Les Etats membres du G20 se sont mis d'accord samedi pour travailler à l'instauration de taux de change déterminés par le marché et à poursuivre une série d'actions nécessaires à la réduction des déséquilibres excessifs. Le communiqué, diffusé au terme de deux journées de réunion des ministres des Finances des Vingt en Corée du Sud, marque un accord des membres pour "s'abstenir de toute dévaluation compétitive" de leur monnaie. Il indique également que les pays les plus développés doivent se montrer vigilants contre une volatilité excessive et des mouvements incontrôlés des taux de change. Cette précision prend en compte une inquiétude formulée par la Chine et par d'autres pays face à une politique américaine qui pourrait affaiblir le dollar. "Cela signifie que nous entendons promouvoir une stabilité maximale entre les principales monnaies parce que cela réduira les risques de brusques mouvements, dont des flux de capitaux, qui pourraient faciliter la propagation de l'inflation", a commenté Christian Noyer, gouverneur de la Banque centrale européenne (BCE). Le ministre allemand de l'Economie, Rainer Brüderle, s'est montré critique à l'égard de la politique américaine d'augmentation des liquidités, estimant qu'elle constitue une manipulation indirecte des taux de change. "J'ai essayé de dire clairement lors de ma contribution à la discussion que je considérais cela comme une mauvaise manière de procéder", a-t-il. "De mon point de vue, une augmentation excessive et permanent des liquidités constitue une manipulation indirecte du taux des marchés des changes", a-t-il ajouté. Le texte final ne fournit pas d'objectifs chiffrés pour la réduction des déséquilibres des comptes courants comme le souhaitaient les Etats-Unis. Le texte précise seulement que les déséquilibres importants persistants, dont l'évaluation sera faite en fonction de critères indicatifs qui doivent encore être approuvés, pourraient ouvrir une évaluation du Fonds monétaire international. "Nous sommes favorables à l'établissement de critères indicatifs sur les questions ayant trait aux déséquilibres mondiaux. Mais fixer des objectifs chiffrés aurait été facilement contreproductif", a déclaré Olli Rehn, commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires. Dans un climat alourdi par les risques de guerre des changes, le G20 Finances a appelé à des systèmes de taux de change "davantage déterminés par le marché" et "à résister à toutes les formes de mesures protectionnistes", des engagements salués par les analystes. Pour Domenico Lombardi, ancien membre du conseil d'administration du FMI et de la Banque mondiale, les conclusions du G20 sonnent comme une victoire pour le ministre américain des Finances, Timothy Geithner, qui avait fermement rappelé que les déséquilibres des comptes courants menaçaient l'économie mondiale. "Le consensus au sein du G20 s'est déplacé vers la position américaine mais sans fixer de limites chiffrées à ces déséquilibres, il est peu probable que cet engagement ait des effets contraignants", a estimé M. Lombardi. "Les Chinois s'étaient engagés à plus de flexibilité sur le taux de change du yuan avant le sommet de Toronto (du G20 en juin) mais ils ont peu agi depuis", a-t-il ajouté. Tandis que les Etats-Unis accusent la Chine de maintenir le yuan à un niveau artificiellement bas, nombre de pays émergents se plaignent de la politique monétaire américaine qui fait chuter le dollar et renchérit leurs exportations, tout en attirant chez eux des capitaux volatils et spéculatifs. M. Geithner a cependant assuré samedi à l'issue des débats être en faveur d'un "dollar fort" et demandé une "appréciation graduelle" des monnaies des pays à fort excédent commercial. Pour Marco Annunziata, économiste chez Unicredit Group à Londres, l'accord trouvé samedi "va contribuer à apaiser les craintes des marchés face à une guerre des monnaies".