La Commission européenne a proposé, hier, aux gouvernements de l'UE de soutenir le classement du thon rouge parmi les espèces menacées d'extinction, et donc d'interdire courant 2011 le commerce international de ce poisson très apprécié des Japonais. "Nous n'avons pas d'autre choix que d'agir maintenant et de proposer l'interdiction du commerce international" du thon rouge, a déclaré à la presse le commissaire européen à l'environnement, Janez Potocnik. L'exécutif européen précise dans un communiqué qu'il souhaite qu'une telle interdiction entre en vigueur "dans le courant de l'année prochaine". Il se dit "vivement préoccupée par le fait que la surpêche du thon rouge de l'Atlantique, largement imputable au commerce international, menace gravement les stocks de cette espèce". La proposition sera examinée avec les Vingt-Sept, qui devront présenter une position commune de l'UE pour la prochaine réunion de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), qui se tiendra à Doha, au Qatar, du 13 au 25 mars 2010. Inscrire le thon rouge à l'annexe I de la CITES signifierait interdire le commerce international de ce poisson. Si l'interdiction devait entrer en vigueur, la Commission européenne veillerait, souligne-t-ellle, "à ce que les entreprises de pêche artisanale soient autorisées à approvisionner le marché de l'UE avec des captures provenant des eaux des Etats membres". Cette décision a été rendue possible notamment par la décision prise par trois grands pays européens de pêche au thon en Méditerranée, la France, l'Italie et l'Espagne, de soutenir l'idée d'un moratoire pour soulager l'espèce menacée. La France s'est prononcée récemment en faveur d'une interdiction du commerce international, mais avec un délai de dix-huit mois avant l'entrée en vigueur. L'Italie lui a apporté son soutien en janvier et la ministre de la pêche et de l'environnement espagnole, Elena Espinosa, a dit lundi à Bruxelles être d'accord avec la proposition de la Commission. En septembre 2009, une première proposition en ce sens de la Commission n'avait pas réuni la majorité nécessaire des Etats au sein de l'UE. Le thon rouge ne bénéficie actuellement d'aucune protection de la Cites, la seule organisation mondiale ayant autorité pour limiter ou interdire le commerce international d'espèces animales ou végétales menacées. L'interdiction qui se profile de facto de la pêche dans les eaux européennes constitue un coup dur pour la profession, qui avait par avance mis en garde contre les risques de banqueroute, notamment dans le sud de la France. Une grande partie de leur production est en effet exportée au Japon. Les Japonais absorbent à eux seuls 80 % des captures mondiales du thon rouge, dont la chair est très appréciée crue, en sashimi, ou accommodée en sushi. Le Japon a, du reste, fait savoir lundi qu'il refusait toute interdiction de la pêche et du commerce de l'espèce. "Nous faisons ce que nous pouvons pour qu'elle ne soit pas adoptée" par la Cites, prochaine étape, a déclaré Shingo Ota, un négociateur à l'agence des pêcheries du Japon. En un demi-siècle, de 1957 à 2007, les stocks de thon rouge ont baissé de 75 %, et de plus de 60 % au cours des dix dernières années, selon les défenseurs de l'environnement.