Les Etats membres de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) ont proposé de nouvelles mesures pour la conservation et l'utilisation durable du thon rouge, des populations d'éléphants, de plusieurs espèces de requins, coraux, reptiles, insectes et plantes. Plus de 40 propositions seront ainsi soumises à considération lors de la prochaine conférence triennale de la CITES qui se tiendra à Doha (Qatar) du 13 au 25 mars. Certains gouvernements proposent notamment de cesser d'appliquer la réglementation CITES à des espèces qui ne sont plus menacées grâce aux efforts de la Convention depuis son entrée en vigueur il y a 35 ans. Bon nombre de ces propositions reflètent la préoccupation internationale croissante face à l'accélération de la destruction des écosystèmes marins et forestiers du monde, qui résulte de la surpêche et de l'abattage excessif des arbres, et des impacts potentiels du changement climatique sur les ressources biologiques de la planète. L'assemblée générale de l'ONU a déclaré 2010 l'année de la biodiversité et la conférence de la CITES sera un moment charnière de cette année pour prendre des mesures en faveur de la biodiversité. Les autres questions inscrites à l'ordre du jour incluent l'adoption de mesures urgentes pour s'attaquer au commerce illégal du tigre, des rhinocéros et d'autres espèces au bord de l'extinction, pour examiner les impacts potentiels des mesures de la CITES sur les moyens d'existence des pauvres en milieu rural, qui sont souvent en première ligne dans l'utilisation et la gestion des espèces sauvages, et pour allouer des ressources financières suffisantes afin que la CITES puisse atteindre pleinement ses buts. Une augmentation substantielle du budget sera nécessaire pour garantir la mise en oeuvre correcte des mesures dont l'adoption sera proposée à Doha. Le budget annuel actuel du Secrétariat CITES est d'environ 5 millions de dollars américains. "2010 sera une année décisive pour la biodiversité, une année qui devait marquer un tournant dans le rythme d'appauvrissement de la biodiversité d'importance économique, mais cela ne sera pas le cas. 2010 doit donc voir émerger un nouvel engagement et un redoublement d'efforts de la part de la communauté internationale pour atteindre cet objectif. La CITES constitue un élément essentiel pour relever ce défi. En garantissant une réglementation appropriée du commerce international des espèces sauvages, la CITES contribue à protéger la biodiversité de la planète de la surexploitation et à assurer une gestion durable et plus efficace de ce patrimoine naturel" - a déclaré Achim Steiner, Secrétaire général adjoint des Nations unies et Directeur exécutif du Programme des Nations unies pour l'environnement, qui administre le Secrétariat CITES. "Le thème marin de la conférence de la CITES de cette année est particulièrement frappant" - a déclaré Willem Wijnstekers, Secrétaire général de la CITES. "Il confirme la tendance qui a débuté en 2002. La CITES est de plus en plus considérée comme un outil incontournable pour atteindre l'objectif de ramener les stocks de poissons épuisés à un niveau de rendement maximal durable d'ici à 2015, comme convenu au Sommet mondial de Johannesburg sur le développement durable". Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), les pêcheries mondiales (non aquacoles) ont produit 92 millions de tonnes de poissons en 2006, dont 81,9 millions pêchés en mer. La valeur du total des prises dans les eaux marines et d'eau douce au premier point de vente était de 91,2 milliards d'USD. L'on estime ainsi que quelque 52% des stocks de poissons marins ou des groupes d'espèces sont pleinement exploités, 19% sont surexploités et 9% épuisés ou en voie de rétablissement après épuisement. Le potentiel maximal de pêche dans les océans a probablement été atteint, et une approche plus étroitement contrôlée de la pêche est nécessaire. Depuis quelques années, un nombre croissant de poissons exploités à des fins commerciales sont soumis aux contrôles CITES comme, par exemple, le requin pèlerin et le requin-baleine, inscrits à l'Annexe II en 2002, le grand requin blanc et le napoléon inscrits en 2004, et l'anguille européenne et les poissons-scies inscrits en 2007. A la prochaine conférence, des propositions seront faites pour que huit espèces pêchées à des fins commerciales relèvent de la CITES. Monaco propose l'interdiction totale du commerce international du thon rouge. (proposition 9). Cette espèce phare peut atteindre 3 m de long et peser plus de 650 kg. Le thon rouge peut nager à près de 40 km à l'heure et plonge à 1000 m de profondeur. Il est très recherché comme mets délicat: en janvier 2010, un de ces poissons a été vendu pour plus de 120.000 USD. Bien qu'il soit pêché depuis des siècles, ses populations dans l'Atlantique et en Méditerranée ont subi un déclin très marqué ces 40 dernières années. Des efforts répétés ont été faits pour garantir une pêche plus durable mais Monaco déclare maintenant qu'il est temps de mettre un terme au commerce international pour permettre à l'espèce de se rétablir. Le requin-marteau est présent dans les eaux côtières chaudes des mers tempérées et tropicales et est largement exploité pour ses ailerons. Un déclin important des populations de cette espèce a été signalé dans de nombreuses régions où elle est pêchée. Deux autres espèces de requins-marteaux (le grand requin-marteau et le requin-marteau commun) et deux autres requins (le requin gris et l'holbiche sombre) ont des formes d'ailerons similaires, et les auteurs de la proposition, les Etats-Unis d'Amérique et les Palaos, recommandent que le commerce de toutes ces espèces soit soumis aux contrôles CITES. Ces deux pays proposent aussi que les contrôles CITES s'appliquent au commerce d'un autre requin, le requin océanique, qui, bien que largement réparti dans les eaux tropicales et subtropicales, est en déclin partout où il est pêché pour ses ailerons. On estime qu'au total, des millions de requins de ces deux espèces sont pêchés chaque année pour répondre à la demande d'ailerons. Les plus précieux de tous les coraux, le corail rouge et le corail rose (proposition 21) sont prélevés depuis plus de 5000 ans pour être utilisés en bijouterie et comme objets décoratifs. Leurs colonies arborescentes créent des habitats de choix pour d'innombrables autres espèces dans les eaux tropicales, subtropicales et tempérées, souvent à de grandes profondeurs. Le prélèvement excessif à des fins de commerce international et la destruction de colonies entières par des chaluts et des dragues a grandement affecté leur capacité de reproduction et de régénération. Les Etats-Unis, et la Suède, au nom des Etats membres de la Communauté européenne, proposent d'inscrire le corail rouge et le corail rose à l'Annexe II pour en contrôler le commerce.