Vendredi à Taghit. Un soleil couvre de sa tendresse les montagnes de dunes dont la couleur se confond avec l'or dont se paraient les déesses. Sur les cimes on voit parfois des chameaux, des petits et des grands qui laissent derrière, leurs traces, comme unique preuve de leur existence. En bas, tout à fait en bas sur le site où se déroule le festival depuis cinq jours, deux khaïmas jumelles, l'une pour voir les films, les discuter et écouter les expériences des anciens, le tout étant baptisé quaâdate, et l'autre pour l'immuable plateau télé. Tout autour, des barricades que serrent des mains plurielles qui ont l'air de ne jamais avoir la chance de faire des images. A l'intérieur de la khaïma grande comme une classe d'une école primaire, des Taghitois courageux osent se mettre sur les larges matelas où tout le monde s'assoit pour voir, écouter, parler, se taire… pendant que les autres tournent autour, remontent sur les dunes, franchissent les barricades sans trop savoir s'il est permis de voir un film. Le festival du court-métrage est censé être pour eux, mais ils ne le savent pas. Alors certains demandent à demi-mot s'il est permis de partager une khaïma déjà pleine, trop pleine pour ceux qui l'avaient pensé. A maintes reprises, on nous demande si spectacle en plein air il y a. Des vendeurs de chechs, les restaurateurs, les anonymes qu'on rencontre dans la rue espèrent faire partie de la fête quand les projecteurs se focalisent non pas sur un écran, mais sur une scène où se produit un interprète quelconque qu'on peut voir et entendre de l'endroit le plus reculé de la dune. Comme les organisateurs n'ont pas pensé à installer d'autres khaïma pour les Taghitois, les images ne sont passées que dans la tête des gens qui les ont faites. Qu'à cela ne tienne ! Nous l'avions déjà dit, il y a eu 26 courts-métrages en compétition. Les courts dont quatre Algériens, sont venus de France, de Belgique, de l'Egypte, de la Serbie, du Maroc, de la Tunisie… mais les participants ont été à tous les coups déçus par la qualité des produits. Parmi les œuvres et selon toujours les professionnels que nous avons eu à interviewer, seulement quatre films portent en eux quelques graines artistiques. Il s'agit entre autres de " OS " (lire ouvriers spécialisés) proposé par la Française Marie Vanaret et qui retrace dans une formidable chorégraphie, un moment douloureux d'après-guerre. Dans ce film où il n'y a aucun dialogue, ni monologue d'ailleurs, la réalisatrice a conté de façon puissante, la reconstruction de la France après la seconde guerre mondiale par les mains laborieuses des Maghrébins qu'on recrutait à la chaîne comme avait quand on achetait les esclaves qui avaient toutes leurs dents, " je voulais reproduire le geste unique des recrutés qui allaient dans la plupart des cas sur les chantiers navals, du bâtiment, de l'aviation et autres " a expliqué la réalisatrice qui avoue que l'idée du film lui était venue suite à la découverte du très touchant " Mémoires d'émigrés " de Yamina Benguigni. Un autre petit film cette fois-ci d'une Algérienne qui vit en France et qu'on découvre ici avec bonheur. Elle s'appelle Sabrina Draoui elle est photographe à l'origine, et elle propose un 17' qui s'appelle " Goulili ".Dans un décor réfléchi, deux femmes qui ont un regard sur le monde diamétralement opposé, se confrontent plutôt on confrontent leurs idées sans violence aucune. C'est peut-être l'aspect dépouillé du désert ou alors le copinage qui a sévi pendant ce rendez-vous, les jeunes qui sont dans l'absolu congratulation veulent faire des films, même si dans leurs CV on mentionne dans une ligne courte, figurant dans un long-métrage. Les dunes semble simuler tant de passions ! De notre envoyée spéciale à Taghit Yasmine Ben