach//Sonelgaz, accaparent environ 40% des recettes globales, restant environ 24 milliards de dollars pour le financement des autres secteurs ; -Le niveau de la dette extérieure à moyen et long termes est estimé à 3,92 milliards au 31/12/2009 de dollars (principal et service de la dette) ; -Les réserves de change sont estimées fin 2009 à 147,2 milliards de dollars ; -La dette publique interne a été estimée à 814 milliards de dinars en 2009 (environ 11 milliards de dollars), contre 734 milliards de dinars en 2008 (moins de 10 milliards de dollars) -Un taux de chômage de 10,2% contre 11,3% en 2008. II- REPLACER CES DONNEES DANS LE CONTEXE DE L'ECONOMIE ALGERIENNE Cette audience du président de la République, rentre dans le cadre du plan quinquennal 2010/2014 estimé à 286 milliards de dollars, mais dont 130 sont des restes à réaliser 2004/2009, reflétant d'importantes réévaluations et 150 milliards de dollars pour les nouveaux projets. Cela explique la décision de lutter contre les surcouts et d'établir un bilan budgétaire annuel, la modification et le complément du décret exécutif N° 98-227 du 13 juillet 1998, relatif, aux dépenses d'équipement de l'Etat. Ce décret vise une discipline dans la conduite des projets ou programmes et une responsabilisation plus grande de l'ensemble des intervenants dans le circuit de la dépense publique, en introduisant l'introduction de la notion de programme pluriannuel qui constituerait une passerelle fonctionnelle vers la nouvelle approche budgétaire, permettant de suivre et d'évaluer l'action de l'administration publique. Comme est prévu l'arbitrage du Conseil des ministres pour toute réévaluation de coût supérieur à 15% du coût initial, pour les grands projets mobilisant des moyens financiers publics importants. Mais qu'en sera-t-il sur le terrain, car ces orientation et textes le sont en intention, car les pratiques contredisent souvent les textes juridiques si louables soient- ils. Un contrôle doit être global : il doit concerner l'ensemble de la société supposant des un, Etat de droit et des mécanismes démocratiques, la réhabilitation du contrôle du parlement , de la Cour des comptes , l'Inspection générale des Finances dépendant du ministre des Fiances a un impact limité, car relevant de l'exécutif. Sans une gouvernance rénovée , une visibilité et cohérence de la politique socio-économique supposant l'intégration de la sphère informelle produit du dysfonctionnement des appareils de l'Etat, produisant la corruption, le contrôle budgétaire sera un vœux pieux avec un impact limité. Et comment ne pas rappeler le bilan fin juillet 2010 de l'ANDI, les déclarations d'investissement local ont nettement augmenté ces 3 dernières années en Algérie, passant de 11.000 projets en 2007, à 17.000 en 2008, pour enfin atteindre le chiffre de 20.000 en 2009, mais avec 1% seulement d'IDE. Ces données sont en termes d'intentions de projets et non de réalisation en termes de projets réalisés qui arrivent à maturation et qui tourneraient à moins de 30%.avec la dominance des transports (60%) et du BTPH (18 %) du total. Certes, les différentes mesures inscrites dans les lois de Finances complémentaires 2009 et 2010, ont certes stabilisé la valeur des implorations, mais ne les ont pas réduites substantiellement, car ce gonflement est due essentiellement à la dépense publique et il est à prévoir le même montant en 2010, à moins que l'on freine la dépense publique mais au risque d'une implosion sociale. Comme la mesure du passage sans transition du crédit documentaire du Remdoc au Credoc, qui risque de paralyser bon nombre d'entreprises privées et publiques, du fait que son opérationnalité suppose une réforme profonde du système financier relié aux réseaux internationaux et que de nombreux dossiers stagnent au niveau des banques, ce que voile cette baisse d'ailleurs très faible. Il faut éviter des utopies, l'Algérie étant une économie essentiellement rentière et que sur les 9,3% de croissance hors Hydrocarbures, l'on peut démontrer aisément que 80% le sont directement et indirectement par la dépense publique, via les Hydrocarbures restant aux seuls entreprises créatrices de richesses vivant sur l'autofinancement moins de 20%, comme le montre clairement moins de 3% d'exportation hors Hydrocarbures. Il en est de même du niveau des réserves de change, de la baisse, tant de la dette extérieure que de la dette publique intérieure, épongées par les recettes des Hydrocarbures sans s'attaquer à l'essence de ce gonflement, qui est la mauvaise gestion. Pour le cas de l'agriculture invoqué par le ministre des Finances, se pose cette question stratégique : Quelle est la part dans la création de la valeur ajoutée d'une bonne pluviométrie et quelle est la part, cela étant essentiel à un bon management stratégique et cette situation positive, est elle conjoncturelle ou structurelle et quel a été le bilan du Programme national du développement de l'agriculture (PNDA), qui a englouti des dizaines de milliards de dinars ? Car, l'Algérie est caractérisée par une faible productivité globale et continue d'importer la majorité de ses biens essentiels. Quant au taux d'inflation officiel ( ce taux est-il réaliste ?), il y a lieu de noter une nette accélération passant de 3% en 2007, à 4,5% en 2008 et près de 5,8% en 2009, allant vers la même tendance en 2010 , inflation qui a un impact négatif sur le niveau du pouvoir d‘achat de la majorité des citoyens jouant comme vecteur de concentration du revenu national au profit d'une fraction minime de revenus variables, tensions sociales atténuées tant par la cellule familiale, la sphère informelle, par des transferts sociaux (somme faramineuse de 10% du PIB, mais mal ciblés et mal gérés) et des emplois fictifs pour une paix sociale transitoire. Cela explique le taux de chômage officiel, artificiel autant que celui du taux de croissance, alors que l'important est la création d‘emplois utiles créateur de valeur ajoutée. Et que seule une nouvelle gouvernance, la valorisation du savoir et de l'entreprise peuvent permettre le passage d'une économie de rente à une économie hors Hydrocarbures : en fait accélérer la réforme globale supposant de profonds réaménagements dans les structures du pouvoir et non des décisions d'ordre techniques inefficaces sans s'attaquer à l'essentiel. Le problème essentiel stratégique posant la problématique de la sécurité nationale, sachant que selon la majorité des experts internationaux et nationaux, il y aura épuisement des réserves des Hydrocarbures entre 15/20 ans, en termes de rentabilité financière, (pouvant découvrir des milliers de gisements, mais non rentables évoluant dans le cadre de la concurrence internationale), ces dépenses publiques sans précédent depuis l'indépendance politique, préparent –t- elles véritablement l'après Hydrocarbures et l'Algérie à relever les défis nombreux, du fait de nombreux retards accumulés dans la réforme globale, face aux nouvelles mutations mondiales? Il s'agit de ne pas se tromper de cibles. D'où l'urgence d'un large débat national sans exclusive, loin des appareils d'Etat, sur l'avenir de l'économie algérienne. (1) Docteur Abderrahmane MEBTOUL Expert international professeur d'Université en management stratégique 16 aout 2010