Tout commence dans …des toilet-tes publiques! Cette pièce dont l'utilité pourrait sembler étonnamment réduite, fera office tour à tour de gagne-pain pour son exploitant, de défouloir (dans le sens propre comme au figuré) pour un père de famille enragé, ainsi que de scène de prédilection pour un jeune amoureux du 4ème Art, en mal de reconnaissance. Pourtant, rien ne prédisposait le «commerce» à être au centre de beaucoup de convoitises. Et pourtant ! Le gérant, un rasta, ancien syndicaliste- passé des banderoles contestataires aux serpillères javellisées- a bien tenté de préserver la «quiétude» due à cet endroit. En vain. Rihab, est enragé(e). Son personnage ne tient plus en place. Il menace d'exploser, si le gérant ne lui permet de se défouler dans l'une cabines de son commerce. Une explosion qui pourrait gêner la quiétude des lieux et baisser la fréquentation. Le gérant prend peur. Une longue négociation à couteaux tirés est engagée. Combien, comment, quand et surtout pourquoi cette haine: c'est à cause des pommes!! Selon Rihab. Encore objet de discorde. Rihab raconte: en rentrant du travail, son épouse enceinte (Rihab joue un personnage masculin) est enivrée par une odeur de pommes qui s'extirpe d'un étalage ambulant de fruits et légumes et qui exalte la femme en gestation. Des pommes qui, dans le contexte sont rares et coûteuses. Et c'est peu dire, le marchand de fruits et légumes n'est même pas prêt à en vendre. Les pommes sont exposées pour baigner la foule de leur odeur et donner au quartier un standing qui lui a échappé : on y vend des pommes! Vient le tour du saltimbanque. Vêtu du maillot de Yebda, il connaît les pièces de Shakespeare par cœur. Il est éloquent, élégant. Il joue comme un chef. Malheureusement, point d'occasion pour lui de vivre sa passion. Les rares rôles qui lui sont proposés sont ceux d'une armoire qui s'ouvre et se ferme en grinçant. Les WC? Il y trouve l'inspiration. Un endroit propre, calme, vaste et propice. Selon lui, à l'expression verbale qu'il manie fort bien. Le reste de la pièce Mustapha. Amine et Rihab la raconteront beaucoup mieux que moi. «Et Teffah», est inspirée de la pièce «El Gouwal» de Abdelkader Alloula dont la troupe «El Istidjmame», de passage à Alger, a eu droit à une standing-ovation comme rarement le TNA n'en a connue. Du talent, de l'énergie, du texte, des idées. La relève est définitivement assurée pour peu que les occasions soient accordées à ces jeunes. Le temps d'un soir, Abdelkader Alloula a été ressuscité, en famille. Sa fille Rihab (personnage principal de la pièce) était de la partie. Un pur moment de bonheur.