Les ultimatums du ministre du Commerce lancés l'année dernière à l'encontre des chefs d'entreprises commerciales qui ne se présentent pas aux annexes du CNRC pour déposer leurs comptes sociaux de l'exercice 2008 -ne semblent aucunement- dissuader les réfractaires. Sur les 92.000 entreprises d'importation inscrites au registre de commerce, 50.300 n'ont pas déposé leurs comptes sociaux, a regretté, jeudi en marge d'une visite au nouveau centre algérien de contrôle de la qualité, le ministre du Commerce El Hachemi Djaâboub. «Ces entreprises n'auront plus droit aux crédits bancaires. Et si elles arrivent à avoir de l'argent, les marchandises importées par ces entreprises seront bloquées au port. De plus, ces entreprises ne seront plus autorisées à soumissionner aux marchés publics. Pour travailler, elles doivent se conformer aux lois de la République», a soutenu le ministre. Il n'a pas indiqué si de nouvelles plaintes seront déposées contre des 50.300 entreprises ; surtout que son département qualifie de «non dissuasives» les amendes décidées par les tribunaux. En revanche, il a annoncé que des mesures sévères seront prises pour contraindre les entreprises d'importation à être à jour avec les services des Impôts, la CNAS (sécurité sociale), la CASNOS (sécurité sociale pour les non-salariés) et le CNRC. Les chefs d'entreprises «hors la loi» risquent un doublement des amendes. Et dans certains cas, des poursuites judiciaires. En effet, le ministère du Commerce avait fixé au 30 juillet 2009- le dernier délai- pour le dépôt légal des comptes sociaux de l'exercice 2008 auprès du centre national du registre de commerce (CNRC). Outre la batterie de dispositions prévues par la loi, en particulier des amendes entre 30.000 et 300.000 dinars, les réfractaires seront traités comme «personae non gratae». Les entreprises qui n'avaient pas déposé leurs comptes sociaux pour l'exercice 2008 seront exclues de facto du bénéfice de tous les avantages fiscaux, douaniers et commerciaux. Elles ne pourront plus bénéficier du droit à la soumission aux marchés publics et seront aussi interdites à l'exercice du commerce extérieur. Le ministère promet de traiter les fraudeurs au même titre que les auteurs d'infractions graves aux législations et réglementation fiscales, douanières, bancaires et commerciales. Ces mesures ont été décidées dans le cadre de la Loi de finances complémentaire 2009. Les réfractaires seront «fichés» sur le fichier national des fraudeurs qui sera institué auprès de la direction générale des impôts. La Loi de finances complémentaires prévoit pour les fraudeurs une «exclusion du bénéfice d'avantages fiscaux et douaniers liés à la promotion de l'investissement, l'exclusion du bénéfice des facilitations accordées par les administrations fiscales, douanières et de commerce, l'exclusion de soumission aux marchés publics, l'exclusion des opérations de commerce extérieur». Les chefs d'entreprises qui n'ont pas déposé leurs comptes sociaux ne pourront plus bénéficier de projets ni réaliser des opérations d'importation ou d'exportation. Les contrevenants pourront perdre leurs registres de commerces avant d'être poursuivis par la justice. Les pouvoirs publics ne vont pas y aller ainsi avec le dos de la cuillère pour assainir le marché des dizaines de milliers d'entreprises qui travaillent dans la clandestinité. En dépit des nombreuses opérations de sensibilisation et la délocalisation des services du CNRC, près de 60% des entreprises algériennes ne déposent pas leurs comptes sociaux. Les chefs d'entreprises n'affichent pas un grand engouement pour cette opération. Depuis son instauration en 2005, le taux de dépôt des comptes sociaux est passé de 2% en 2005 à 40% en 2008. Pour l'exercice 2005, seules 1.100 entreprises se sont conformées à la réglementation. Pour les années 2006 et 2007, leur nombre est passé respectivement à 14.700 et 24.000 à avoir déposé leurs comptes sociaux. Outre la possibilité d'avoir des informations plus précises sur le tissu des entités économiques algériennes, l'obligation de dépôt des comptes sociaux vise à renforcer les moyens de lutte contre l'évasion fiscale.