Loin de s'apaiser, la situation politique et humanitaire au Darfour connaît un regain de tension. Les relations entre Khartoum et N'Djamena se sont encore délitées à la suite d'une incursion de l'armée tchadienne en territoire soudanais alors que le HCR a révélé mardi l'existence d'un charnier de plus de 400 personnes le long de la frontière entre les deux pays. Le Haut commissariat des Nations unies (HCR) a fait état mardi de l'existence d'un charnier au Darfour, le long de la frontière séparant le Tchad du Soudan. Un charnier attribué aux milices janjawids qui sévissent depuis 2003. Le HCR a parlé d'une "scène apocalyptique" pour décrire la situation. Les attaques se sont déroulées les 31 mars dernier dans les villages de Tiero et Marena, en territoire tchadien à quelque 900 kilomètres de la capitale N'Djamena selon les frontières héritées de la décolonisation qui ne tiennent pas compte du mode de vie essentiellement nomade des populations vivant dans la région. Le nombre de 65 tués, annoncé dans un premier temps pas le gouvernement tchadien, a donc été fortement revu à la hausse. "Les estimations du nombre de morts se sont considérablement alourdies et se situent désormais entre 200 et 400. La majeure partie des victimes ayant été enterrées là où leur cadavre a été découvert, souvent dans des fosses communes étant donné leur nombre, nous ne saurons peut-être jamais leur nombre", précise le HCR dans un communiqué. Zone tampon entre le Tchad et le Soudan, le Darfour est livré au bon vouloir des milices janjawids, gouvernant sur cette région par le feu et par le sang. En face des miliciens à cheval, les rebelles au gouvernement de Khartoum tentent de continuer de vivre sur leurs terres. Aujourd'hui, Tchad et Soudan s'accusent mutuellement de soutenir les protagonistes du conflit qui perdure depuis 2003. Le Soudan et le Tchad s'accusent mutuellement de soutenir les rebelles de l'autre pays et nient tous deux ces allégations. Les observateurs internationaux redoutent une instrumentalisation du conflit et son extension aux pays frontaliers, le Tchad et la Centrafrique. La majorité des réfugiés de la guerre du Darfour qui a fait plus de 200 000 victimes et 2 000 000 de déplacés ont trouvé un "havre" de paix sur le territoire tchadien, au sein de camps onusiens. Mardi, c'est une incursion des forces armées tchadiennes lancées à la poursuite de rebelles qui a mis un peu plus le feu aux poudres entre les deux voisins malgré des accords de paix réitérés. En réponse à "une intrusion de deux kilomètres et demi qui s'est soldée par la mort de 17 membres des forces de sécurité soudanaises", Khartoum a annoncé une riposte de grande ampleur. "Nous allons étudier toutes les ripostes, politique, diplomatique et militaire", a déclaré un porte-parole militaire tandis que l'ambassadeur du Tchad était convoqué au ministère soudanais des Affaires pour s'expliquer sur cet incident. Thabo Mbeki et John Negroponte en médiateurs. N'Djamena, après avoir nié les faits, a regretté les victimes collatérales tout en se justifiant d'un droit de poursuite dans une opération de sécurisation de sa frontière. "Nos forces de défense et de sécurité ont eu la surprise d'entrer en contact direct avec les forces armées soudanaises déployées pour assurer les arrières des rebelles", a expliqué le ministre tchadien de la Communication, Hourmadji Moussa Doumgor. Le ministre a également mis en garde le Soudan contre toute riposte. "Si le Soudan opte pour une agression directe, le Tchad usera de tous les moyens pour y répondre", a poursuivi Doumgor.