Les pays du G20 réunis ce week-end en Corée du Sud ont pris des mesures jugées importantes pour éviter une guerre des monnaies mais cette paix précaire doit être maintenant consolidée, estiment les analystes. Le communiqué final laborieusement élaboré par les ministres des Finances du Groupe des vingt principaux pays développés et en développement (G20) contient des promesses sur les changes et un accord sur la réforme de la gouvernance du Fonds monétaire international, mais il ne fixe pas d'objectifs de réduction des déséquilibres commerciaux qui menacent la croissance mondiale. Selon certains, ce compromis ne fait que masquer les points de vue opposés des deux principaux belligérants : les Etats-Unis et la Chine. Washington voulait que les pays ayant des excédents commerciaux importants, principalement la Chine, laissent leur devise s'apprécier? Le communiqué appelle à des taux de change qui soient davantage fixés par les marchés, à éviter les dévaluations compétitives et à mener des politiques visant à réduire les déséquilibres des comptes courants. Les pays en développement critiquaient les pays riches pour vouloir faire fonctionner la planche à billets et déclencher ce faisant un afflux de capitaux sur leurs marchés émergents, au risque de faire flamber leurs devises et d'handicaper leurs exportations? Le communiqué final promet que les pays dont la monnaie fait office de réserve de change - les Etats-Unis en langage codé - seront vigilants face aux fluctuations désordonnées sur les marchés des changes. positifs de l'accord du G20 - Washington s'est engagé à ne pas dévaluer le dollar si les économies émergentes laissent leur devises s'apprécier - Chris Turner, responsable des changes chez ING Commercial Banking à Londres, ne voit pas pour autant une nouvelle ère en matière de coopération. En marge de la réunion, des critiques ont fusé. Le ministre allemand de l'Economie Rainer Brüderle ne s'est pas privé de dire que l'assouplissement quantitatif que s'apprête à mettre en oeuvre la Réserve fédérale des Etats-Unis, c'est-à-dire l'utilisation de la planche à billet pour racheter des actifs et soutenir l'économie américaine, équivalait à une manipulation du taux de change du dollar. "Le communiqué final montre tous les signes d'un compromis peu convaincant entre des intérêts concurrents", commente Gareth Berry spécialiste des changes chez UBS à Singapour. La proposition du secrétaire américain au Trésor Timothy Geithner de limiter les excédents ou les déficits des comptes courants à 4% du produit intérieur brut (PIB) a été aussi accueillie froidement. L'Inde, la Russie, le Japon et l'Allemagne, ainsi que la Chine, spécifiquement visée, ont tous refusé cette proposition.Notons que le secrétaire américain au Trésor Timothy Geithner a affirmé dimanche que la Chine était désormais partie prenante des grandes questions relatives aux devises et qu'elle allait poursuivre dans la voie d'une politique de changes plus souple. Dans un entretien accordé à Bloomberg Television à l'issue de la réunion des ministres des Finances du G20 samedi en Corée du Sud, Timothy Geithner a déclaré que la Chine voyait son intérêt dans la hausse du taux de change du yuan par rapport au dollar parce qu'elle ne voulait pas que sa politique monétaire soit contrôlée par la Réserve fédérale américaine. "C'est un pays indépendant, une économie importante. Il a besoin de souplesse pour mener sa politique dans une direction qui ait du sens pour (lui)", a déclaré Timothy Geithner. "Et cela nécessite que son taux de change monte avec le temps, comme c'est le cas maintenant. Nous voulons que cela continue. Ils ont encore du chemin à faire mais ils se sont engagés à le faire", a ajouté le secrétaire au Trésor. "A mon sens, on va les voir continuer à bouger." Les commentaires de Timothy Geithner ont été faits quelques heures avant qu'il ne se rende à Qingdao, en Chine, pour rencontrer le vice-Premier ministre chinois Wang Qishan. Selon certaines estimations, le yuan chinois serait sous-évalué d'au moins 20%. Lors de la réunion de Gyeongju, les ministres du G20 se sont engagés à éviter les dévaluations de changes compétitives et à réduire les déséquilibres entre comptes courants des divers pays, mais n'ont pas pour autant adopté de critères chiffrés.