Les pays les plus riches de la planète doivent prolonger la durée des plans de soutien à l'économie et les initiatives créatrices d'emploi, a déclaré lundi le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn. Dominique Strauss-Kahn a constamment cherché depuis novembre 2007 à laver le FMI de sa réputation d'affameur des peuples. "Dans tous les programmes de stabilisation, nous nous engageons systématiquement à protéger les catégories les plus vulnérables", a-t-il de nouveau rappelé. Le FMI semble pleinement conscient des effets dévastateurs du chômage de masse. "Même quinze-vingt ans après avoir été frappées par une perte d'emploi, les personnes concernées auront en moyenne un salaire inférieur de 20% aux autres ouvriers" , note Olivier Blanchard, l'économiste en chef du Fonds. Le FMI et l'OIT déplorent que la crise ait généré plus de 30 millions de chômeurs supplémentaires depuis 2007, "dont les trois quarts dans les pays avancés". Les pays émergents étaient très peu représentés dans la capitale norvégienne. "On s'est assez bien débrouillé en matière d'emploi. Nous recommandons notre modèle aux autres pays en développement", a reconnu le Gong Sen, directeur adjoint du Centre de recherche sur le développement de la Chine. La crise sociale ne frapperait-elle que les pays "avancés"? "Oui, si on regarde les chiffres à court terme, comme aux États-Unis ; non à moyen terme, car les émergents sont également concernés", tranche Dominique Strauss-Kahn. Il fait allusion aux prévisions de l'OIT, qui annonce l'arrivée de 400 millions de jeunes sur le marché mondial du travail d'ici à 2020. Sans oublier qu'avec 210 millions de chômeurs, le monde dans son ensemble, enregistre aujourd'hui un record historique. Le FMI constate que de plus en plus de personnes ne parviennent pas à trouver d'emploi durable, ce qui affaiblit la cohésion sociale et accentue les risques de désordres qui pourraient menacer certaines démocraties. "Le marché du travail traverse une très mauvaise passe", a déclaré Dominique Strauss-Kahn lors d'un colloque à Oslo, ajoutant que la récession avait laissé derrière elle un océan de chômage. "Nous devons reconnaître que la crise ne sera pas terminée tant que le chômage n'aura pas diminué de manière significative", a-t-il dit, ajoutant que la question de la croissance et celle de l'emploi étaient les plus brûlantes. Selon le Premier ministre espagnol Jose Luis Rodriguez Zapatero, également présent à cette conférence organisée à la fois par le FMI et par l'Organisation internationale du Travail, le niveau élevé du chômage pourrait provoquer une crise de confiance en Europe. "La pire des crises serait une crise de pessimisme, de manque de confiance, de résignation", a-t-il dit, avant d'expliquer que la création d'emplois était la première des priorités en Espagne, où 20% de la population active est privée de travail. Le Premier ministre grec, George Papandréou, a estimé qu'il faudrait "insuffler un peu d'oxygène dans les institutions démocratique". Quant au commissaire européen chargé de l'Emploi et des affaires sociales, Laszlo Andor, il a qualifié l'année 2010 "d'annus horribilis" pour l'emploi. "Si nous n'agissons pas, 2011 pourrait être une 'annus horribilis' pour la cohésion sociale", a-t-il ajouté. Le FMI estime qu'un soutien prolongé à l'économie méritait bien une augmentation de la dette s'il a permis de combattre le chômage, plus coûteux selon lui pour les sociétés dont certains travailleurs risquent de sombrer dans le découragement, perdre les économies d'une vie ou abandonner le marché de l'emploi. La sévérité de la crise incite le FMI à défendre le principe de la prolongation de l'indemnisation du chômage, afin de soutenir à la fois la demande et le moral des personnes concernées, tout en accordant des primes aux entreprises qui privilégient la réduction du temps de travail et des salaires au détriment des suppressions de postes. Le directeur général du FMI a défendu le rôle du Fonds sur l'emploi, estimant qu'il ne fallait pas le caricaturer en réduisant sa fonction aux cures d'austérité qu'il recommande parfois. Le chômage est bien plus qu'une "simple question de fiche de paie", a dit Dominique Strauss Kahn. Dans les pays développés, les chômeurs ont davantage de problèmes de santé tandis que leurs enfants ont de moins bons résultats scolaires. Dans les sociétés plus pauvres l'emploi est parfois une question de vie ou de mort, pouvant provoquer des conflits violents, "voire la guerre", a-t-il dit.