La trêve hawaïenne de fin d'année de Barack Obama s'est transformée en chausse-trape politique. Tandis que les files d'attente s'allongeaient dans les aéroports, au lendemain de la tentative d'attentat du 25 décembre contre un avion de Northwest, le président américain a tardé à interrompre ses vacances pour s'adresser aux Américains. Le camp républicain s'est immédiatement engouffré dans la brèche, brossant l'image d'un Barack Obama moins préoccupé par la menace terroriste que par ses parties de golf au bord des plages de son enfance. L'ancien vice-président Dick Cheney a dénoncé le "profil bas" du président. "Il semble penser que s'il donne aux terroristes les mêmes droits qu'aux Américains, (...) s'il ferme Guantanamo et en libère les terroristes d'Al-Qaida les plus endurcis, nous ne serons pas en guerre", a déclaré, mercredi 30 décembre, M. Cheney au site Politico, ajoutant : "Mais nous sommes en guerre, et quand le président Obama prétend le contraire, nous sommes moins en sécurité." "Dans l'administration Obama, le respect des droits des terroristes pèse plus lourd que la vie des Américains", a aussi attaqué Newt Gingrich, un "poids lourd" républicain. Dans une lettre destinée à collecter des fonds, Pete Hoekstra, un élu du Michigan, affirme que M. Obama "et ses copains gauchistes sapent le travail des hommes et femmes courageux qui oeuvrent inlassablement à nous protéger". Pete Hoekstra accuse aussi le président, qui a promis de fermer la base de Guantanamo à Cuba, de "renvoyer chez eux, au Yémen, des prisonniers de Gitmo". Selon le Washington Post, d'ex-détenus de Guantanamo, dont certains ont été relâchés par l'administration Bush, ont aidé à développer la branche d'Al-Qaida dans la péninsule Arabique (AQPA) qui a revendiqué la tentative d'attentat du 25 décembre. Ces critiques, qui rompent avec la tradition de réserve après une attaque terroriste, ravivent la tactique de la campagne présidentielle républicaine : faire passer les démocrates pour laxistes sur le terrorisme. Sur le blog de la Maison Blanche, le directeur de la communication, Dan Pfeiffer, a renvoyé la balle aux républicains, responsables selon lui de la concentration des forces nationales vers l'Irak - "un pays d'où Al-Qaida était absent", rappelle-t-il. Cette stratégie a permis à l'organisation de se regrouper à la frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan et de "se régénérer dans des endroits comme le Yémen et la Somalie", ajoute-t-il. M. Obama n'a pas "besoin de bomber le torse", souligne M. Pfeiffer. Et s'il n'utilise plus l'expression "guerre contre la terreur", emblématique des années Bush, c'est qu'il considère que son administration n'est pas "en guerre contre une tactique (le terrorisme) ", mais "contre quelque chose de tangible : Al-Qaida". Selon le collaborateur du président, "sept années de rhétorique belliqueuse n'ont pas diminué la menace d'Al-Qaida" et il "est étrangement paradoxal, à un moment où (le) pays est attaqué, que l'architecte de ces politiques (Dick Cheney) attaque le président". En décembre 2001, George Bush avait mis six jours à réagir à la tentative d'attentat de Richard Reid, qui avait essayé de faire exploser une bombe dissimulée dans sa chaussure sur un vol Paris-Miami. "Les républicains sont tout simplement hypocrites", a lancé Brad Woodhouse, porte-parole du comité national des démocrates. Au-delà de ces attaques, l'attentat manqué de Noël a révélé des failles, sur lesquelles l'administration Obama enquête. Selon la presse, Londres avait rejeté en mai 2009 une demande de visa d'Omar Farouk Abdulmutallab, le suspect du 25 décembre ; en août 2009, les renseignements américains avaient intercepté des communications d'Al-Qaida au Yémen évoquant l'utilisation d'un Nigérian dans un complot. Si ces informations avaient été bien analysées, elles auraient peut-être permis d'éviter la tentative d'attentat.