Les caractéristiques génétiques d'un champignon microscopique permettent de multiplier par cinq la croissance de la plante de riz offrant des perspectives intéressantes pour l'agriculture durable, selon une étude publiée jeudi par l'Université de Lausanne. Une utilisation à large échelle pour l'agriculture du Glomus intraradices, un champignon mycorhizien qui vit dans les racines des végétaux, est envisageable à un horizon de deux à cinq ans, affirment les chercheurs dans un communiqué. Quatre années d'expérimentations ont été nécessaires pour parvenir à ce résultat. Les scientifiques ont tout d'abord sélectionné vingt souches différentes du champignon grâce à des échantillons de spores, ces dernières ayant la particularité de disposer d'un "bagage génétique" qui peut varier d'un spore à un autre. Ils ont ensuite inoculé ces souches dans des cultures de riz en serre. Le "bagage génétique" de chacune des spores de ce champignon étant différent, chaque souche de champignon a eu un effet particulier sur les cultures de riz. C'est un peu comme une prothèse, une extension des racines. Grâce à des champignons dits "mycorhiziens" et à leurs hyphes, de fins filaments qui créent des réseaux souterrains, les plantes peuvent aller chercher plus profondément les nutriments dont elles ont besoin. En exploitant cette symbiose qui se poursuit depuis des millions d'années, il est possible de favoriser naturellement certains végétaux. Des chercheurs lausannois se sont plongés dans la génétique très particulière d'un de ces champignons ancestraux et sont parvenus à augmenter d'un facteur cinq la croissance du riz. Leurs travaux, publiés aujourd'hui sur le site deCurrent Biology , ouvrent des perspectives intéressantes en matière de sécurité alimentaire et d'approche durable de l'agriculture. Plus de 80% des plantes vivent en symbiose avec un champignon mycorhizien. "Ce sont probablement eux qui ont permis aux plantes de sortir de l'eau, il y a 500 à 600 millions d'années. Ils les ont aidées à s'installer sur terre en se substituant à leur système de racines encore très primitif", explique Francis Martin, spécialiste des champignons symbiotiques à l'Institut national français de la recherche agronomique de Nancy. Sous terre, ces organismes développent des réseaux très denses, qui peuvent parcourir des dizaines de mètres et relier plusieurs plantes, même d'espèces différentes, entre elles. "On considère qu'ils peuvent multiplier jusqu'à mille fois la surface d'absorption du réseau racinaire", poursuit le microbiologiste. Les champignons profitent des sucres produits par la plante via la photosynthèse. Quant à cette dernière, elle atteint grâce à cette symbiose des nutriments qui seraient autrement hors de portée. "Surtout des phosphates", précise une des auteurs de l'étude, Caroline Angelard, du Département d'écologie et d'évolution de l'Université de Lausanne. Un élément central pour tous les organismes. "Il y en a dans l'ADN, l'ARN et beaucoup de protéines. Sans phosphate, il n'y a pas de vie", explique Didier Reinhardt, du Département de biologie végétale de l'Université de Fribourg.